On se rappelle encore du temps glacial de l’édition précédente qui avait poussé un grand nombre d’entre nous à nous réfugier dans le hall d’accueil de la Ferme du Buisson pour échapper aux morsures du froid. Mais cette année, c’est sous un soleil radieux et des températures quasi printanières que le Cernunnos Pagan Fest ouvrait ses portes.
Pour cette onzième édition, quelques petits changements sont à noter, comme l’ouverture du passage entre la zone festivaliers et le Caravansérail où se trouvait un grand nombre d’artisans ainsi que quelques stands de boissons et de restauration. Plus besoin de sortir de la zone festivaliers et de faire le tour du bâtiment central pour y avoir accès ce qui a permis une circulation plus fluide dans l’enceinte du festival et des zones de contrôle des bracelets moins surchargées.
Il y avait également beaucoup d’animations en-dehors de la zone festivaliers, totalement gratuites pour le public de curieux plus attiré par l’aspect fête médiévale que par la musique. Les grands comme les petits ont pu y trouver leur compte et passer un excellent moment en participant au concours de costumes, au théâtre interactif, aux différentes initiations aux danses médiévales, à la calligraphie et aux combats avec armes de GN (jeux de rôle grandeur nature) en latex. Même si les salles de concert del’Abreuvoir et la Halle n’étaient accessibles que pour les gens ayant acheté leurs billets, le public venu pour se balader aura également pu apprécier quelques concerts acoustiques sur la scène du Caravansérail.
Ceux qui étaient encore un peu sceptiques sur le changement de lieu du festival n’auront pu qu’être conquis par cette troisième édition à la Ferme du Buisson. En effet, les lieux se prêtent parfaitement à ce genre de festival et comme nous le faisait remarquer Erik Grawsiö, frontman de Månegarm. Ce changement de lieu est un réel plus pour le Cernunnos Pagan Fest, car la verdure et l’esprit décontracté qu’apporte la Ferme du Buisson au festival s’accordent parfaitement avec l’esprit pagan que les musiciens veulent faire partager avec leur musique.
Beaucoup de groupes à l’affiche pour cette édition avaient déjà joué lors d’éditions précédentes, comme Månegarm, Baldrs Draumar, Furor Gallico, Acus Vacuum, ou encore Himinbjorg et tous sans exception ont partagé avec nous leur joie de revenir jouer à ce festival. Idem, pour les groupes venant jouer ici pour la première fois. Pour illustrer ce propos, je citerai Routa, guitariste de Finntroll lors d’une conversation autour d’une bière : “J’adore ce festival, c’est la première fois que nous venons et l’ambiance est géniale. On peut se balader, passer du bon temps, discuter tranquillement avec les gens. Bon j’ai toujours un peu peur de me faire piquer le cul avec une épée en latex… mais franchement, j’adore!”
Le Cernunnos Pagan Fest est un peu le festival hivernal que tout le monde attend pour partager un bon moment entre amis et voir des groupes venus du monde entier jouer avec le sourire sur les planches de l’Abreuvoir et de la Halle. Bref, La Grosse Radio est tombée amoureuse de ce festival il y a quelques années déjà et son amour pour lui ne cesse de grandir. Cela fait maintenant plusieurs années que Thomas, Lionel , Aude et moi-même t’attendons avec impatience et sommes toujours ravis de ces moments passés avec toi. Cernunnos Pagan Festival nous t’aimons et te remercions pour toutes les merveilleuses aventures que tu nous procures, de la plus joyeuse à la plus incongrue! Et pour te déclarer notre amour nous souhaitons partager avec toi “La Fabuleuse Histoire du Slip de Thomas”, car OUI, sans toi cette épopée extraordinaire aurait été impossible! Vous vous demandez ce que vient faire un slip de photographe dans ce live report … Eh bien vous le découvrirez au fil de votre lecture !
Eloïse Morisse
Gofannon
L’Abreuvoir - 14h
Ce sont sur des notes douces et dansantes que débute le Cernunnos Pagan Fest. Les Toulousains de Gofannon nous offrent un set très folk avec des chansons tantôt en occitan, tantôt en anglais. Le son du violoncelle et des différents bois, ainsi que la voix grave de Samuel Meric envoûtent très vite le public qui se balance lascivement au rythme des chansons.
