Artistes vous êtes nombreux à nous questionner sur les relations entre La Grosse Radio et la Sacem, sur les droits éventuels que nos diffusions de vos oeuvres permettent, sur les déclarations, feuillets violets, etc.
Cet article relate la situation et la problématique des droits d'auteurs et du média webradio et nous remercions la Sacem qui a bien voulu s'expliquer très précisément, répondre à nos questions et qui nous a autorisé à vous faire part des informations suivantes.
HISTORIQUE RAPIDE / Sacem & webradios
Comme toujours, les pionniers essuient les plâtres, et au temps des premières webradios, le principe même de diffusion publique sans autorisation était violé puisque ce média n'avait pas d'autorisation des auteurs-compositeurs. Le média n'ayant pas encore été reconnu par les institutions, les éditeurs de webradios étaient considérés alors comme d'ignobles pirates sans scrupules.
Lorsque nous avons démarré cette aventure en 2003, nous avons fait partie de ceux qui se sont rapprochés des institutions afin que nos médias soient non seulement en règle mais en position de contribuer aux droits reversés aux Auteurs / Compositeurs diffusés. La Grosse Radio a cofondé une association de webradios "France Webradios" avec une dizaines de consoeurs dans le but de proposer un seul interlocuteurs aux organismes de rétributions des droits. C'est cet organisme (en la personne de son président de l'époque, Sébastien Petit, secondé par son vice-président, un certain Mallis) qui a obtenu la rédaction de contrats sur mesure pour les webradios par la Sacem, la SCPP et la SPPF, contrats toujours valables aujourd'hui.
Nous nous sommes toujours battus pour que les tous les artistes diffusés sur nos antennes soient rétribués en fonction de nos diffusions. La Sacem n'étant à l'époque pas capable de faire cette rétribution en fonction des listings, nous avons fini par accepter (en attendant mieux) ce contrat qui prévoyait que nos contributions forfaitaires seraient reverséesau prorata de ce qui était diffusé en FM.
Pour tout vous dire, parmi les webradios adhérentes, seule La Grosse Radio n'était pas d'accord pour signer ce contrat qui ne prévoyait pas cette rétribution "à l'oeuvre diffusée", Le jeu des votes nous a donc contraints à signer, pour avancer sur la légalisation de toutes les webradios signataires, avec en tête que ce point serait un de nos chevaux de bataille, plus tard.
Tableau des forfaits "webradios" en 2007
En septembre 2011, la Sacem nous annonce, à nous, La Grosse Radio (France Webradios n'existe alors plus pour des raisons qui n'ont rien à voir avec notre sujet), enfin, qu'elle s'était organisée pour proposer une rétribution des artistes en fonction des disques réellement diffusés.
Un gros travail que nous avons salué.
Il nous fallait donc, fournir chaque trimestre le listing exhaustif des diffusions de nos trois radios, soit, environs, quelques 80.000 lignes.
Nous nous sommes organisés nous aussi, pour automatiser cette tâche et avons fourni ces listings à la Sacem chaque trimestre, en nous promettant de nous tenir au courant auprès des artistes afin de savoir si les diffusions de leurs oeuvres sur nos webradios apparaissaient sur leurs relevés de comptes Sacem.
Une bonne année plus tard, certains artistes ont commencé à nous écrire pour se plaindre de ne pas voir traces de leurs diffusions chez nous sur leurs relevés, nous avons alors tenté d'en savoir plus en interrogeant d'autres artistes qui nous ont confirmés la même version.
Nous avons alors contacté la Sacem pour obtenir des éclaircissements et comprendre le pourquoi de ces manquements. Après trois relances écrites et un courrier, disons, déterminé, nous avons eu une réponse :
"Pour le moment, les collectes des web radios étant encore faibles et compte tenu que nous recevons peu de déclarations de diffusion des œuvres, dans le but de réduire les frais de gestion, les collectes web radios abondent la distribution des droits sur les œuvres diffusées sur les radios locales. De ce fait je vous confirme que nous recevons bien vos déclarations, mais que pour le moment elles ne sont pas utilisées pour le reversement des droits collectés."
