Lors de la sortie de Hot Streak, second excellent album des Winery Dogs, on a vu les confrères titrer "Et si Richie Kotzen était la superstar du rock que tout le monde ignore?", et en effet, la question est grande. Lorsque l'on suit un artiste depuis longtemps, ses projets et l'évolution de sa carrière, on a tendance à oublier que notre engouement est avant tout personnel, et qu'on le voit partout avant tout parce qu'on le suit, pas parce que sa notoriété est équivoque.
Alors petit récapitulatif, pour ceux dont le nom de Richie Kotzen ne serait qu'un écho lointain. Loin d'être un débutant, le bonhomme s'est illustré dans les années 90 à la suite de guitaristes - malheureusement - bien plus connus. Il prendra tour à tour les rênes de Poison lors du départ de C.C Deville, puis de Paul Gilbert au sein de Mr Big. Il s'illustrera également avec The Winery Dogs, aux côtés de Billy Sheehan (toujours de Mr Big, donc) et de l'homme à tout battre Mike Portnoy. Second homme de main, Kotzen ? Pas vraiment, d'autant que sa carrière foisonne d'albums solos tous plus excellents les uns que les autres, et qu'il y illustre, en plus de son jeu qui l'apparente par moments à cette mini-caste un peu grossière que sont les "guitar-heroes", une voix fantastique, de plus en plus développée. C'est d'ailleurs dès la première écoute de ce nouveau opus, Salting Earth, que l'on posera un constat indéniable : avec un talent vocal pareil, cela aurait été un pur gâchis de rester dans l'ombre de l'opportuniste Brett Michaels.
Alors Richie Kotzen s'éloigne du rock, qui le cantonnerait à un chant puissant mais trop simpliste face à ces capacités, et mêle à ses compositions de nombreuses hypnoses que le mouvement soul ne lui reniera pas. Plus discret dans son jeu de guitare que quand il est en groupe, où l'occasion est plus démonstrative, ses accentuations se situent surtout dans la construction des lignes de chant, les siennes comme celles de ses choristes, et les musiciens qui l'accompagnent trouvent également cet équilibre qui ne fait que sublimer l'ensemble, mettre en avant les changements de tonalité lors de refrains efficaces et beaux.
Et dans sa façon de mêler soul, funk, rock et jeu de guitare à la fois technique et ressenti, Richie Kotzen nous fera ressentir bien des émotions. Ceux qui auront suivi avec appétit la carrière de l'artiste y verront une continuité certaine de tout ce qu'il a abordé jusqu'alors, surtout que Salting Earth ne s'éloigne que de peu de l'opus précédent Cannibals (2015), mais y sentiront également une évolution. Tout en travaillant les mêmes aspérités, Kotzen sait créer de nouvelles mélodies qui nous rentrent en tête, qui sont pertinentes, tant dans son chant que dans les arrangements qui l'accompagnent, et ses solos toujours très bien construits. On a excessivement hâte de le voir défendre ce nouveau bijou en live, et on ne saurait que conseiller à tous de se pencher sur son travail, qui vaut largement le coup, et ce sur chaque album. Y'en a pas mal à rattraper.
Sorti le 14 avril 2017 chez Headroom-Inc