Cette première journée de festival vient de débuter et pourtant la salle de l’Abreuvoir est déjà pleine à craquer. Il faut dire que le set de ce tout jeune groupe est très apprécié. La foule est conquise dès les premières notes. L’annonce du dernier morceau sera accueilli par un “OH NON” du public qui n’aura pas vu le temps passé. Il est dur de se dire qu’il va bientôt falloir arrêter de se laisser bercer par la musique suave de Gofannon.
Les musiciens ne manqueront pas de remercier les techniciens et les bénévoles sans qui le festival ne pourrait exister. Les jeunes Toulousains quittent la scène sous un tonnerre d’applaudissements.
Il est temps pour nous de quitter l’agréable cocon que Gofannon nous a tissé au fil de sa musique pour nous faire bousculer par l’énergie débordante des Compagnons du Gras Jambon.
Set List:
Intro : Lueur
Lo vilatge
Seidhr
Sempervirens
La hilha
Lo Boièr
Kvinnan från månen
Le Chêne Vert
Eloïse Morisse
Les Compagnons du Gras Jambon
La Halle - 14h45
Les Français sont les premiers à investir la Halle, la plus grande des deux scènes, et celle-ci est étonnamment remplie pour un début d’après-midi. Le groupe est visiblement attendu et il ne décevra pas ses adeptes. Le folk médiéval enlevé et énergique du quintette fait voyager dans toute l’Europe et jusqu’aux confins de l’Asie, puisque Les Compagnons du Gras Jambon jouent des morceaux venus aussi bien du Danemark que de Mongolie ou de chez les Causaques. Il faut dire que les percussions (Perkim et Böb), le bouzouki électrique (Tyx), la cornemuse et la nyckelharpa (Vik), instrument à cordes frottées évoquant un violon, permettent de créer des sonorités très diverses, aidés par les deux voix complémentaires de Perkim et Vik.
La formation ne jouera que deux morceaux en français, un de leurs plus grands succès, "Bonsoir Maître de Maison", et un autre au faux nom latin, "Lorem Ipsum", parce que, comme l’explique Vik, "on voulait écrire un titre en latin, mais personne ne le comprend et en plus c’est super dur à chanter… et puis personne ne le comprend".
Car oui, le groupe multiplie les blagues pour présenter les morceaux. Et il n’hésite pas à faire participer le public à ses pitreries. Ainsi, sur un morceau danois, l’auditoire a pour but de "battre le record du plus gros flashmob pagan" en reproduisant une chorégraphie présentée comme délibérément stupide. La foule, acquise au quintette depuis le début du concert, interrompt volontiers ses pogos par ailleurs incessants pour se prêter au jeu dans sa quasi-totalité, ce qui donne un résultat saisissant.
Autre morceau, autre type d’happening : pour une chanson d’amour, la chanteuse et percussionniste Perkim explique "qu’en amour, au début on se tourne autour, et ça peut prendre du temps. Alors je vous propose de faire le circle pit le plus lent de l’histoire, puis d’accélérer pour à la fin tous vous rentrer dedans". Brillante allégorie, une fois de plus parfaitement exécutée par le public. Et à voir ce "circle pit ralenti", on se rend compte que les rites du metal ont une parenté certaine avec les danses médiévales et renaissances.
Le groupe quitte la scène après moins d’une heure de jeu, mais le public était visiblement prêt à le suivre pour encore plusieurs rondes endiablées. Or, c’est une toute autre ambiance que prépare la formation suivante.
Set List :
In Taberna
Bonden
Oysya
Bonsoir Maître de Maison
Olavur Riddarraros
Rotten Raven Grisen
Mandakh Nar
Djore Dos
Senhuigulum
Lorem Ipsum
Korobushka
Aude D
Vanaheim
L’Abreuvoir - 15h40
Cette fois, ça y est, après deux groupes de folk pur, le metal fait son entrée dans la cuvée 2019 du Cernunnos. Vanaheim propose un black metal somme toute classique agrémenté de quelques éléments pagan. Malheureusement, ceux-ci sont tous préenregistrés, seule la partie purement black est jouée par le quatuor.
