Alors que le retour de Nine Inch Nails ne devrait plus trop tarder (ce qui n’étonne pas grand monde dans la mesure où il a toujours été question d’une pause, pas d’un arrêt définitif), Trent Reznor se concentre pour le moment sur d’autres projets, et notamment la sortie d’un second EP de son projet How to destroy Angels, groupe monté avec sa femme Mariqueen Maandig et son fidèle collaborateur Atticus Ross (avec qui il a récemment réalisé les bandes originales de The Social Network et The Girl with the Dragon Tattoo). Après un premier EP sorti en 2010 (et disponible en téléchargement gratuit sur leur site), et en attendant la sortie d’un premier album prévu pour 2013, voici An Omen, qui devrait nous permettre d’en savoir un peu plus sur ce projet, que Rob Sheridan a désormais rejoint. Bien connu des fans de NIN, le photographe et webdesigner (qui a aussi créé le jeu autour de l’album Year Zero) collabore pour la première fois avec Reznor en tant que musicien.
Le premier EP avait divisé les fans. Déjà, au niveau du style, on est pratiquement à des kilomètres de NIN. Pratiquement, car la patte de Reznor reste immédiatement identifiable. Pour le reste, on est bien plus proches du trip-hop que d’autre chose avec des ambiances feutrées et planantes. Changer de style ne pose aucun problème en soi (surtout quand il s’agit d’un nouveau projet), encore faut-il que le résultat soit à la hauteur. Ce qui n’est pas toujours le cas. Certes, on est forcément plus exigeant avec une telle équipe : le duo Reznor/Ross est capable de tellement de choses qu’on en attend beaucoup, peut-être trop. Il faudra attendre le premier album pour se faire une véritable idée du potentiel du projet, mais pour l’instant, ce n’est pas encore tout à fait la franche réussite qu’on était en droit d’attendre, malgré d’indéniables qualités.
Tout d’abord, la forme plus planante et vaporeuse convient bien aux ambiances habituellement développées par les deux compères, qui n’ont plus à appuyer sur la pédale d’accélérateur et peuvent se concentrer sur des ambiances aussi douces qu’inquiétantes (« On the Wing »). Plus que jamais, le ver est dans le fruit, et alors qu’une belle ambiance laisse notre esprit vagabonder agréablement, de légers changements viennent remettre en cause cet équilibre et nous ramènent à des choses beaucoup plus sombres (« The sleep of reason produces monsters »). C’est là la plus grande force du projet : être capable de passer du clair au sombre sans heurts, sans que l’auditeur ne se rende bien compte de la transition. A ce titre, le nom How to destroy angels est particulièrement bien trouvé. Reznor continue de parler des contradictions d’une société qui a peur d’elle-même et qui préfère jouer à l’autruche plutôt que d’affronter ses problèmes.
Pourtant, cette grosse demie-heure de musique se conclue de façon curieuse avec « Speaking in Tongues », long bidouillage sonore répétitif assez plat qui nous rappelle le risque inhérent à toute production de savants fous en train de s’éclater en studio : le risque qu’ils partent trop loin dans leur délire et oublient un peu qu’ils s’adressent aussi au monde extérieur. Ce nouvel EP, s’il s’avère plus solide que son prédécesseur, reste un brin trop hermétique pour pleinement convaincre. Il reste une œuvre intéressante, mais on attendra définitivement le premier véritable album du groupe pour se faire une idée plus précise de son véritable potentiel. En attendant, vous pourrez vous faire votre propre idée, puisqu’il est entièrement accessible en streaming depuis le site du groupe.