Dimanche – 22h35 – Temple
C'est une sorte d'avant-première à laquelle on a le droit ce soir au Hellfest. Enslaved fait un petit tour à Clisson en juin avant de se produire dans plusieurs villes françaises en novembre. Ce concert est à la fois surprenant, voire prenant tout court. Les choix du groupe sont différents de ce à quoi on aurait pu s'attendre et correspondent mieux au style de musique pratiqué sur cette scène.
L'intro d'Enslaved démarre à l'heure et on se retrouve plongé dans une ambiance d'un rouge vif. Cato Bekkevold s'installe derrière sa batterie et on est parti pour cinq minutes de violence avec « Jotunblod », tiré de Frost, sorti en 1994. C'est la première surprise à laquelle on a le droit durant ce concert. On s'attendait à ce que le groupe vienne défendre In Times étant sorti en 2015, mais non. Grutle Kjellson confirmera même cela juste avant de jouer « Fusion of Sense and Earth » en disant qu'il allait décevoir les gens étant venus pour voir des nouveaux morceaux du groupe, parce qu'ils allaient jouer uniquement du vieux. Ca n'a pas l'air de déranger le public, bien au contraire.
On a donc compris que cette soirée serait plongée dans le vieux black metal ambiant qu'Enslaved faisait déjà il y a plus de vingt ans. Il est difficile de cataloguer la musique des Norvégiens tant elle varie d'un morceau à l'autre. On peut en revanche dire que « Fusion of Sense and Earth » est une merveille de composition avec un démarrage brusque mais des rythmiques lentes par la suite. On retourne ensuite faire un tour du côté de Frost avec « Fenris », qui est un hymne à l'ensemble de la nature et des animaux de la forêt.
Comme quoi déjà en 1994, Enslaved proposait un type de black metal des plus exaltant, avec des rythmiques rapides et saccadées, accompagnées par des mélodies se rapprochant un peu du folk, tout en gardant en tête de placer quelques passages un peu plus calmes pour rendre le tout plus progressif.
Grutle dédie la prochaine chanson au plus grand chanteur de metal Danois, qui se produira lui aussi quelques minutes plus tard au Hellfest, à savoir King Diamond. On est donc parti sur « The Crossing », tirée de Below The Light (2003), qui nous en mettra plein la vue. Même si pour le Hellfest on oublie la partie intro en guitare acoustique pour s'attaquer directement au vif du sujet. La partie instrumentale continue un bon moment avant de déboucher sur un superbe passage calme qui, croyez le ou non, fait un peu penser à ce que fait Porcupine Tree dans son incroyable style progressif, même si pour le coup on se trouve plutôt dans un registre ambiant plus que prog. On repart ensuite sur les riffs rythmiques mélodiques menés par un chant clair moyennement maîtrisé.
Comme depuis le début, chaque morceau est introduit par une petite pause et un discours du frontman. « Return to Yggdrasil » est donc introduite par La Marseillaise chantée en choeurs par le public. Outre ce petit moment fun, le morceau qui suit est parfaitement exécuté. Ce qui se passe sur scène depuis près d'une demi-heure est hallucinant, Enslaved balance ses morceaux quasiment aussi bien que si on les écoutait sur CD, le tout avec un son beaucoup plus puissant. Toutes les parties calmes sont maîtrisées impeccablement, Enslaved est maître de son sujet. Le chant clair, même si il manque un peu de profondeur et de justesse par moments est bien suivi par le chant guttural.
La dernière chanson jouée, « AllfÇ«ðr Oðinn », tirée de Hordanes Land, un EP sorti en 1993 et qui bénéficie d'un son affreux comme on en retrouvait souvent à l'époque dans ce style, prend une tournure toute autre ce soir. Le gros son d'Enslaved sous la Temple donne toute sa puissance au morceau et permet de finir le concert en beauté sur ces incroyables mélodies et ces solos fulgurants. On retiendra ce soir cet énorme concert des presque blackeux norvégiens qui nous ont démontrés que old stuff ou non, leur musique sera toujours un incroyable spectacle sur scène.
Setlist :
Jotunblod
Fusion of Sense and Earth
Fenris
The Crossing
Return to Yggdrasil
Convoys to Nothingness
AllfÇ«ðr Oðinn
Photographies : © Thomas Orlanth 2016.
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