Le groupe néerlandais fait correctement son travail, mais le son peut s’avérer répétitif même si certains soli de guitare retiennent l’attention. Le chanteur Zino van Leerdam officie presque exclusivement dans un chant hurlé parfois fatigant, mais en plusieurs occasions il s’adonne à un chant guttural plus solennel et très prenant. Des chœurs saisissants ponctuent régulièrement les morceaux, mais le fait qu’ils soient enregistrés en diminue la portée.
Sur scène, les quatre musiciens ont revêtu un maquillage étrange pour plonger les spectateurs dans l’ambiance mythologique nordique dont leur groupe tire son nom. Le chanteur arbore en début de concert des sabots, chaussures trop peu représentées sur scène, mais il les enlèvera hélas assez rapidement.
Vanaheim ne ménage pas ses efforts pour communiquer avec le public, autant en anglais qu’en français, et les musiciens arborent un air jovial qui tranche avec leur musique. La salle n’est pas complète et le public présent semble s’intéresser à la prestation proposée sans être vraiment passionné non plus. Un pogo timide éclate en milieu de set mais ne dépassera jamais la vingtaine de personnes. Quand un slammeur traverse la salle, le chanteur ravi l’attire à lui pour le faire chanter.
Le dernier morceau, "The Dwarven Chant", peut-être le plus mémorable, commence avec de gros chœurs lyriques imposants avant que le cri perçant du chanteur ne déchire l’air pour laisser la place à un black metal festif célébrés par un pogo et quelques slams. Si la prestation était loin d’être honteuse, elle ne sera pas forcément la plus mémorable de la journée.
Set List:
Intro
Daughter of the Dawn
Domovoi
Bound Between Times
The Dwarven Chant
Aude D
Cemican
La Halle - 16h30
Si le Cernunnos accueille essentiellement des groupes européens, la tendance à mélanger metal et musiques traditionnelles n’est évidemment par une particularité du Vieux Continent. Et le festival le prouve en invitant un groupe mexicain tout à fait étonnant, Cemican.
Cinq musiciens débarquent sur scène dans une ambiance angoissante. Tous arborent des maquillages et des costumes inspirés par la culture aztèque. Les peintures blanches et noires sur tout le corps de certains musiciens évoquent des squelettes qui ne jureraient pas lors d’un Jour des Morts mexicain.
Le groupe entame alors un black metal bien bourrin, à faire headbanguer n’importe quel metalhead. Mais la formation va bien au-delà, puisque, comme le laisse supposer la parure des musiciens, il s’inspire grandement des musiques sud-américaines précolombiennes. Tous les membres du groupe utilisent à différents moments des instruments préhispaniques, et deux y sont plus particulièrement dédiés, MAZATECPATL et YEI TOCHTLI. Ils utilisent notamment tout un ensemble de flûtes aux sonorités particulières qui évoquent indubitablement l’Amérique du Sud, ainsi que bon nombre de percussions. Plusieurs musiciens ont également recours régulièrement à de grands cousins américains des didgeridoos, grands instruments à vent en bois de plus de deux mètres de long qui produisent un son à la fois sylvestre et guerrier.
C’est déjà inattendu pour un public occidental rarement habitué à ces représentations, ou alors de façon très cliché, mais Cemican n’en est qu’aux débuts de son show, et très vite débarque XAMAN-EK, sixième membre du combo, encore plus impressionnant que ses camarades. Le corps et le visage entièrement recouverts de noir, il est coiffé d’une majestueuse parure à plumes rehaussée d’un crâne d’animal à cornes. Il arrive du fond de la scène sans prévenir, en transe, et vient haranguer les premiers rangs. L’homme exécute plusieurs danses qui ressemblent à des rituels ; avec les lumières qui donnent parfois à la scène un aspect fantomatique, il semble tout droit sorti d’un autre monde. Sa performance est d’autant plus marquante qu’il ne reste pas en permanence sur scène, mais apparaît et disparaît sans que l’on s’y attende.