A la lecture de ce paragraphe, nos lecteurs ressentiront certainement la même colère que celle qui s'est emparée de nous à cet instant.
Notre réponse a été très virulente tant et si bien que nous avons eu un long entretien téléphonique avec une responsable de la Sacem que nous remercions de nous avoir expliqué les tenants et aboutissants de cette problématique des webradios et droits d'auteurs, sans tabou ni langue de bois. Nous sommes alors en juin 2014.
SITUATION ACTUELLE
La situation est bien plus complexe qu'elle n'y parait au premier abord, et les difficultés ne viendraient pas forcément de là où on pourrait le croire.
La Sacem nous confirme qu'elle avait bien mis en place le système d'exploitation des listings de diffusion des webradios comme convenu mais qu'elle a dû rebrousser chemin pour les raisons que voici :
Il faut tout d'abord savoir que la cellule qui s'occupe des droits sur le net est un service d'une dizaine de personnes seulement qui a en charge les webradios, services d'écoutes web, plateformes diverses, etc pour ce qui concerne la gestion des contrats, listings, relances, recouvrement, facturation, surveillance, etc.
Quand on sait un peu le nombre d'acteurs du net que cela concerne, on peut admettre qu'il doit y avoir du boulot.
Vous me direz qu'avec tous ces acteurs, cela doit faire un paquet d'argent collecté et que donc la rétribution à la diffusion est possible. Voyons cela de plus près, par famille de webradios, nous prenons ici le parti de ne traiter que la problématique des webradios, pas des services d'écoutes à la demande comme Youtube ou Deezer.
1- LES WEBRADIOS DES GRANDS RESEAUX FM
Pour les webradios commerciales la redevance se calcule en pourcentage de leur chiffre d'affaire. La Sacem nous affirme que ces opérateurs jouent le jeu, d'une part en étant de gros contributeurs mais aussi en fournissant leurs listings et même avec des meta-données précieuses.
2- LES PLATEFORMES DE WEBRADIOS
Vous connaissez certainement la plus célèbre d'entre elles et peut-être même notre position à ce sujet, mais là n'est pas le propos. Cette plateforme étant belge, elle est donc sous contrat SABBAM (équivalent belge de la Sacem). Il y a des accords entre Sacem et SABAM bien sûr mais ce que récupère la Sacem est bien moins conséquent que si cette plateforme était française. Selon les accords il y a un échange entre ce que collecte l'un pour l'autre (tous supports confondus) on imagine donc que ce qui revient dans la part des webradios ne va pas bien loin et qu'en terme de gestion, les 7000 radios de cette plateforme sont une sacrée charge en terme de gestion de droits.
Il y a donc déjà par ici, non seulement un gros manque à gagner mais aussi un surplus de travail de gestion très conséquent.
3- LES WEBRADIOS INDEPENDANTES
Pour simplifier ce sont les webradios, qui, à l'instar de La Grosse Radio, sont des associations et doivent payer un forfait. forfait qui avait été négocié en 2007 par France Webradios (voir plus haut).
D'après la Sacem, il n'y aurait que très peu de webradios qui joueraient le jeu.
Certaines se contenteraient de payer le forfait sans fournir de listings, d'autres fourniraient des listings incomplets ou inexploitables, d'autres seraient hors-la-loi en n'étant pas sous contrat Sacem, les dernières seraient basées (réellement ou informatiquement) à l'étranger et donc hors d'atteinte.
Que les artistes qui nous font confiance soient rassurés, la Sacem cite La Grosse Radio comme un rare exemple de webradio qui respecte ses engagements contactuels. Ce n'est pas très modeste de le dire mais il est important que vous le sachiez.
Pour vous donner une idée, les webradios "rapportent" environ 70.000 euros par an en droits d'auteur alors que cette collecte devrait s'élever à plus de 350.000 euros annuels si tout le monde respectait le système, soit une perte de quelques 275.000 €.
