C'est en quelque sorte un nouveau concept d'interviews que nous avons inauguré au No Logo Festival. Il s'agit de nous pencher, non plus, sur les artistes qui occupent le devant de la scène, mais de nous intéresser à leurs musiciens.
Trop souvent dans l'ombre, malgré leur talent indéniable et le fait qu'ils collaborent avec des chanteurs qu'on ne présente plus, nous avons décidé de mettre un peu plus en lumière ces personnes pourtant indispensables à tout bon déroulement d'un concert.
Pour ce premier entretien, c'est le guitariste Kubix qui a accepté de répondre aux questions de La Grosse Radio.
Bonjour Kubix, merci de nous recevoir au nom de La Grosse Radio. Peux-tu te présenter ?
Je suis Kubix, je fais de la guitare avec plusieurs artistes, principalement dans le reggae. Un peu "inside man", je joue pour les gens ! (rires)
A part le reggae, dans quels styles évolues-tu ?
Je fais beaucoup de choses depuis longtemps, mais en ce moment je tourne aussi avec Zaho, une chanteuse de r'n'b. Sinon, on pouvait me retrouver au côté de Stupeflip il y a plusieurs années.
Quelle est ta formation de base en tant que guitariste ?
Comme tout bon adolescent qui se respecte, j'ai été un fan absolu de Nirvana. Autrement, j'ai dû apprendre des morceaux de Metallica et ce genre de choses. Et en parallèle, j'ai toujours travaillé des accords de Bob Marley.
Kubix, Le Radiant (Caluire-et-Cuire), 13 novembre 2016
Crédit photo : Live-i-Pix
Tu es musicien, mais également riddimmaker. Comment es-tu venu à la composition ?
Alors, riddim c'est vraiment lié au reggae. Mais je compose également de la soul ou du rock par exemple. Le reggae est peut-être le genre sur lequel je bosse le plus, mais en ce qui me concerne, ce n'est qu'un aspect de mon travail. Je ne suis pas fermé aux autres styles, la musique c'est large.
Quand j'ai commencé la guitare, j'ai toujours voulu composer des petites choses. En 1998, j'ai récupéré un vieux 4 pistes qui me permettait de pouvoir créer et enregistrer mes premiers morceaux. Ça ne devait ressembler à rien, je pense (rires) ! Mais ils me plaisaient beaucoup ! Par la suite, j'ai eu la chance de rencontrer quelqu'un qui m'a appris à me servir d'un ordinateur. A partir de ce moment-là, j'ai pu m'éclater, puisque je pouvais mettre autant de pistes que je voulais pour composer. C'était super ludique et festif !
Et aujourd'hui, tu composes toujours de la même manière ?
Pas sur le même ordinateur, je te rassure ! (rires) Sinon, tout dépend du genre musical sur lequel tu travailles, tu appréhendes les choses différemment selon les styles. Mais je compose toujours chez moi, en tout cas les bases ; après, s'il y a un peu de budget, tu vas en studio, sinon tu restes à la maison (rires). Je dois aussi souligner que j'ai la chance de pouvoir inviter des musiciens que j'ai rencontré au fil des années.
Récemment, un musicien comme Manudigital s'est lancé dans son projet solo et a sorti un album. Est-ce que toi aussi tu pourrais être tenté par cela ?
Tout d'abord, je voudrais adresser un BIG UP à Manudigital. On jouait ensemble il y a déjà plus de 10 ans. Je suis fan de son parcours qui est quand même assez génial. Pour revenir à la question de l'album, il est vrai que je kifferais d'en sortir un. Après, je ne sais même pas s'il sera reggae, mais il me faudrait surtout du temps. En effet, ce n'est pas la même chose de composer des instrus pour un chanteur et s'investir sur son propre projet. Il faudrait que j'y réfléchisse beaucoup plus, mais l'envie est bien là !
Kubix, No Logo, 12 août 2017
Crédit photo : Live-i-Pix
Quels chanteurs aimerais-tu y inviter ?
Il y en a plusieurs, notamment Lauryn Hill. Mais je pense que si c'était un album solo, je ne ferais pas apppel à des chanteurs en particulier, il s'agirait plutôt de quelque chose de plus instrumental. Après, j'aimerais bien aussi travailler avec Burning Spear, donc si vous pouviez faire le lien La Grosse Radio, ce serait cool (rires) !