En plus des danses, il joue aussi d’instruments anciens, notamment un instrument à vent ressemblant à un coquillage, et assure aussi des passages vocaux en nahuatl, langue parlée au Mexique par les descendants des Aztèques – le chanteur et guitariste TECUHTLI s’exprime lui la plupart du temps en espagnol. Le danseur finit même par mimer un rituel sacrificiel avant de blancer du – on l’espère – faux sang sur les premiers rangs. Le ritual de muertos est à son apogée…
Le son du groupe alterne et mêle des passages puissants et particulièrement bourrins et des passages beaucoup plus hypnotiques. La transe ne semble jamais loin dans leur musique, le chanteur utilise essentiellement le growl mais effectue quelques incursions en chant clair. Il s’adresse un tout petit peu au public en anglais et en français, mais s’exprime la plupart du temps en espagnol. La Halle, pas complètement pleine, est tout de même bien remplie, et les réactions sont diverses : certains regardent le groupe avec intérêt mais estimeront au final que celui-ci est seulement une curiosité qui vaut surtout pour les sonorités sud-américaines, mais d’autres sont véritablement absorbés par la prestation des Mexicains. La prestation de Cemican sera au final l’une des plus singulières et des plus marquantes du Cernunnos.
Setlist
Intro : ta
Guerreros de Cemican
Anahua
Tzontecotl
La que baja de las estrellas
Xipe Totec
Ritual
Azteca Soy
Yaotecatl
Mixteco
Aude D
Pendant qu’Aude et Thomas assistaient aux concerts de Vanaheim et de Cemican, Lionel et moi étions en interview avec les membres de Månegarm et de Finntroll. Vreth et Routa arrivent de façon tonitruantes une bonne heure en avance pour leur interview, bousculant les plannings et Jacob Hallegren toujours en train de partager ses sources historiques et littéraires avec moi, avec leur bonne humeur. Lors de cette interview, Vreth et Routa nous dirons que pour eux Finntroll représente un peu l’incarnation du chaos et que souvent, ils s’ennuient pendant les tournées et qu’ils sont toujours partants pour faire les trucs les plus débiles possibles. Sans le savoir, les deux compères venaient de faire naître “La Fabuleuse Histoire du Slip de Thomas” !
Eloïse Morisse
Nytt Land
L’Abreuvoir - 17h20
C’est au tour de Nytt Land de prendre place sur les planches de l’Abreuvoir. On peut dire que le couple venu de Sibérie a le soucis du détail. Ses maquillages et ses costumes nous plongent directement dans leur univers sans même avoir entendu une note. Natasha Pahalenko est coiffée d’une peau de renard sibérien et habillée de lambeau de tissus. Elle porte également des lentilles noires qui la font ressembler à une chaman en transe. Anatoly Pahalenko, quant à lui, porte un bandeau sur les yeux. Son maquillage lui coule sur le visage lui donnant l’air d’être une sorte de devin possédé. Pratiquement tous les objets technologiques (ordinateurs, amplis, etc.) sont cachés par des tissus sur lesquels sont peintes des runes. Seuls quelques instruments modernes et les instruments qu’ils ont créés eux-mêmes sont visibles sur la scène.
Les deux interprètes dégagent un très grand charisme et n’ont pas besoin de faire de grands mouvements pour que les yeux de la foule soient rivés sur eux. Le silence se fait tout doucement dans la salle. On se demande bien ce que ces deux personnages nous réservent. C’est alors que le silence est brisé par les chants gutturaux des deux interprètes. Natasha Pakhalenko fait preuve d’une grande maîtrise des techniques de chants sibériens et saami. Leur prestation est époustouflante. Natasha comme Anatoly se tiennent loin de leurs micros qui semblent presque inutiles tellement leurs chants sont puissants.
Leur set est comme un rituel tribal auquel nous sommes invités à participer. Leur musique nous fait voyager hors de nous, loin de la Ferme du Boisson, à travers la toundra sibérienne. L’ensemble du public restera pendu à leurs lèvres tout au long du concert.
Ce n’est qu’à la fin de leur prestation que Natasha s'adresse au public pour le remercier d’avoir partager ce moment avec eux. Leur performance est acclamée et nous laissera la chair de poule.
Set List :
Darraðarljóð / The Song of the Valkyries
Ragnarök
Deyr Fé / The Heritage
Eloïse Morisse
Aorlhac
La Halle - 18h10
Après ces voyages en Sibérie et au Mexique, retour en France avec Aorlhac, qui tire son nom d’Aurillac, ville dont est originaire le groupe. Le quintette pratique un black metal classique qui puise son inspiration dans des thèmes historiques, comme beaucoup de groupes du festival, et en particulier médiévaux occitans.
