Après le succès de la série des album inna di Yard (Kiddus I, Cedric ‘Congo’ Myton, The Viceroys, The Mighty Diamonds, Linval Thompson, Ras Mickael Junior et le regretté Junior Murvin) impulsé par Earl Chinna Smith, le reggae sait aussi s’apprécier en version acoustique et ce n’est pas l’album de Barrington Levy reprenant ses classiques sur Acousticalevy qui prouvera le contraire.
Aujourd’hui, c’est le grand Ronnie Davis qui nous propose un album acoustique de toute beauté, laissez moi vous en conter l’histoire.
Beaucoup d’entre vous connaissent cette voix chaude qui fit les beaux jours des groupes The Tennors et surtout de The Itals dont tout amateur de bon reggae roots se doit d’avoir au moins 3 de leurs albums : Brutal Out Deh, Give Me Power ! et Rasta Philosophy. Il créa ensuite Ronnie Davis & Idren et c’est une aventure solo (ou presque) qu’il nous propose ici.
Il se trouve qu’en 2012, le groupe The Tennors se reforme pour une tournée, 35 ans après leur séparation. George ‘Clive Tenor‘ Murphy et Ronnie Davis sont de la partie ainsi qu’un nouveau membre, le chanteur, musicien et producteur Henry 'Sadiki' Buckley. Si The tennors continuent aujourd’hui de tourner, c’est sans Ronnie Davis et sans Henry Buckley.
Et il se trouve que c’est justement Henry ‘Sadiki’ Buckley, rencontré à cette époque qui produit maintenant l’album de Ronnie Davis.
10 pistes et 4 interludes dont le très joli "rivers of Babylon". La reprise de "Strange things" (de John Holt, faut il le rappeler) est riche en émotion. De ce grand chanteur disparu, il reprendra aussi, en duo avec Sadiki (l’alchimie des 2 voix est tout simplement magique) le classique "Fancy make up", qui il faut bien dire l’inspire beaucoup, puisqu’il en avait déjà donné une version en 1979 sur l’album Gregory Isaacs Meets Ronnie Davis.
Son "false leader" est tout aussi puissant que l’original de 1985. Il faut dire que la guitare de Mitchum 'Khan' Chin (que l’on a pu entendre derrière Tarrus Riley ou Richie Spice ), la basse de Sadiki et le style quasi nyahbinghi de Sydney ‘Congo Billy’ Watson (qui a joué pour Luciano, Jimmy Cliff ou Tarrus Riley) aux percussions complètent harmonieusement la voix de Ronnie Davis, les chœurs étant assurés par la chanteuse Pam Hall et Sadiki lui-même.
On peut en dire tout autant de son "beware of evil" men et de son déchirant "i won’t cry" qui démarre sur un petit solo guitare et je mets quiconque au défi de ne pas craquer au moins une fois quand il envoie sa « note » qui monte vers les cieux.
Sur "my world" qu’il avait chanté en 1973 avec The Tennors et qui est, en fait, une reprise dont l’original est de Jimmy Ruffin (frère aîné de David Ruffin des Temptations) , on partage avec lui cette communion d’un monde créé pour soi-même.
Son "every rasta is a star" nous comble de bonheur et comment ne pas se rappeler de la version DJ de Big Youth (repris des années plus tard par Franckie Paul) sur un "every Nigger is a star", attachant la fierté de la couleur.
Le coup de grâce est asséné avec son "no weak heart" dont l’acoustique reprend le riddim original à savoir le "please be true" (original par Alexander Henry en 1969) pur produit de Studio One.
L’album a été enregistré de main de maître au Graton Studios et Anchor Recording par Romel Marshall, Tandra Jhagoo et Delroy Pottinger et a été mixé par Sadiki lui-même dans son Skinny Bwoy Studio. Un multi-talentueux qui a même pris la photo et fait le design pour la pochette de cet album qui donne la part belle à une voix magique et intacte sur des thèmes conscious ou lovers.
Album coup de cœur de cette fin d’été.