Tu es actuellement en tournée avec Meta Dia. Son album est sorti dernièrement. As-tu justement composé quelques morceaux ?
Non, pas spécialement. En fait, il y a juste un titre que l'on a fait à deux et sur lequel j'ai pas mal bossé. Mais pour le reste, c'est Meta qui compose et qui cale ses guitares/voix et après on a arrangé.
Tu concilies plusieurs tournées à la fois. N'est-ce pas difficile à gérer et n'arrive t-il pas que tu puisses te mélanger les pinceaux ?
Non, ça ne m'arrive pas du tout. Pour établir une analogie, un plombier ne va pas faire le travail du maçon et mettre du ciment dans ses tuyaux ! Le problème n'est pas de se mélanger les pédales, mais plutôt de pouvoir gérer les plannings de chacun et les tempéraments des uns et des autres. Certains artistes ne vont par exemple pas être contents que tu ne puisses pas être disponible.
La guitare n'est pas nécessairement l'instrument le plus mis en avant dans le reggae, contrairement au rock notamment. Tu es pourtant considéré comme un musicien important sur la scène reggae, les gens connaissent ton nom. A t-il été difficile pour toi de "faire ta place" ?
Déjà, ça ne me dérange pas, si l'on ne doit pas retenir mon nom, ce n'est pas le but premier. Mais force est de contaster qu'il y a quand même des guitaristes ou des claviéristes qui sont reconnus aujourd'hui dans le reggae. Et encore une fois, je ne cours pas après une reconnaissance particulière. Du moment que je peux continuer à travailler avec des artistes qui me plaisent, c'est le principal.
Veux-tu dire quelques mots à propos de Bim disparu l'année dernière ?
C'était le patron ! La figure majeure des guitaristes reggae en France ! C'était l'un des premiers français à jouer avec autant d'artistes. Il avait et le son, et le jeu et la culture. De plus, il a fait évoluer la musique comme le business, puisqu'il savait défendre les droits des musiciens. C'est notamment grâce à lui si aujourd'hui on peut avoir de bonnes conditions. De ce point de vue-là, c'était un vrai bonhomme, un vrai gars ! Je ne l'ai pas connu aussi bien que d'autres, mais il a fait partie des premiers à m'appeler pour le remplacer, à me faire confiance tout simplement.
Kubix, No Logo, 12 août 2017
Crédit photo : Live-i-Pix
Beaucoup de musiciens français accompagnent des chanteurs jamaïcains. Existe t-il, selon toi, une patte française qui plaît aux Jamaïcains ?
Les Jamaïcains savent qu'il y a de très bons backing bands en France aujourd'hui, ce qui n'est pas nécessairement le cas en Espagne ou en Italie par exemple. Il existe une vraie culture du backing band en France, on peut en être fiers !
Est-ce dû au système d'intermittents du spectacle d'après toi ?
En effet, ça doit sûrement aider. La culture est valorisée en France, jusqu'ici on s'en sort pas trop mal, il va falloir que les gouvernements fassent bien attention à cela ! L'intermittence permet aux musiciens d'avoir du temps, ce qui est très important.
Pour revenir à la question initiale et pour être tout à fait franc, je pense qu'il y a avant tout une histoire de budget. Dans la hiérarchie, tu as l'artiste jamaïcain qui part avec son backing band jamaïcain, ensuite tu as l'artiste jamaïcain qui joue avec un band français ou européen et finalement tu as l'artiste jamaïcain qui se produit avec un selecta. A la base, c'était donc vraiment une question d'argent, puis les Jamaïcains se sont rendus compte du talent des musiciens français et ont décidé de poursuivre la collaboration par plaisir artistique. On a de la chance d'avoir de très bons musiciens en France.
Où en est le projet des Colocks ?
Pour l'instant, c'est en stand-by !
Un dernier mot pour La Grosse Radio ?
Merci La Grosse Radio ! On a rarement l'occasion de saluer le travail de ceux qui relaient les infos et qui diffusent la musique ! BIG UP !!
BIG UP à toi aussi Kubix ! Merci de nous avoir accordé cette interview !
Merci également à Charlotte du No Logo pour avoir organisé cette rencontre.