Le son est bon, c’est globalement bien exécuté et joué de façon extrêmement rapide, soutenu notamment par la rythmique du batteur K.H., même si le chant guttural de Spellbound ne remporte pas tous les suffrages dans l’assistance. Il est en effet parfois un peu pénible, mais il arrive à alterner différents types de chants gutturaux. Vers la fin du concert, le bassiste Alex se fait remarquer par plusieurs passages originaux qui se conjuguent au jeu des guitaristes NKS et Wynter qui donnent un air un peu médiéval à l’ensemble.
Si certains passages musicaux sont assez monotones, le groupe arrive malgré tout à proposer des variations, grâce notamment à des chœurs épiques du plus bel effet.
Le public semble apprécier la prestation, même s’il n’y a pas forcément de grand déferlement euphorique, mais le groupe aura su contenter les fans de black en recherche de très légers éléments pagan.
Setlist
Intro : L'Esprit des vents
Aldérica
Plérion
Sant Flor, la cité des vents
La Révolte des Tuchins
Le Charroi De Nîmes
L'ora es venguda
Les enfants des limbes
Mandrin, l'enfant perdu
Le Bûcher des Cathares
Aude D
Baldrs Draumar
L’Abreuvoir - 19h05
Nous avions déjà vu Baldrs Draumar lors de la première édition du Cernunnos Pagan Fest à la Ferme du Buisson en 2017. Cette année-là, les Frisons avaient pris la scène pour leur champs de bataille pour nous présenter leur formation black metal. Pour cette onzième édition, Baldrs Draumar revient avec un show acoustique bien différent.
Les membres du groupe arrivent sur scène arborant un grand sourire. Ils sont heureux de “venir piller le France une seconde fois”, et le public le leur rend bien. On se laisse très vite entraîner par leur musique acoustique et la foule se met à taper dans les mains en rythme dès les premières notes ! Un couple d’amoureux danse au milieu du pit, d’autres s’agitent et se dandinent gaiement en suivant les mélodies. Une osmose parfaite entre musiciens et public s’est créée. Pas étonnant que notre cher Thomas se fasse fusiller du regard quand il arrive en trombe dans la salle pour nous raconter qu’il part en Finlande lundi et qu’il vient de se rendre compte qu’il a oublié de mettre ses slips dans sa valise. Cela n’intéresse personne à ce moment précis, mais le protagoniste de “La Fabuleuse Histoire du Slip de Thomas” vient juste de faire son apparition et cette annonce qui arrive comme un cheveu sur la soupe et qui en dérange certains dans la salle marque le début de quelques péripéties et d’un dénouement heureux.
Très vite, cette interruption chaotique de Thomas est oubliée. Il faut dire que les Hollandais ont un excellent contact avec le public, venu très nombreux pour les voir. Wildgeraesch prend la parole entre chaque morceau pour expliquer la signification de chacune de leurs chansons qu’ils chantent en frison. Certaines parlent de sujets sérieux comme des batailles contre les chrétiens, du glorieux empire frison, de la bravoure d’une combattante. D’autres ont des sujets plus légers et festifs comme la bière et la folle nuit d’amour qu’un des membres du groupe aurait passé avec une brebis lors de leur dernière tournée. La foule se prend au jeu et bêle en choeur après cette chanson.
La séparation est difficile… Le set est bien trop court. Le public en redemande. Pourtant, il est temps pour Baldrs Draumar de chanter leur dernière chanson, “Hva Faen?!” en norvégien. Ce concert se terminera sur un note d’humour et de bonne humeur avec ce morceau retraçant l’histoire de marins norvégiens, dont le bateau aurait fait naufrage sur les côtes frisonnes, après une nuit de beuverie. Et c’est avec le sourire que le public se dirige ensuite vers la Halle pour assister au concert de Š»ywioŠ‚ak .
