Perturbations au Gibus
Perturbator, alias James Kent, fait partie de ces artistes qui restent anonymes dans leur pays, tout en ayant une renommée certaine à l’étranger. On a beau se retourner le cerveau, on ne trouve jamais vraiment les explications à de tels phénomènes… Bref, c’est un peu triste à dire, mais ce talentueux jeune homme n’est même pas signé sur un label français, mais sur l’excellent Blood Music établi en Finlande. Avec un Dangerous Days très réussi sous le bras, Perturbator était au Gibus pour son premier passage sur scène en France, et voilà comment ça s’est passé.
Pavillon Rouge
Si son nom semble inspiré de la chanson « Pavillon Rouge » d’Indochine, le groupe joue une musique qui n’a pas grand-chose à voir avec celle de leurs aînés. Résultant d’un mélange entre black metal et indus, il faut bien reconnaître que les deux genres se marient parfaitement ensemble, et le combo grenoblois le montre sous nos yeux. D’ailleurs, l’esthétique black metal est reproduite jusque dans le son, qui est franchement sale ce soir. Dans la plupart des cas, un son de cette qualité est synonyme d’un concert dont on ne va pas garder un bon souvenir, mais ici, cet aspect brut contribue au charme de la performance, en lui donnant un aspect authentique et punk.
D’autant plus que les musiciens se donnent à fond, en particulier Kra Cillag, vocaliste de Pavillon Rouge. Pour le coup, sa voix est bien audible et vraiment convaincante, avec une rage et une puissance qui ne sont pas sans rappeler Rose Hreidmarr (The CNK / Anorexia Nervosa). Du côté des originalités, on peut sans aucun doute noter le batteur du groupe qui joue sans grosse caisse (celle-ci est programmée). Il peut donc se consacrer à marteler ses cymbales et sa caisse claire comme un forcené, et visuellement, ça en jette ! Il manquerait juste un peu de fumigène pour coller aux ambiances peintes par la musique jouée.
Le public quant à lui est divisé en deux. On a d’un côté les premiers rangs qui sont devenus complètement fous face à la performance débridée et décadente de Pavillon Rouge, et on les comprend. De l’autre, il y a le fond de la salle, qui regarde le concert d’un air stoïque mais intéressé néanmoins. Le contraste reste assez amusant à observer, entre à peine quelques mètres de chair imbibée de houblon. Au niveau de la setlist, elle est tout simplement divisée entre les deux albums du groupe, dont le prochain, Legio Axis Ka, sortira le 23 février prochain sur le label Swamp Records. Les nouveaux morceaux s’intègrent d'ailleurs parfaitement dans le set, et révèlent une nouvelle maturité dans les compositions de la formation. Tout cela a l’air vraiment très prometteur : un groupe à suivre donc, et à revoir avec un meilleur son !
Setlist
L'enfer se souvient, l'enfer sait
Sept siècles et le feu
Solmeth Ascension
Mars stella patria
L'évangile du serpent
Droge Macht Frei
Notre Paradis
Klux Santhur
Perturbator
Ancien guitariste de I The Omniscient, James « Pertubator » Kent a complètement changé de style avec son projet solo. Avec trois albums et trois EPs, il a redonné ses lettres de noblesses à l’esthétique musicale et sonore des années 80 avec une approche très personnelle, en y mêlant notamment ses influences metal et des sonorités chiptune. Mais ce soir, c’est un DJ set, nous n’entendrons donc pas sa musique ! L’ambiance est en tout cas déjà fiévreuse dans le Gibus. Les premiers beats se font entendre, c’est parti pour une heure et demi de revival !
Pendant que James nous concocte son mix dansant et hypnotique, un écran placé derrière lui projette une boucle d’extraits de films de genre cultes. A la volée, on reconnaît Predator, The Thing, Alien, Evil Dead, Shining ou encore SOS Fantômes. Visiblement Perturbator n’a pas décidé de nous servir quelque chose d’agressif ce soir, on a donc droit à des chansons plutôt planantes et posées, avec notamment Powerglove ou encore Francophilippe.
Là encore, on peut regretter l’absence de fumigènes, qui auraient vraiment pu aider à instaurer une ambiance visuelle plus adéquate à ce genre de musique. Le son est bon, mais il manque peut être un peu de puissance pour permettre d’être complètement immergé dans la musique. D’un point de vue technique, rien à redire, James maîtrise son matos, et gère parfaitement les transitions.
Dans la fosse, ça danse, ça s’embrasse, ça sue… Comme dans tout bon DJ set, dira-t-on. On note tout de même qu’un certain nombre de spectateurs semblent perplexes de ne pas entendre la musique de Perturbator. Et en un sens, on peut les comprendre, même si jouer sa propre musique n’est pas forcément la chose la plus courante à faire lors d’un DJ set. Après une heure et demi de set, le public en redemandait encore, et James semblait prêt à renquiller. Mais l’organisation de concert a ses contraintes, il est temps de se quitter. Une autre fois, peut être ? En tout cas, mis à part les réserves émises plus haut, cette première sur scène à Paris fut plutôt réussie, et on peut attendre la prochaine pour un concert avec impatience.
Reportage par Tfaaon
Photos : Sylvain Chéreau / © 2014 Das Silverfoto
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