Retour vers La Futura
Nom de Zeus ! ZZ Top sort son premier album en presque dix ans ! En dix titres et quarante minutes, Billy Gibbons, Dusty Hill et Frank Beard montrent qu’ils sont toujours mordus de blues. La Futura, qui fait plus figure de retour aux sources, est un album calme qui fait voyager l’auditeur à travers le Texas, avec sa chaleur et ses paysages arides.
On n’y croyait plus, et pourtant, ils sont revenus en studio. Depuis Mescalero en 2003, ZZ Top avait squatté les bacs des disquaires que pour des best of et des enregistrements live montrant un groupe qui chante son glorieux passé. Mais en septembre 2012, les texans font aussi leur rentrée avec La Futura, un album court et direct, construit "à l’ancienne", avec ses quarante minutes qui tiennent aisément sur un vinyle simple.
Produit par Rick Rubin, La Futura bénéficie d’un son chaud et gras, particulièrement sur la guitare de Billy Gibbons, aussi à la production, qui illustre parfaitement ses saturations maîtrisées sur le titre d’ouverture "I Gotsa Get Paid". Ce son permet à l’auditeur d’avoir l’impression de se retrouver dans les plaines arides du Texas, avec un soleil de plomb qui tape sur les plaines arides, pendant que Billy fait vrombir sa guitare et ses cordes vocales élevées au whisky et à la cigarette.
Côté performance, le groupe fait le boulot sans faire trop d’étincelles. De plus en plus rauque, la voix de Billy Gibbons fait des merveilles sur l’ensemble des titres, animée par un phrasé du chanteur gorgé de feeling. Le bassiste Dusty Hill vient à la rescousse pour les chœurs, mais ne prend jamais le lead, alors qu’il a signé vocalement quelques titres du groupe, comme "Tush" (Fandango) ou "I’ve Got The Six" (Eliminator). La rythmique solide de ce dernier et du batteur Frank Beard sait se faire soutenue et groovy sur des titres comme "Heartache In Blue" et plus discrète, mais toujours indispensable sur les ballades comme "Over You". Côté guitare, Gibbons se fait plaisir avec des licks à tout va dans les couplets et des solos gorgés de feeling, bien que certains manquent de charpente mélodique solide ("Have A Little Mercy").
Côté chansons, elles sont relativement calmes. Les trois membres du "Little ol’band from Texas" sont tous sexagénaires et cela se ressent dans leur manière d’appréhender l’ensemble des titres. Quelques sursauts d’énergie se font sentir sur l’entêtant "Chartreuse" et "Flyin’ High", mais les titres sont pour la plupart issus du blues et interprétés en mid-tempo. Ils sont généralement bien exécutés, on retiendra notamment "Heartache In Blue" et son harmonica divin, "I Don’t Wanna Lose, Lose You" et son refrain accrocheur, ou encore "I Gotsa Get Paid" et ses sonorités grasses. Un drôle de choix fait par le groupe : l’enchaînement "Chartreuse"/"Consumption", deux titres au riff principal assez similaire, qui ressemble déjà au riff de "Tush". On notera un titre d’une grande banalité, "Big Shiny Nine", qui prend des allures de filler.
Si l’album s’appelle La Futura, on pourra noter que, stylistiquement, ZZ Top regarde plutôt par-dessus son épaule, en ressassant le blues électrique de ses débuts, l’énergie de la jeunesse en moins. Gibbons a déclaré qu’il ne voulait pas « tourner le dos à la technologie actuelle », pourtant les expérimentations électroniques présentes sur Eliminator ne sont pas de la partie, de même que d’éventuelles sonorités modernes.
Enfin revenus en studio après des années de tournées couronnées de succès, les trois musiciens de ZZ Top ont pu laisser libre cours à leurs inspirations blues. Si l’album est agréable dans son ensemble, il peut décevoir par sa prédominance calme et son manque de tube incontestable. Malgré cela, ZZ Top tient la cadence et évite l’écueil de l’auto-parodie en sortant un disque honnête et spontané.