Set List:
Tsjoch op
Ravens
Thuners fjoer
Skyldfrou
Magna frisia
Hymirs tsjettel
As de loften brekke
Jort
Fan Keardel en Skiep
Fan fryslans ferline
Eastre
Hva Faen
Eloïse Morisse
Š»ywioŠ‚ak
La Halle - 19h55
Après un moment de (relatifs) calme et douceur, retour sur des terrains plus dansants et agités avec Š»ywioŠ‚ak. Le quintette polonais explique qu’il joue beaucoup de morceaux traditionnels en rapport avec des cultures anciennes de sa région et d’antiques religions païennes de cette zone – le site du Cernunnos explique même que les paroles du groupe traitent, entre autres, de démonologie folklorique polonaise. Comme de nombreux groupes ici, il mélange instruments de rock – guitare, batterie – et instruments traditionnels : deux violons, une vielle à roue, une cithare. Le groupe affirme sur sa page Facebook jouer du "biometal". Si le terme peut laisser perplexe, la formation présente une musique fortement inspirée d’éléments traditionnels polonais très reconnaissables à l’énergique rock et metal indéniable, qui modernise les compositions et les rend beaucoup plus dynamiques et accrocheuses.
Le premier morceau est extrêmement dansant et guilleret, mais dès le deuxième, les Polonais plongent la salle dans une ambiance plus sombre, avec des violons angoissants, presque discordants, et trois vocalistes charismatiques. Le chanteur Robert Jaworski alterne la vielle, le violon et les flûtes, tandis que sa voix se fait tour à tour imprécations, cris perçants, chants lancinants mystiques. Ses deux comparses féminines, Wiktoria Kwiatkowska et Zuza Ciszewska (cette dernière joue également du violon), prennent le chant à partir du troisième morceau, et montrent l’étendue de leur talent vocal. Leur façon de chanter et leur timbre grave rappellent sans équivoque les chants traditionnels d’Europe de l’est et ce qu’ils peuvent avoir de mystérieux et d’un peu effrayants à la fois : on dirait parfois qu’elles jettent un sort au public.
Š»ywioŠ‚ak enchaîne ainsi quelques morceaux prenants, presque en transe, impression renforcée par les lumières qui confèrent une atmosphère ésotérique à la scène. Les violons ont une place prépondérante dans cette ambiance, même s’il arrive aussi que le groupe commence certains morceaux a capella avec une batterie avant que les instruments ne se déchaînent.
Après un passage par une ballade moins angoissante mais tout aussi prenante, le groupe repart sur des morceaux plus enlevés, et présente un titre parlant "d’une femme démon qui rencontre un homme, ils dansent ensemble et puis ils baisent" explique en anglais l'un des vocalistes. Le regret de ne pas parler polonais a rarement été si fort dans notre vie… Plus tard, la chanteuse Wiktoria Kwiatkowska imitera le rire d’une sorcière avec un naturel si saisissant que le public sera en droit de se demander si le groupe n’est pas un peu démoniaque sur les bords.
Le public a d’abord l’air d’apprécier sans plus le spectacle – ou alors est-il plongé dans un état de transe intense ? Une tentative de pogo avorte rapidement, mais une chenille voit le jour en milieu de set et va drainer plusieurs dizaines de personnes dans toute la Halle et grandement réchauffer l’ambiance.
Peu de temps après, "Ššwidryga i Midryga", morceau ultra dansant, voit une nouvelle tentative de pogo réussir elle à s’imposer, et l’ambiance dans la salle devient fantastique, le public s’en donnant alors à cœur joie. Le groupe finit après neuf morceaux, alors que Horn vient de commencer, et le public semble ravi de cette découverte diabolique.
Setlist
Epopeja wandalska
Marzanna
Sol Invictus
Morski król
RowokóŠ‚
Ššwidryga i Midryga
Bóstwa
Czarodzielnica
Femina
Aude D
Horn
L’Abreuvoir - 20h50
Nous voilà de retour à l’Abreuvoir. Juste avant, Baldrs Draumar nous donnait un concert acoustique, loin du black metal qui était la musique de prédilection du groupe auparavant.
Cette fois-ci, nous assistons au phénomène inverse. Les Allemands de Horn étaient plutôt connus pour leur folk black metal tourné vers la nature. On se rappellera notamment de leur album Naturkraft qui sonnait comme une déclaration d’amour à notre planète mêlant beauté des mélodies et désespoir des riffs saturés. Cependant, les années passant et l’Homme ne faisant pas grand chose pour sauver la planète qui l’héberge et le nourrit, le groupe a pris un tournant plus radical musicalement parlant. Leurs morceaux, bien qu’ayant toujours quelques sonorités folk sont devenus bien plus noirs et oppressants.
