Devant la salle du Forum, la file d’attente est bien organisée, comme dans le vieux jeu vidéo « Snake » où un serpent doit manger des pommes en s’agrandissant, et doit trouver un moyen de continuer sa progression sans se manger ; c’est ce que font les porteurs de cheveux grisonnants, ou parsemés pour certains, autour de la salle dans une ambiance très sympathique ; les vieux briscards viennent à Vauréal pour se lâcher sur le groupe anglais qui les a faits vibrer depuis tant d’années.
Malemort est content d’ouvrir pour UFO, et le chanteur nous explique que lorsqu’il était plus jeune, il avait une cassette avec « Doctor Doctor ». C’est marrant car la musique n’a rien avoir avec celle des Anglais. C’est un metal fusion typé année 90 avec un côté rock français comme un Merzhin ou un Blankass. Le public est poli et participe, bien que la musique soit pour le moins à l’opposé de ce pour quoi on s’est déplacés.
UFO, c’est le poing de fer dans un gant de velours, 45 ans de carrière mené par un Phil Mogg pouvant être rebelle dans la rue et gentleman sur scène.
Dans les années 80, on parlait d’aristocrates du hard pour les décrire, ce qui est vraiment juste car c'est un groupe qui a la classe et qui sait distiller mélodies émouvantes et riffs percutants, entre anciens et nouveaux titres, tout en pouvant se renouveler et rester cohérents.
Il y a de l’esthétisme chez les Anglais, dans la musique bien sûr mais aussi dans les looks : regardez plutôt Phil et son gilet de costume, assez classe, avant qu’il ne l’enlève pour laisser apparaitre ses fameuses bretelles, tout en contraste encore. Tout comme son sourire où de nombreuses dents sont aux abonnés absents, qui ne l'empêche aucunement de chanter merveilleusement bien, sans le moindre cheveu sur la langue. A l'image de tout bon Anglais, on peut se torcher dans un pub et tenir la conversation en tenant des propos sensés, avant d’aller retourner bosser dans sa salle de trading.
Sur scène, UFO distille les titres de sa longue discographie, en sortant parfois des pépites d’albums oubliés, comme une bonne surprise avec « Venus » issu de l’excellent Walk on Water (1995) qui avait vu le retour du Schenker au sein de la formation, ou encore « Making Moves » de The Wild, the Willing and the Innocent sorti en 1981 sous l'ère Paul Chapman. Quand à Vinnie Moore, il est somptueux, sur « Rock Bottom » il se lâche dans un solo à tiroirs reprenant le riff principal pour terminer dans un déluge sonore, sous le sourire de ses camarades de scène. Rob DeLuca reste discret mais fait bien le job et Paul Raymond, élégant, au brushing irréprochable, alterne entre ses claviers et sa guitare rythmique.
L’entame est, elle aussi, intéressante avec « We Belong To The Night » issu de Mechanix, suivi de « Fight Night » de Seven Deadly et « Run Boy Run » du dernier album. Entre les titres, Phil murmure des mots inaudibles faisant rire un Andy Parker caché derrière ses fûts, alors que le bonhomme possède une voix puissante lorsqu’il chante.
La force d’UFO, c’est leur régularité dans les sorties d’albums, sans jamais dénaturer la substantifique moelle qui fait qu’on les reconnait en quelques secondes - si ce n’est Misdemeanor, d’une facture très en deçà, sorti en 1985.
Il doit vraiment être difficile pour UFO d’élaborer une setlist, avec l’obligation d’y inclure les incontournables « Lights Out », « Only You Can Rock Me », « Love to Love », « Doctor Doctor » et « Shoot Shoot »… et pourtant ils le font, d’une manière élégante et irréprochable qui plus est.
Lionel / Born 666
Setlist:
We Belong to the Night
Fight Night
Run Boy Run
Lights Out
Venus
Only You Can Rock Me
Burn Your House Down
Cherry
Love to Love
Messiah of Love
Making Moves
Rock Bottom
Rappel:
Doctor Doctor
Shoot Shoot
Photos : © 2015 Lionel / Born 666
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