Dimanche 23 juin, Temple, 13h35
Cemican
Ritual De Muertos
Après avoir marqué les esprits lors de la dernière édition du Cernunnos Pagan Fest en février dernier, les Mexicains franchissent de nouveau les océans pour partager avec la France leurs rituels occultes et leur folk metal précolombien saisissant.
Une introduction à la flûte et aux percussions retentit, tandis qu’arrive un danseur portant des torches. Cemican est connu pour mettre à l’honneur la culture aztèque aussi bien dans ses chansons que dans ses mises en scène, avec un intérêt marqué pour Le Jour des Morts mexicain. Le danseur, XAMAN-EK, le corps recouvert de peinture noire, porte donc un costume précolombien et est coiffé d’une immense parure à plumes, avec en guise de masque un crâne de mammifère à cornes.
Les cinq musiciens semblent presque sobres à côté, avec leurs peintures guerrières noires, blanches et rouges, et leurs vêtements aux motifs amérindiens. Il y a beaucoup de monde pour les accueillir, leur réputation les précède visiblement à Clisson, mais un certain nombre de Mexicains a aussi fait le déplacement, comme le prouve le drapeau brandi dans la fosse. La foule sera pourtant plutôt statique dans son ensemble durant une bonne partie du concert, mais quelques headbangs viennent animer le public, et l’on sent une certaine fébrilité parcourir l’auditoire.
Il faut dire que le groupe de Guadalajaja est impressionnant visuellement, qu’il présente parfois sur ses pages avec le hashtag #RitualDeMuertos, en référence au Jour Des Morts de la culture mexicaine. Musicalement, il ne fait pas dans la dentelle, et captive de par son mélange entre des sonorités bien connues des metalleux et d’autres beaucoup plus exotiques pour des oreilles occidentales. En plus de l’habituel ensemble batterie ( TLIPOCA ) / basse (OCELOTL) / guitare en double exemplaire, le groupe recourt à toute une série de percussions et de flûtes aux sonorités particulières, tenues par plusieurs des musiciens à tour de rôle, mais essentiellement M AZATECPATL et YEI TOCHTLI.
Les sonorités précolombiennes, particulièrement présentes, transportent donc dans un univers étrange et aérien, malgré la sonorisation parfois très moyenne, tandis que la brutalité des riffs très black metal pas vraiment subtils des guitares dévaste tout, aidée par le chanteur guitariste TECUHTLI qui utilise essentiellement le growl et le scream. Certains morceaux sont très rapides, d’autres ralentissent un peu le rythme et les guitares jouent alors des riffs s’orientant plus vers le heavy que le black, avec des arpèges plus audibles que sur les passages les plus agressifs, massifs mais pas toujours distincts.
Le sextette a deux albums à son actif, ils constituent donc en toute logique la charpente de la setlist, mais il offre aussi un nouveau morceau, prévu pour son nouvel album, In Ohtli Teoyohtica In Miquiztli, pas encore sorti lors du concert, mais tout juste paru maintenant.
Avec un membre entièrement dédié aux danses et aux performances diverses, Cemican dispose d’une scénographie vraiment saisissante. XAMAN-EK organise ainsi un sacrifice humain au beau milieu du concert. Le supplicié est traîné sur toute la scène, avant d’être agenouillé face au public, comme pour se faire trancher la gorge avec une arme blanche rudimentaire, pour finalement finir allongé et voir son cœur arraché, faisant jaillir des flots de sang. Le corps du sacrifié restera ensuite plusieurs chansons sur scène avant de disparaître. Cela pourrait être kitsch, mais les Mexicains sont tellement impliqués dans leur show qu’ils embarquent le public sans problème.
Le danseur revient régulièrement sur scène, que ce soit pour jouer du tambourin – qui a semble-t-il quelques problèmes de sonorisation – lancer des invocations en nahuatl (langue parlée par les descendants des Aztèques), brandir des torches et des battes ou boire dans un crâne. Un jour ordinaire dans la vie de Cemican. Il va même jusqu’à cracher du feu mais rate la dernière salve – on ne s’amuserait cependant pas à le lui faire remarquer…
Le groupe a droit à une véritable ovation à la fin du concert, plus que compréhensible, le danseur revient avec de l’encens, peut-être pour apaiser la fébrilité du concert, et les musiciens se feront de nouveau acclamer lorsqu’ils viendront aider leurs techniciens à vider la scène. On souhaiterait entendre dans nos contrées plus de groupes venus d’autres continents, il semblerait en tous cas que Cemican soit en train d’acquérir une certaine notoriété en Europe, ce dont on ne peut que se féliciter. En espérant revoir très bientôt le rituel sanglant des Mexicains.
Photo : Draksmoon / Julie Warnier. Reproduction interdite sans autorisation de la photographe
