Bagdad Rodéo au New Morning (06.11.2012)

Bagdad Rodéo fait exploser le New Morning !

Ah, ce soir, c'est fête !  Bagdad Rodéo  en live, ça va forcément finir en grosse fiesta rock'n'roll, vu ce que le groupe envoie sur disque, il y a peu de chance que le combo nous invite à une soirée calme, sereine et austère, à deviser sur l'avenir des ours polaires dans les zones péri-urbaines du Groënland sud ou sur l'évolution des placements financiers à risques mineurs pour les retraités de la Cogema !

C'est donc au New Morning que je dois retrouver Ludo et sa bande, dans le cadre terriblement festif et hargneux de  Bagdad Rodéo , après avoir suivi avec plaisir l'épopée  (avec notamment l'excellent "Elevé à la peur") beaucoup plus sombre et réfléchie. Etrange d'ailleurs de voir ce combo investir  ce temple du jazz, à l'ambiance d'ordinaire feutrée, alors qu'on nous promet une ambiance assez éloignée de la méditation contemplative ou de la transe intérieure.

Bref, j'arrive sur place, mange (ou plutôt bouffe, vu les circonstances) un kebab trop tiède et trop gras debout sur un coin de trottoir tout en observant la faune locale s'attrouper devant la salle. Et là, mes amis (on ne se connaît pas, mais dans l'ignorance, j'ai désormais choisi de laisser sa chance à l'humain et donc, je suis disposé à vous offrir mon amour, espérant en retour un peu de votre chaleureuse affection), le choc, l'effroi, le sentiment d'égarement !

Le public ??? Comment dire ??? Il est très bien, le problème, c'est moi ! Moi, le bon gros hardos, le métalleux de base (pléonasme) je me retrouve perdu au milieu de tous ces jeunes (affreusement trop jeunes) gens aux looks si disparates, me faisant bien comprendre que, un nous sommes à Paris, deux, Bagdad Rodéo, c'est (pour certains) un truc assez branchouille (et la suite montrera bien que venir voir cette formation, ce fut un moment d'encanaillement périlleux pour quelques-uns). Je me sens formidablement peu à ma place et cherche désespérément mes repères habituels, vous savez, ces bonnes vieilles têtes qu'on croise à tous les concerts de hard et qui sont la preuve qu'on ne s'est pas trompé de salle en arrivant.

Et puis quelque part, trotte aussi dans ma tête un truc qui me chiffonne ou plus exactement qui m'inquiète un peu : ce concert va donner lieu à mon tout premier article pour La Grosse Radio, et voyez-vous, l'âge et l'expérience n'empêchent pas le trac et l'appréhension. Du coup, lorsque les lumières s'éteignent pour faire place à Cielo Drive, qui ouvre cette soirée, je suis déjà en train de me dire "Pourvu que ça soit bien, que je ne fasse pas mon aigri, blasé, ou tout simplement vieille branche pour mes débuts sur ce site !"


cielo drive

Alors comment dire, sans être inutilement blessant ?
Tentons le résumé très court. Cielo Drive, ce n'est pas pour moi !

Ils sont trop jeunes (et moi trop vieux) et leur mélange de stoner, grunge, psyché et que sais-je encore ne me touche pas du tout. Je n'essaierai même pas de savoir si c'est bon ou pas, je n'ai tout simplement pas les codes pour appréhender leur univers. Tout au plus j'ajouterai que le groupe évolue ce soir dans une formule électro acoustique qui n'est pas leur lot quotidien (c'est donc plutôt positif car courageux de leur part) et que le début du set à tout du concert galère puisque le chanteur casse une corde dès le premier morceau, ce qui l'obligera (faute de gratte de rechange) a poursuivre tout le gig sur une cinq cordes improvisée (pas terrible, ni pour le jeu, ni pour la confiance).

Pour planter l'ambiance, disons que quatre chemises à carreaux, des chansons sans réels refrains accrocheurs (encore une fois, c'est le style qui veut ça), il y a tout pour perdre en chemin l'habitué du bon gros rock qui tâche ! Ici, pas de sueur, pas de bière, pas d'huile, un ensemble trop propre pour moi (et, je dois le dire, un chant souffrant parfois de quelques faussetés, notamment dans les harmonies). Enfin, il faudra quand même que je revois le quatuor en configuration électrique, car les quelques riffs bien énervés me taquineront certainement mieux les oreilles une fois saturés et réchauffés par des lampes qui vont bien !

