"Coolitude, bonne humeur, de l'énergie à revendre et des surprises en pagaille : Folsom a sorti un album qui donne le sourire, idéal pour passer un très bel été"
Du rock qui groove. Cela paraît être une banalité affligeante, pourtant, bon nombre de formations semblent avoir délaissé l'appel du rythme irrésistiblement chatoyant pour se concentrer sur la force brute, ce qui nous a donné un bon paquet de formations qui n'avaient pas grand chose d'autre à proposer qu'un rock de bûcheron banal. C'est d'autant plus dommage que des formations aussi diverses que les Red Hot Chili Peppers, Rage Against The Machine et tant d'autres ont depuis longtemps déjà démontré que puissance de feu pouvait rimer avec injonction à remuer son popotin (et ne parlons même pas des grands anciens, pour qui le groove était une seconde nature). Ne désespérons pas, puisqu'il arrive tout de même que des groupes parviennent à retrouver le bon équilibre, comme celui qui nous occupe aujourd'hui, qui sort son premier album dispo dès à présent via Bandcamp et sur les plates-formes de téléchargement habituelles.
On avait laissé le quatuor des Folsom sur un premier 4 titres sympatoche, mais encore bien trop tendre. Toutefois, quelques passages laissaient entrevoir un vrai potentiel. Vous me direz que les formations qui semblent disposer "d'un certain potentiel" et qui finissent dans les limbes de l'oubli sans jamais avoir confirmé quoi que ce soit, on a arrêté de les compter il y a longtemps. Soit, mais il y a eu ici un sacré ravalement de façade, qui explique peut-être en partie le léger changement de nom (le groupe s'appelait auparavant Folsom Boys). Fini le rock de bar à tendance AC-DCesque entendu 1000 fois, place à un rock funky qui déborde de cool attitude, malgré un son qui manque de patate, typique des formations sans le sou. Cela étant, mieux vaut avoir une production un peu faiblarde et de bonnes compos que le contraire.
Après une intro qui envoie le bois et qui mérite le LGR Award du "meilleur titre de chanson de l'année" : "Patatas Fritas", les choses sérieuses commencent directement avec le titre éponyme "Bad Ways". Une petite ambiance à la cool, une voix façon loubard sympathique croisé tard le soir au détour d'une ruelle mal famée qui nous invite à tendre l'oreille, et un gros riff qui tue, un ! Celui-là, Tom Morello ne l'aurait pas renié. Le titre parvient sans effort à mêler gros groove et rock qui envoie. Si on avait bien compris que les zicos maîtrisaient leurs instruments, les différences sautent aux oreilles : le batteur ne plaisante toujours pas, mais s'est discipliné pour mieux se mettre au service des compos, la basse a fait un pas en avant, les guitares se sont épaissies tandis que la voix a grandement élargi son registre. En bref, le groupe a quitté les incertitudes des débuts, a effectué sa mue et se présente bien plus sûr de lui, un sourire goguenard au coin des lèvres. Folsom a bien bossé et fait étalage de son savoir-faire le long de dix titres qui, s'ils ont le rock en commun, varient les plaisirs avec brio.
C'est ainsi que des passages de basse slappée côtoient une voix capable de passer du clair à des beuglements que n'aurait pas renié Lemmy Kilmister, des breaks furibards qui voient le batteur Léo lâcher les chevaux, de chouettes solos de guitare et quelques délires bien sentis, comme les sifflements du bonheur de "Intoxicated", le riff chinoisant sur l'excellent break de "Chinese Ghost" ou le dernier titre, "Kraken", façon ballade irlandaise et qui se veut un hommage aux origines "rock pour soiffards" du combo. Surtout, on apprécie particulièrement l'effort réalisé par Folsom pour toujours surprendre : les breaks inattendus sont légion, au sein de titres qui restent pourtant furieusement rock'n roll, tout en allant puiser dans la funk, le blues, le boogie rock, voire la disco ("Disco Trap", l'histoire d'un rockeur qui se retrouve dans un club disco). D'ailleurs, le programme est clairement énoncé dans "Showtime" :
"This ain't no hip hop, this ain't no rock n roll
just some motherfucking music man, and it's right here to fuel your soul
so if you feel the heat and feel the beat, it's showtime ! Gotta know you're it"
C'est en effet un amour sincère de la musique sous toutes ses formes qui transparaît de Bad Ways et qui explique sa richesse. Si le groupe n'hésite pas à envoyer des refrains catchy et mélodies accrocheuses ("Fucking the devil's mother"), se limiter au couplet-refrain plan-plan ne colle pas avec l'enthousiasme de chaque instant qui émane de cet album, comme en témoignent les nombreuses introductions délirantes. Il est d'ailleurs vraiment dommage que le son ne soit pas à la hauteur, car au niveau des arrangements, le groupe a fait un effort appréciable : choeurs, orgue 70s, les musiciens savent enrober leurs titres avec amour. On regrettera donc d'autant plus le rendu insuffisamment pêchu.
Fort heureusement, la musique est bonne, et c'est le principal. Parvenir à régulièrement surprendre l'auditeur tout en conservant une grosse efficacité et une fraîcheur de tous les instants, voilà le petit tour de force réalisé par le combo. Coolitude, bonne humeur, de l'énergie à revendre et des surprises en pagaille : Folsom a sorti un album qui donne le sourire, idéal pour passer un très bel été.