Nul chaos ne fut aussi beau
Venu redoré un blason quelque peu poussiéreux, .5 : The Gray Chapter était le point de départ de ce que moult metalleux attendaient : une nouvelle tournée de Slipknot. Plus de cinq ans après une double date en compagnie de Children of Bodom et Machine Head, c’est au même endroit que les Américains ont remis les pieds jeudi 29 janvier 2015 : le Zénith de Paris. Complète de chez complète, la salle parisienne ne se doutait probablement pas que, en ce soir d’hiver bien froid, elle allait devenir la porte de l’enfer. Et si ce concert était vraiment un avant-goût du trépas, alors une chose est certaine : vivement qu’on crève.
King 810
Accompagnant Slipknot depuis un petit moment (notamment lors du Knotfest 2014), les Américains de King 810 débarquent sur la scène à 20h et des poussières. Une scène relativement sobre : Un grand panneau noir estampillé d’un roi de pique (façon carte à jouer) et des banderoles blanches tagguées. Les musiciens débarquent sous les cris et les applaudissements, quatre coups de charley et c’est parti pour 40 minutes.
Mais 40 minutes de quoi ? Difficile en effet de déterminer le mouvement musical auquel appartient King 810. Le quatuor (guitare/basse/batterie/chant) livre une musique mêlant néo metal, djent et death core, le tout en mid-tempo, pour un ensemble vraiment violent. Les nuques ne tardent pas à bouger dès les premiers riffs de "Killem All ". Certains reprennent le refrain en même temps que l’impressionnant et, il faut l’avouer, charismatique chanteur, David Gunn. Les growls totalement torturés de ce dernier ont de peuvent captiver et/ou mettre mal à l’aise.
Ce sentiment mitigé peut également s’appliquer aux musiciens. Certes ils font preuve d’une réelle énergie et leurs sourires traduisent un plaisir certain. Mais n’en font-ils pas un peu trop ? Le batteur, Andrew Workmen est impressionnant, tant par ses gestes que sa carrure, mais n’est-ce pas un peu présomptueux de balancer ses baguettes dans la foule à peine une minute après le début du show ? Surtout quand cette foule ne semble pas beaucoup connaitre la formation. Mais, après tout, il ne faut pas oublier qu’être sur scène, c’est prendre son pied et offrir du plaisir au public. Les deux autres musiciens Andrew Beal (guitare) et Eugene Gill (basse) sont euphoriques. Ils sautent, se dandinent sur la scène et sourient bien volontiers. Aussi louable que soit leur attitude, il est dommage de la voir entachée par un son vraiment médiocre qui ne laisse finalement place qu’à la double grosse caisse.
Des qualités et des défauts sont à retenir une fois "Fat Arround The Heart" achevée. Avec un peu plus de sérieux et un son meilleur, King 810 aurait vraiment pu se démarquer et faire honneur à ses quelques fans manifestement pas si peu nombreux dans la salle ce soir. Une performance qui aura certainement permis au groupe d’élargir son cercle d’afficionados et, au pire, permis de patienter en attendant Slipknot.
Setlist
810
Killem All
Murder Murder Murder
Desperate Lovers
Boogeyman
Write About Us
Fat Around the Heart
Slipknot
Les 40 minutes qui séparent le show de King 810 et celui de Slipknot sont une bonne occasion de regarder autour de soi et d’analyser quel public le groupe peut encore rameuter en 2014. Il paraît que Slipknot est un groupe qui divise… bah voyons. Du jeune, du vieux, du goth, du metalleux, du keupon, du skater… Mecs et nanas se sont donnés rendez-vous et prouvent que, plus de quinze ans après sa formation, Slipknot réunit toujours autant.
La nostalgie est évidemment de mise car certains se souviennent encore du show d’une rare violence donné ici même en mai 2001. Un concert partagé avec Amen, Mudvayne et Static X à l’occasion de la sortie de Iowa (alors qu’il n’était pas encore sorti en France). D’autres se souviennent de deux dates excellentes en novembre 2008 à l’occasion de la tournée de All Hope Is Gone. Bref, le Zénith est un lieu que les Knots connaissent bien…. 21h10, les lumières s’éteignent et tous les yeux sont rivés vers ce rideaux blanc qui cache la scène.