C’est donc dans une ambiance sombre que Horn accueille le public du Cernunnos Pagan Fest. La scène est dans la pénombre. On peut entendre des samples plutôt doux mais qui laissent présager la déferlante de son qui nous attend.
Horn commence avec un premier morceau qui vient nous écraser tel un rouleau compresseur. Les stroboscopes nous en mettent plein la vue. Les lumières et la musique ne nous laissent aucun répit. Les membres de Horn nous mettent une belle claque mais toujours avec le sourire. Les quatre Allemands ont l’air d’être heureux d’être au Cernunnos Pagan Fest pour leur premier show français. Plaisir partagé par le public qui semble totalement adhérer à leur musique du début à la fin du concert.
Eloïse Morisse
Månegarm
La Halle - 21h45
Clou de cette première soirée, les Vikings suédois de Mânegarm sont très attendus par le public et l’excitation est palpable. La foule manifeste son exaltation quand le trio – quintette en live – entre en scène et lance "Tagen av daga", morceau du dernier album en date.
Dès ce premier morceau, la foule est en délire, les spectateurs s’agitent dans tous les sens et manifestent bruyamment leur enthousiasme. Le groupe, lui, est visiblement en forme, et va assurer un très bon spectacle. Il fait le tour de quasiment tous ses albums, même s’il privilégie le dernier en date, Mânegarm, sorti en 2015, avec quatre chansons. Les musiciens sont carrés et assurent leur partition sans coup férir, multipliant les changements de rythme au sein des morceaux. Le violon, élément notable du son des Suédois, est bien sonorisé et s’intègre parfaitement à l’ensemble.
Le chanteur et bassiste Erik Grawsiö est en voix, il assure la plupart de ses parties vocales en growl, mais utilise aussi un chant semi-clair avec un timbre éraillé du plus bel effet. Sa voix extrêmement mobile force le respect tant il passe avec facilité d’un registre à l’autre. Sa prestation est souvent accompagnée de chœurs épiques qui renforcent sa performance.
Il parle un peu au public, en anglais, sans non plus être extrêmement loquace, mais il le remercie à de multiples reprises et exprime la satisfaction du groupe à jouer ici. Il faut dire que son micro semble souffrir de sérieuses défaillances lors de ses prises de parole dans la seconde partie du set, ce qui n’incite pas à palabrer longuement.
Qu’importe, le groupe est là pour jouer, et comme il sort son prochain album en avril prochain, le moment est idéal pour en dévoiler quelques extraits. Le chanteur annonce ainsi qu’ils vont jouer "une chanson du prochain album. Hier, nous avons sorti le premier single, mais ce n’est pas lui que nous allons jouer, et vous allez être les premiers, mes amis, à entendre ce nouveau morceau". Mânegarm exécute alors "Hervors Arv", un titre au couplet ultra rapide avec trois guitares sur lequel le chante screame intégralement, tandis que le refrain se fait plus lent et le chant plus clair.
Tout au long du concert, le pogo est déchaîné, écrasant à intervalles réguliers les tous premiers rangs. Des slammeurs font rapidement leur apparition, et dans la dernière partie du show, c’est un véritable déluge qui arrive de toutes parts. Certains échouent à seulement cinquante centimètres de la scène, quand d’autres entrent en collision au-dessus des premiers rangs, donnant lieu à de magnifiques lasagnes de slammeurs.
Le concert passe rapidement, et il semble que le groupe tire sa révérence quelques instants après être entré sur scène. Mânegarm aura vraisemblablement offert une bonne prestation pour les habitués, une très bonne pour les novices, et dans tous les cas conclu avec les honneurs cette première soirée.
Setlist
Intro
Tagen av daga
Hordes Of Hel
Vedergällningens Tid
Hervors Arv (First time live)
Kraft
Nattsjäl, drömsjäl
Blodörn
Fimbultrollet
Tvenne Drömmar (First time live)
Odin Owns Ye All
Encore:
Hemfärd
Aude D
Photos : Thomas Orlanth et Lionel/Born666. Toute reproduction interdite sans autorisation des photographes