Quasiment un an jour pour jour après un passage triomphal dans une Maroquinerie pleine à craquer, les Twenty One Pilots sont de retour dans un Trabendo lui aussi complet depuis cinq mois signe du succès grandissant du combo en France. Pour cette tournée en l’honneur du dernier opus du combo, Blurryface, le duo qui compose Twenty One Pilots a mis les petits plats dans les grands en termes de lumières, de setlist et d’énergie. Retour sur une date grandiose !
Jeremy Loops
La salle est déjà bien remplie quand Jeremy Loops fait son entrée sur scène seulement armé de son harmonica. Les regards interloqués s’échangent dans la fosse, personne ne semblant convaincu parce que nous propose l’artiste. Cependant tout change très vite dès le second morceau qui voit arriver les autres membres du groupe, avec notamment des musiciens multi-instrumentalistes. En effet Mr Sakitumi s’occupe de la batterie et de la basse sur d’autres morceaux tandis que Jamie Faull s’arme de son saxophone ou d’un séquenceur. Le nom du groupe est en accord avec ce qui se passe sur scène puisque Jeremy Loops utilise une pédale lui permettant de mettre des sons en boucle ou encore de modifier sa voix donnant ainsi un énorme relief à la prestation.
Au chant il est accompagné par le rap de Motheo Moleko, qui soit dit en passant possède un flow remarquable qui fait parfois penser à celui de Childish Gambino. Originaire d’Afrique du Sud, Jeremy Loops nous conte l’histoire de sa ville, de sa maison et de son pays dans des chansons entraînantes et qui mettent le public en condition pour ce qui les attend ensuite.
Le public est mis à contribution à de nombreuses reprises pour le plus grand bonheur des membres du groupe qui ont la banane et qui apprécient ce moment de communion assez rare pour un groupe de première partie, encore moins quand celui-ci est inconnu de la plupart des personnes présentes. Après trente-cinq minutes, Jeremy Loops et sa bande se retirent et ils peuvent être fiers ce qu’ils viennent de réaliser !
Twenty One Pilots
Il est 21h05 quand les lumières s’éteignent et que le public s’embrase à l’idée de voir arriver sur scène les héros de la soirée. Il y a un an, nous étions 500 dans une Maroquinerie pleine à craquer et c’est encore mieux ce soir avec les 700 places du Trabendo. Et quand on pense qu’ils repassent dans seulement quatre mois pour une salle doublement plus grande, le Bataclan, c’est un petit exploit. Il faut dire que le succès de Blurryface est passé bien au-delà des frontières américaines. Aux Etats-Unis ce sont des salles de 4 000 personnes que remplissent Tyler Joseph (chant, piano, ukulélé, basse) et Josh Dun (batterie) mais ce chiffre augmente en Europe et c’est bon signe.
C’est à "Heavydirtysoul" d’ouvrir le bal, la scène est noyée sous un amas de fumée et de lumières sous lequel il est très difficile de distinguer les deux membres sur scène. On peut par contre se rendre compte que le son est très bon, il faut aussi dire que la place au niveau de la table de mixage est toujours le meilleur emplacement pour profiter aux mieux des conditions sonores. "Stressed Out" prend la suite et déjà le public est sous le charme, les titres de Blurryface passe haut la main l’épreuve du direct et c’est un bonheur d’entendre que le groupe ne contente pas de jouer les titres mais prend le temps de les sublimer. C’est particulièrement flagrant au niveau de la batterie où Josh Dun étoffe son jeu, offrant une approche beaucoup plus musclée à son jeu.
La setlist est particulièrement dense avec dix-huit titres mais celle-ci occulte complètement le tout premier album éponyme du groupe là où la tournée de 2014 mettait encore en avant des titres comme "Addict With A Pen" et "Isles Of The Flightless Birds". L’impasse n’est pas faite sur le second album Regional At Best puisque celui-ci comporte une partie des titres présents sur l’album ayant fait connaître Twenty One Pilots au monde entier, Vessel.
