"Ce nouvel effort est dénué de fioritures et se concentre véritablement sur l'essentiel"
Post-rock, shoegaze, Dream-pop, des courants qui tout en ayant leurs particularités, n'en conservent pas moins un certain lien de parenté et font face à des problèmes similaires. Comme tout style musical qui atteint un certain âge, l'inertie guette. Les suédois d'Immanu El font partie des formations récentes qui déjouent les pronostics et offrent un nouveau souffle à des courants qui menacent de tomber en désuétude. Le troisième album des suédois, In Passage (2011), était un monument de beauté et la meilleure preuve que l'on pouvait encore trouver des groupes capables de faire rêver.
5 ans, un double changement d'effectif, plusieurs apparitions dans des festivals internationaux (Etats-Unis, Canada, Chine) et une campagne de financement participatif réussie plus tard, Immanu El est finalement de retour avec Hibernation. Le titre apparaît judicieusement choisi tant l'album se concentre sur l'introspection, offrant un écrin toujours plus intimiste aux mélodies. Ce nouvel effort est dénué de fioritures et se concentre véritablement sur l'essentiel, à tel point qu'une écoute superficielle peut le faire paraître trop simple. Erreur, dans laquelle votre serviteur est d'ailleurs tombé la tête la première dans un premier temps.
Certes, les guitares sont en retrait, les arrangements électro plus prononcés, bien que toujours discrets, et les mélodies sont directes. Ayant atteint la maturité sur leur précédent long, les musiciens ont choisi de sortir de leur zone de confort et de poursuivre leur chemin vers une certaine forme de pureté en se débarassant de tout ce qui n'était pas absolument nécessaire. Paradoxalement, l'album peut s'avérer relativement difficile d'approche tant l'attention et un certain état d'esprit sont nécessaires pour se l'approprier et en retirer la substantifique moelle.
Le morceau d'ouverture,"Voices", est un bon exemple, invitation au recueillement, à l'introspection, parfaite bande-son de l'hiver sous la neige, propice à l'émerveillement devant une aurore boréale. Il y a quelque chose de presqu'enfantin dans la pureté des émotions proposées, qui ne sont troublées par aucun désir parasite, par aucune pensée impure, par aucune note déplacée. Le quintet se concentre sur son objectif sans jamais dévier de sa route.
Le revers de la médaille de cette ambiance à couper au couteau consiste en un rythme lent qui pourra s'avérer un peu rébarbatif pour certains. Les musiciens ont choisi un parti pris artistique certain, au risque d'en décevoir certains et de plaire énormément à d'autres. Ou, mieux, de pouvoir proposer un album susceptible de plaire à beaucoup, pour peu que l'on profite de l'album quand le bon état d'esprit est là, quand les conditions sont réunies. Reste que la grande beauté de la musique proposée ici n'a rien d'illusoire, mais elle ne délivrera tout son potentiel que dans les conditions idoines, comme en plein coeur de la nuit, au plus profond de l'hiver.