Les premières notes de "XIX", passé sur bande, résonnent et tout le monde reprend en cœur les paroles de l’introduction .5 : The Gray Chapter ; l’impatience est plus que palpable. Le rideau se lève et l’on découvre une scène magnifique. Une tête de démon démesurée surplombe un grand miroir, la console de Graig Jones et les platines de Sid Wilson trônent de chaque côté de la batterie surélevée de Jay Weinberg (pour ne pas le nommer) et, juste en dessous se dessine la silhouette du bassiste Alessandro Venturella. Les deux géants Mick Thompson et Jim Roots sont au premier plan tenant chacun leurs guitares signatures. Enfin, les deux percussionnistes Chris Fehn et Shawn Crahan se tiennent debout sur leurs énormes set de fûts.
Les notes de "Sarcastrophe" se font entendre et la courte introduction passée, le chaos se met en marche. Le frontman Corey Taylor débarque enfin et marque son arrivée d’un énorme hurlement. La fosse explose dans tous les sens : ça pogotte, ça slame et ça se jette les uns sur les autres dans une ambiance chaleureuse où les sourires et les regards remplis de joie se font remarquer. Putain que c’est bon de revoir Slipknot sur scène.
Sarcastrophe terminé, le décompte en scratch de "The Heretic Anthem" déboule direct. C’est l’anarchie tout le monde entonne « IF YOU’RE 555, THEN I’AM 666 ». Des flammes jaillissent de scène. Sid Wilson, fidèle à lui-même, court partout sur la scène avec une attitude complétement déjantée.
« Vous en voulez plus ? » demande Corey Taylor. La phrase la plus classique, mais comment répondre « non » face un tel plaisir. S’en suit alors une petite surprise : "My Plague", pas entendue en live depuis longtemps. Après celle-ci, il est temps pour le chanteur de s’adresser au public pour de bon. Un public qui « a manqué » à Slipknot et cinq ans plus tard ils sont « très heureux de revenir dans la meilleure salle de France ». Classique, classique, classique ! Mais tellement bon. A noter les gros efforts de Corey pour s’exprimer en français. Si cela reste drôle, il faut admettre qu’au fur et à mesure des années son niveau s’améliore, tout en restant modeste (faut pas trop en demander non plus).
Les titres s’enchainent avec quelques surprises dont "Psychosocial" (unique représentant de All Hope Is Gone ce soir) ainsi que la très thrash metal "Eeyore". Tout le monde est évidemment invité à sauter frénétiquement sur "Liberate" et à chanter le refrain terriblement prenant de "Purity".
Dix morceaux plus tard, que se dire si ce n’est que Slipknot fait parfaitement le boulot ? Les musiciens sont en places et son soutenus par un son proche de la perfection. Beaucoup de regard sont tournés vers la batterie de Jay Weinberg (toujours pour ne pas le nommer) et le bonhomme fait preuve d’une énergie, d’une vélocité et d’une motivation sans failles. Faisant généralement preuve d’une attitude un peu provocante, le clown (dont le masque n’a rien à voir avec un clown ce soir) reste plutôt sage et cogne ses fûts de bières et ses tomes. Enfin à nôter que Corey Taylor est dans un grand, très, grand soir.
Les tubes continuent à s’enchainer : "Duality", "Left Behind", "Custer" et bien sûr "Spit It Out" où Corey fera s’agenouiller toute l’assemblée. La discographie est bien survolée, notamment la dernière production. Cela va de soi, mais, après tout, seul deux titres de All Hope Is Gone étaient joués lors de la dernière tournée.
L’heure est au rappel. Sur bande commence "742617000027" et vient annoncer la folie qu’est "(sic)". Et quitte à finir dans la violence, "People=Shit" et "Surfacing" parachèvent cette soirée.
Ce soir, ce n’est pas un groupe qui s’est présenté au public parisien mais bel et bien neuf musiciens motivés, affamés de scène et qui ont montré une sincère envie de faire plaisir à leurs fans. On pourra reprocher l’absence de certains titres ("The Blister Exists", "Wait and Bleed" ou encore "Eyeless"). Certains auront peut-être un peu les boules d’avoir attendu cinq ans pour « seulement » 1h40 de show. Mais dans les faits, Slipknot a parfaitement fait le boulot.
Merci du fond du cœur messieurs.
Setlist:
XIX (sur bande)
Sarcastrophe
The Heretic Anthem
My Plague
The Devil in I
Psychosocial
The Negative One
Eeyore
Liberate
Frail Limb Nursery (sur bande)
Purity
Before I Forget
Duality
Left Behind
Spit It Out
Custer
Rappel
742617000027 (sur bande)
(sic)
People = Shit
Surfacing
Crédits Photos:
© 2015 Nidhal Marzouk / Yog Photography
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