Justement, "Guns For Hands" et "Migraine" sont les deux prochains titres interprétés apportant un brin de folie supplémentaire dans la fosse. Il est d’ailleurs impressionnant d'observer que chaque personne du public répond à la moindre injonction du Tyler Joseph, qu’il s’agisse de sauter, lever les bras, crier, chanter, etc. Le frontman est hypnotisant et n’a pas besoin de parler à outrance entre les titres pour être familier avec son public, bien au contraire. Par ce côté hypnotique, il peut faire parfois penser à Till Lindemann (Rammstein), toute proportion gardée bien entendu.
Multi instrumentaliste, Tyler Joseph passe du piano au ukulélé et à la basse avec aisance. De son côté, Josh Dun délaisse sa batterie l’espace de quelques instants pour une trompette sur "We Don’t Believe What’s On TV". La force de Twenty One Pilots réside dans l’extrême diversité de la musique. Il est impossible d’apposer une étiquette ferme et définitive sur le combo. Entre chant et rap, mélodie pop et groove reggae, batterie rock et basse redondante, tout y passe !
Avec dix titres issus de Blurryface, on peut dire que ce dernier est énormément représenté ce soir mais c’est loin d’être un défaut tant cet album est, selon moi, un des meilleurs tout style confondu sorti en 2015. Et ce n’est pas l’enchaînement "The Judge" – "Lane Boy" – "Doubt" qui nous fera dire le contraire. Chemise hawaïenne sur le dos, lunette mouche trop grande et ukulélé à la main, Tyler Joseph tient la foule dans le creux de sa main et malgré une voix qui semble fatiguée par moment, ce concert se passe dans des conditions optimales.
Scéniquement, on sent que les Américains ont beaucoup plus de moyens. Le parterre de lumières présent est même beaucoup trop imposant pour la taille de la scène et de la salle. Mieux vaut ne pas être épileptique car les transitions sont parfois brutales et les LED puissantes.
La fin du spectacle approche mais l’enthousiasme du public ne faiblit pas d’un iota. Pas le titre le plus connu, c’est en tout cas avec bonheur que les premières notes de "The Run And Go" retentissent avant que "Tear In My Heart" – chanson de Tyler Joseph pour sa femme Jenna – ne viennent transformer la salle en piste de danse.
Mais le clou du spectacle surgit juste après "Tear In My Heart". Single ayant révélé Twenty One Pilots au monde entier, "Car Radio" est aussi un des meilleurs titres des Américains. Cette chanson déverse un torrent d’émotion et c’est la chair de poule, les larmes aux yeux et totalement vidés que nous finissons ce set. "Car Radio" commence avec Tyler Joseph au piano comme à l’habitude puis celui-ci se met à parcourir la scène de long en large lors d’une partie dansante avant de monter sur son piano, demander au public de bouger avec lui et d’éructer – presque au frontière du cri – un « And now I just sit in silence » qui renverse la foule. Il y a de ces morceaux qui sont des incontournables et qui à eux seuls font la singularité d’un groupe. "Car Radio" fait partie de cette catégorie.
Le groupe se retire quelques instants avant de revenir sur "Goner", titre terminant Blurryface et qui conjugué à "Car Radio" met l’audience à genou. Capable de rendre n’importe qui heureux, Twenty One Pilots sait aussi émouvoir et ce duo de chansons est définitivement la preuve que le groupe est capable de tout faire et de tout réussir. Ce concert s’achève sur "Trees" comme d’habitude qui voit le groupe terminer la chanson perché au milieu de la fosse sur des planches tapant sur des percussions. Après quasiment une heure trente de concert, Twenty One Pilots se retire mais ce n’est que partie remise puisqu’ils seront de retour dans quatre mois.
C’est un concert encore meilleur que celui de la Maroquinerie en 2014 auquel nous venons d’assister. La musique de Twenty One Pilots prend encore plus de sens en direct grâce au partage et à la communion qu’il existe entre les deux protagonistes qui sont de véritables amis et un public dévoué. Messieurs, merci beaucoup.
Setlist :
Heavydirtysoul
Stressed Out
Guns for Hands
Migraine
Polarize
House Of Gold (début du premier couplet)
We Don’t Believe What’s On TV
Can’ Help Falling In Love (Elvis Presley Cover)
The Judge
Lane Boy
Doubt
Holding On To You
Ride
The Run And Go
Tear In My Heart
Car Radio
Encore:
Goner
Trees
Merci à Live Nation pour les accréditations.
Photos : Amy Tassery