The Cure – Bloodflowers (2000)

Quand on parle de The Cure, certains albums viennent immanquablement en tête. Pornography (1982) et Disintegration (1989) notamment, mais il semblerait que la conclusion de la trilogie, Bloodflowers donc (Robert Smith considère ces 3 albums comme ses préférés), soit un peu passée à la trappe, étant considéré avec le recul comme un simple bon album qui renouait avec des éléments phares dont le groupe s’était éloigné et qui avaient largement contribué à son succès. C’est en effet avec Bloodflowers que The Cure avait lancé son opération reconquête après les résultats décevants de Wish (1992) et Wild Mood Swings (1996). L’album marquait le retour à des sonorités moins pop et plus typiques du groupe : compositions longues, globalement tristounes, ambiances plus sombres et dépressives… Mais surtout, des chansons plus inspirées et un travail en studio hallucinant qui rend l’expérience de l’auditeur particulièrement riche et appréciable.
 

the cure, bloodflowers
 

De mémoire, le groupe a passé plus de 250 jours en studio. Comme de nombreux leaders avisés, Robert Smith peut s’avérer être particulièrement exigeant quand il a une idée en tête. Et c’est peu de dire qu’au vu du résultat, le chanteur a dû se montrer intraitable quant aux prises de ses petits camarades. Chacun des 3 albums précités correspond en effet à une période de pétage de plombs du leader qui avait pris un souffre douleur lors de l'enregistrement de Pornography (Lol Tolhurst pour ne pas le citer), s’était barré dans son coin pour écrire l’intégralité de Disintegration, et se transforme en maniaque du contrôle pour Bloodflowers, jusqu’à faire fuir ses musiciens qui le laisseront se démerder pour finir. Chaque partie de guitare électrique, chaque nappe de synthé, chaque note de piano a été placée de façon chirurgicale pour créer des atmosphères vaporeuses et irréelles afin que l’auditeur puisse se perdre dans un rêve étrange et magnifique.

 

Alors on pourra toujours reprocher plein de trucs à l’album, d’être « trop classique », « trop homogène », mais nous rétorquerons aux journalistes dans ce cas que bon nombre d’entre eux n’avaient pas manquer de s’extasier lors de la sortie de l’album avant de progressivement retourner leurs vestes. Car au-delà des compositions, c’est bien dans sa production exceptionnelle que l’album tire toute sa richesse. Remarquez que si les chansons ne suivent pas, c’est peine perdue. Fort heureusement, si Bloodflowers dégage une forte unité qui pourrait paraître un peu monolithique (et monotone) au premier abord, il n’en propose pas moins des titres plus variés qu’on ne pourrait le croire : des chansons très accessibles et accrocheuses, comme l’imparable single « Maybe Someday » et son riff de guitare qui a fait tourner de nombreuses têtes, « Where the birds always sing » et son ambiance chaleureuse, ou encore « There is no if », courte chanson épurée… Autant de moments plus simples et directs qui permettent de reprendre son souffle à l’écoute de cette œuvre ambitieuse.

 

 

Et puis il y a ces longues pistes où l’on sent que Smith est comme un poisson dans l’eau, les 11 minutes de « Watching me fall », les 7 minutes de la chanson titre et de « 39 », sur laquelle Smith affronte la crise de la quarantaine. Avec Pornography, il avait une vingtaine d'années et voulait tout péter, avec Disintegration il en avait 30 et ne savait plus quoi faire de sa vie, avec Bloodflowers, il regrette que plus grand monde ne lui prête attention. C’est pourtant grâce à cet album que The Cure conclut une période creuse et revient au sommet : Pornography marquait la fin de la période cold wave, Disintegration était un aboutissement, et le premier nommé marque le retour au sommet. Depuis, à l’instar d’Iron Maiden avec Brave New World, le groupe a confirmé son statut de légende, seuls les fans purs et durs continuent de s’intéresser à ses sorties récentes, mais indépendamment du succès de ses prochaines sorties discographiques, son nom restera ancré dans la légende du rock.

Merci à Mc Fly pour ses précieuses contributions.



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