 

Bagdad Rodéo live  New Morning

Après quarante-cinq minutes de jeu, il est maintenant l'heure de passer aux choses sérieuses et d'accueillir ceux pour qui tout ce petit monde (le New Morning est assez copieusement garni sans être bondé) a fait le déplacement. Le quintet investit la scène impeccable, chaque musicien arborant la tenue "officielle" du groupe (tout de noir vêtu, une cravate blanche et un brassard de la même couleur siglé "B.R"), et attaque pied au plancher avec "Le nouveau millénaire", une compo extraite du second opus à paraitre en fin d'année. Car ce soir, Ludo va vite nous mettre au parfum, B.R va jouer une heure et demie (une première pour eux) et nous présenter très largement cette deuxième galette.

Le "rock burlesque" (appellation revendiquée) de la troupe, c'est avant tout une pure décharge d'adrénaline, parfaitement symbolisée par le jeu hyper agressif de  Christobal Sanchez Del Rodéo,  qui matraque sa Les Paul avec une aisance réjouissante. Enfin un guitariste qui n'est pas là pour épater la galerie mais pour servir les chansons, tant dans des rythmiques groovy (le duo basse-batterie est une mécanique bien huilée qui tourne sans baisse de régime) qu'en solo. Sur scène, c'est sourire sur tous les visages et dans la salle, cette attitude est hautement communicative et très vite apparaissent les premiers pogos, mais du genre festifs ("Sautons-nous dessus les uns les autres mes frères en signe d'allégresse !")

Après la première rafale de trois titres (dont une version furieuse de "Revolucion"), le pari est déjà gagné, l'ambiance est à la déconne (quand on a un bateleur de la trempe de  Ludo , rien d'étonnant à ce que le public aussi se laisse aller à de nombreuses vannes, même si l'assistance mange littéralement dans la main du chanteur !). La suite ? Un concert d'anthologie où l'intensité et la communion vont aller crescendo, prouvant qu'on peut manier l'humour pour faire du rock un véritable exutoire, tout en produisant une musique de qualité.

Les nouveaux titres se mêlent harmonieusement à ceux du premier album (qui permettent au public de donner de la voix, notamment sur des refrains tous plus énormes les uns que les autres), à commencer par le single "Quand je serai mort" qui est déjà un classique. Du coup, on a hâte de pouvoir se procurer ce deuxième disque dont chaque chanson passe le test du live avec succès ("Monsieur Delatourette", "J'aime pas les filles" ou encore "Le couple idéal").

Histoire de donner encore un peu plus de relief, le groupe se voit rejoint sur scène par  Shanka  (No One Is Innocent) le temps d'un morceau, puis par Isïa qui vient donner une réplique féminine au toujours très  théâtral Ludo (dont on sent qu'il est sincèrement touché par la chaleur de l'accueil réservé à sa formation).
 

 


 

Le set défile à grande vitesse jusqu'à un torride "Super connard". Le groupe quitte la scène, non sans que Houston (claviers, guitare) ne nous ait montré, puis déposé devant la batterie, un gros panneau indiquant "on revient de suite pour les rappels".

Et si vous ne savez pas ce que veut dire achever le travail en trois morceaux, cette soirée était un excellent prototype. D'abord une version in your face du "Jésus revient" (extrait de la B.O de "La vie est un long fleuve tranquille"). A bien y réfléchir, c'est un grand moment de n'importe quoi, mais justement, on n'est pas là pour réfléchir ! Arrive ensuite le nouveau titre disponible sur le net "Dis-moi papa" mais plus connu sous le sobriquet "Les bites" (C'est d'ailleurs là ma seule réserve sur ce groupe, c'est qu'il court le risque de devenir pour certains "le groupe qui dit des gros mots", alors qu'il vaut bien mieux que ce cliché réducteur). C'est sur cette chanson que Ludo choisit de descendre dans le public et de diviser la foule en quatre pour une bataille de chant impressionnante, pour faire s'assoir puis se relever tout le monde, ce moment de frénésie collective s'achevant dans un pogo ahurissant d'intensité (je vous rappelle que nous sommes au New Morning !). Cette monstrueuse fiesta s'achève sur un "Monde de merde" dévastateur, repris à pleins poumons par un auditoire qui jette ses dernières forces dans la bataille.

Merci, merci Bagdad Rodéo de nous avoir offert ce moment unique. Tant qu'on pourra encore vivre ce genre de folie partagée, de défouloir festif, alors, on ne sera pas totalement dans "Un monde de merde" !

Merci à Ludo pour l'invitation et l'accueil.

Set list Bagdad Rodéo :
Le nouveau millénaire
Révolucion
Areva mon amour
Le couple idéal
Quand je serai mort
L'homme à la cigarette
La ménagère
Monsieur Delatourette
La farandole
Bagdad Rodéo
Une longue histoire

 La balayette
La classe américaine
J'aime pas les filles
Super connard
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Jésus revient
Dis-moi papa (les bites)
Monde de merde



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