Dès lors, on comprend mieux que lorsqu'on divise cette somme par le nombre de radios, le nombre d'auteurs / compositeurs, le nombre de titres joués et le nombre de diffusion, on arrive effectivement à des sommes pour le moins modestes...
Nous avons alors objecté que c'était à la Sacem de faire de procéder au recouvrement et à la mise en conformité de toutes les webradios, pour les artistes bien sûr mais aussi par esprit d'équité entre tous les éditeurs de webradios.
La Sacem nous répond alors qu'elle est bien d'accord sur ce dernier point mais qu'elle se retrouve confrontée à un paradoxe :
La Sacem a failli opter au début pour la fermeture pure et simple des services qui n'était pas en règle. Puis, après réflexion, en est arrivée à la conclusion suivante :
Etant donné que les artistes indés/autoproduits ne toucheraient (en l'état actuel des choses) que des broutilles, voire rien du tout pour la plupart, la Sacem considère qu'il serait encore plus handicapant que ces artistes soient privés, en plus, de ces diffusions (expositions médiatiques supplémentaires) ce qui serait une double-peine.
La Sacem en arrive donc à la conclusion qu'exiger des radios "sages" qu'elles envoient leurs listings qui, de toutes façons, ne pourront pas être exploités est une charge supplémentaire pour ces associations dont on peut, pour le moment se passer.
La Sacem nous a assuré que le but est toujours la rétribution au passage mais qu'en retournant le problème dans tous les sens c'est inextricable.
Nous avons alors objecté qu'il n'était quand même pas bien compliqué d'extraire des fichiers listings et de les fournir. Elle est d'accord mais une grosse majorité de radios se plaignent que si, c'est difficile, qu'ils n'ont pas les outils, que ça leur prend trop de temps, etc etc.
L'ARGENT QUE LES WEBRADIOS VERSENT SERT A QUOI ALORS ?
Exemple : Les sommes versées par La Grosse Radio pour son canal rock sont réparties aux artistes en fonction de ce qui est diffusé sur des médias FM ressemblants. Par exemple des radios locales rock qui diffusent comme nous, beaucoup d'indés et d'autproduits.
Nous sommes tous d'accord que ce système n'est pas satisfaisant mais qu'il est, en attendant de trouver mieux, un moindre mal.
L'APPEL DE LA GROSSE RADIO
Nous appelons donc tous les opérateurs de webradios associatives à prendre conscience du fait qu'ils batissent leurs programmes en très grande partie sur le travail des artistes. Qu'utiliser ce travail leur implique, au minimum, de payer les droits voisins et de fournir leurs listings exhaustifs de diffusion.
Ne pas accepter cela c'est non seulement spolier les artistes mais, en l'occurence, c'est rendre inutile le travail des opérateurs qui se comportent de manière éthique.
Il faut comprendre que tous les acteurs doivent travailler ensemble si l'on veut pouvoir sortir de cette situation intolérable qui fait que ce sont les resquilleurs qui prennent le dessus.
AVENIR
La Sacem travaille activement à la mise en place d'un nouveau portail internet (prévu pour 2015) à destination des diffuseurs afin de tenter de simplifier au mieux les déclarations et limiter au maximum les interventions humaines.
â–º CE QU'IL FAUT RETENIR
- La Sacem ne peut pas rétribuer "au titre diffusé" les artistes joués sur les webradios dès lors que ceux-ci ne sont pas déjà présents sur des programmes faisant déjà l’objet d’une répartition
- Les listings des webradios ne sont plus envoyés à la Sacem, s’ils le sont c’est une obligation contractuelle (webradios commerciales)
- Les attestions de diffusions (feuillet violet), n'ont donc plus cours depuis 2008
- Les opérateurs qui ne respectent pas ce système de droits d'auteur sont les responsables de cette situation
- La Grosse Radio continue de militer pour que les choses bougent et déclare publiquement qu'elle est tout à fait disposée à collaborer au chantier visant à atteindre une rémunération juste des artistes en fonction des titres réellement diffusés
Si vous êtes artiste et sociétaire de la Sacem et que vous avez des questions ou des réclamations à faire, merci d'adresser vos messages à : verification@Sacem.fr