Le droit d'auteur photographique n'existe plus ? Mais si ! Je vous ai bien appâtés, tel l'auteur de Topito bien caché en moi. Il s'agit surtout aujourd'hui de faire un point sur ce qui nous concerne particulièrement : la photographie de concert.
Je m'appuierai ici sur les propos de Didier Félix, avocat spécialisé dans le secteur du divertissement et des industries créatives. Cet avocat illustre certains points du droit dans le milieu musical par des posts fort intéressants sur sa page Linkedin.
Déjà, pour rappel, dans le code de la propriété intellectuelle, les photographies sont considérées comme des œuvres de l’esprit. Et pour bénéficier d'une protection par le droit d'auteur, ce n'est pas automatique. Il faut répondre à un critère fort partial qu'est l'originalité de l'œuvre, ce qui conduit parfois à des litiges, comme l'explique Didier Félix avec l'exemple ci-dessous :
Une affaire récente a opposé un photographe à la ville de Rungis. Celle-ci avait reproduit sur une bâche installée sur un mur du théâtre municipal une photographie du spectacle de CAR/MEN de Chicos Mambo. Le photographe qui avait réalisé ce cliché a estimé que son droit d’auteur avait été violé. Il a assigné le théâtre en contrefaçon. Le tribunal, pour statuer sur ce point, se réfère aux trois étapes de la création d’une œuvre : la phase préparatoire prévue par l’auteur, la prise en elle-même du cliché et le tirage. Puis il se demande si des choix esthétiques ont été effectués à ces trois stades.
Dans ce cas précis, le tribunal a constaté que cette photographie a été prise sur le vif. C'est-à-dire que le photographe n'en avait pas la maîtrise complète, que ce soit pour la mise en scène, les décors, les costumes ou encore la lumière. La pose et l'expression n'ont pas été choisies par le photographe. Le tribunal a estimé qu'il n'y avait aucun parti pris esthétique quant à la sélection et au réglage du matériel. En somme, une photo random.
Le tribunal a donc rejeté la demande du photographe au titre qu'il ne démontrait pas avoir effectué "des choix permettant une composition arbitraire ni une approche personnelle caractéristique du droit d’auteur."
Alors, peut-on conclure que le droit d'auteur photographique n'existe plus ? Certainement pas. Cher.e.s ami.e.s photographes, pour vous référer concrètement à l'avis de la justice, il faut donc remplir des critères en termes artistiques et techniques. La justice a en tout cas tranché, les photographies de spectacles prises « sur le vif » ne sont pas protégées par le droit d’auteur.
Pour Didier Félix, me répondant, l'affaire est claire, il n'y a pas de protection par le droit d'auteur aux photos de concert : "sauf si exceptionnellement elles présentent un parti pris esthétique résultant, par exemple, d'un travail créatif au moment du tirage."
Au cas où, j'ai juste mis une photo prise par mes soins, pile au bon moment, lors du concert d'EXTREME au festival Guitare en Scène en 2017. J'ai eu du cul, j'ai cliqué, sur le vif.