2020 semble être l'année de la résurrection pour les groupes de prog. Après le réveil de Psychotic Waltz, c’est au tour de Pure Reason Revolution de renaître de ses cendres. Pour information, le duo britannique avait fait pas mal de bruit dans la scène metal prog dans les années 2000 avec leur style proche de Porcupine Tree mais en y mêlant de l’Electro. Et puis 2011 arrive, l’année du break. Huit ans plus tard, grosse surprise pour les fans puisque le groupe, amputé de deux de ses membres, se reforme au Midsummer Prog Festival. Nous voilà avec ce nouvel opus, intitulé Eupnea, qui est disponible depuis le 3 avril chez Inside Out.
Pure Reason Revolution, c’est quoi ? Aujourd’hui, c’est tout simplement un duo : Jon Courtney au chant, guitare et claviers accompagné de Chloë Alper au chant et à la basse. Et ce couple fictif arrive à faire des merveilles en mélangeant le rock prog de Pink Floyd avec des sonorités beaucoup plus intenses et heavy. Mais là où le duo se démarque, c’est que contrairement aux autres, ils emmènent le prog vers des contrées electro avec des ambiances atmosphériques ou groovy. Sur le papier cela semble un peu fourre-tout mais les deux compositeurs maîtrisent parfaitement l’art de mêler les différents genres. A l’écoute du disque, on pense forcément aux projets de Steven Wilson, notamment avec la voix nasillarde et british de Jon, on pense aux batteries jazzy et groovy de Gavin Harrison et aux riffs heavy d’un Fear of a Blank Planet. Vous voyez où ça nous mène ? Mais stop, Pure Reason Revolution n’est pas une simple copie. Leur force réside notamment dans le potentiel vocal de Chloë qui emmène les compositions vers d’autres terrains avec sa voix soul et aérienne et dans cette capacité à faire progresser la musique et les groupes déjà existants. N'est-ce pas là l'essence du "progressif" ?
L’album jouit d’une production sans faille qui met en lumière cette dichotomie seventies/metal avec des synthétiseurs analogiques mixés à des guitares lourdes et puissantes. Chaque instrument brille, que ce soit un piano doux, un mellotron suave ou une guitare électrique aux riffs percutants et agressifs. Quel plaisir de naviguer tranquillement entre les différentes parties d’un morceau et de découvrir à chaque écoute, une piste, un riff, une mélodie qu’on aurait manqués tant il y a de choses à découvrir.
L’un des gros problèmes du prog réside souvent dans la difficulté à aborder les morceaux, longs et alambiqués. Mais ici, Pure Reason Revolution a bien fait les choses : si, au départ, on peut se dire que six morceaux sur un album, cela ne présage rien de bon pour l’auditeur habitué à des formats plus courts, la majorité des morceaux est constitué de parties qui s’enchaînent de façon naturelle. En effet, un morceau comme "Silent Genesis", qui pourrait apparaitre comme lourd à digérer, ne souffre en aucun cas de ce mal. Les dix minutes passent comme une lettre à la poste passant d’un style trip hop, à quelque chose de plus lourd pour partir en impro très seventies et se finir avec un rock plus dur qui rappellera les bonnes années de Muse. En dix minutes, il y a à boire et à manger, sans pour autant se sentir écœuré ou étourdi par tant de styles. Qu’on se rassure, même si la musique de Pure Reason Revolution revisite pas mal de genres, le groupeveille à rester dans le domaine du rock et du metal.
Autre morceau de bravoure, le titre éponyme, qui pendant treize minutes va encore une fois alterner entre prog seventies et metal hyper groovy. Le groupe n’a pas voulu faire les choses à moitié et cette composition longue évite encore une fois l’écueil de la redite et de la répétition. On est face à un morceau qui, même s’il est typique du metal progressif en mêlant Pink Floyd et Metallica, se veut résolument plus moderne avec des notes de Rage Against the Machine et des synthés froids parfois mais jamais sans âme.
L’auditeur va peut-être perdre un certain intérêt sur les morceaux courts. Alors que le groupe a démontré dès le début de l’album avec "New Obsession", qu’il est capable de partir d’un thème et de le développer sans ennui, les titres tels que "Maelstrom" ou "Beyond our Bodies" peinent à exister. Fait assez intéressant, ce dernier reprend le thème de "Maelstrom". L’intérêt de ses morceaux réside sûrement dans le fait de vouloir proposer une pause pour souffler entre les plats de résistance. On pourra valider ce choix en se basant sur le titre de l’album qui est le mot latin désignant une "respiration normale".
Et pourtant, pour un retour sur la scène prog, Pure Reason Revolution montre qu’ils sont toujours là et qu’ils continuent de prendre le chemin tracé par Porcupine Tree. Sans perdre leurs fans en restant sur leurs bases, le groupe continue à progresser et à être digne d’intérêt. Avec un format proche de l’EP, on espère que cet échauffement aura donné envie au duo de continuer à composer pour nous offrir un album encore plus conséquent.
Pour découvrir leur musique en live, le groupe sera en tournée avec Gazpacho et passera par Paris le 24 octobre 2020.
Tracklist :
1. New Obsession (5:09)
2. Silent Genesis (10:20)
3. Maelstrom (5:44)
4. Ghosts & Typhoons (8:45)
5. Beyond Our Bodies (4:28)
6. Eupnea (13:23)
Disponible depuis le 3 avril chez Inside Out.
Photos : DR Inside Out Music