Les trois dernières années n’ont pas été de tout repos pour Ingested. Après avoir dû faire face au départ du bassiste Brad Fuller en 2019, ce fut au tour du guitariste Sam Yates de mettre les voiles en début d’année. « Toutes les tensions ayant maintenant disparu », le combo mancunien réduit à un trio se sent dans la meilleure des configurations, lui permettant de travailler au meilleur de ses possibilités. Voyons donc si l’album Ashes Lie Still est le point d’orgue d'une carrière déjà impressionnante.
Signer chez Metal Blade Records est un réel tournant pour Ingested qui avait à cœur d’accoucher de l’album le plus abouti de tous ceux que le groupe a déjà réalisé. L’écriture de Ashes Lie Still par Sean Hynes a débuté en parallèle de la finalisation de la démo de Where Only Gods May Tread en pleine pandémie. A l’image des derniers changements de lineup, l’enregistrement de ce dernier opus s’est révélé compliqué.
Lyn Jeffs, vivant à proximité des studios de leur producteur de toujours Nico Beninato à Majorque, a pu facilement y enregistrer ses percussions, tandis qu’Hynes faisait de même chez lui, en Grande-Bretagne, pour les guitares. Tombé gravement malade lors de son séjour sur l’île espagnole, Evans a dû terminer ses sessions de voix lors de son retour à Manchester et celles de basse ont été assurées par Dominic Grimard (Ion Dissonance, The Last Felony).
Copyright Photo: @Tina Korhonen
Comme un symbole, la première piste qui lance les hostilités porte le même titre que l’album. Ecrites par Hynes, à l’instar de la majorité des autres pistes, les paroles sont principalement destinées à son père qui a disparu au début de la pandémie sans qu’il ait pu lui dire au revoir comme il l’aurait voulu. Cette piste est aussi le premier featuring de l’album. Apportant sa touche lyrique au refrain, le chant mélodique de l’Italienne Julia Frau amplifie la touche émotionnelle de cette piste. C’est en piochant dans les hauts et les bas de leur vie, leurs sentiments et leurs expériences personnelles que le trio a continué d’écrire et d’enregistrer cette galette.
"Echoes Of Hate", faisant la part belle aux blasts de Lyn Jeffs au sommet de son art, traite des répercussions et des conséquences d’une attaque physique de la part d’un membre supposé de sa propre famille. "Shadows In Time", avec son refrain entêtant et qui sera facilement repris en cœur par le pit, traite des personnes néfastes qui peuvent s’insinuer dans une vie ou dans une carrière et dont il ne faut pas hésiter à se libérer du carcan qu’elles imposent.
Pour finir, "All I’ve Lost" aborde le sujet de l’addiction, de ses effets et des nombreux dégâts qu’elle occasionne. Souhaitant depuis de nombreuses années travailler avec Ingested, le frontman de Trivium Matt K Heafy alterne le scream le plus agressif et le chant clair le plus envoutant. Sa performance vocale à su saisir tout le désespoir transmis par cette chanson.
Comme un point d’orgue et mis en valeur par son positionnement en plein milieu de la tracklist, le dernier feat (et pas des moindres) avec le charismatique Sven De Caluwé d’Aborted vient nous mettre littéralement un coup de poing en pleine face. Les deux frontmen passent du growl guttural au scream déchirant le tout avec une homogénéité impressionnante. Ils ne font qu’un sur cette piste qui, durant les lives, verra les plus furieux s’égosiller avec le répétitif mais entrainant « Fuck your Hollow Words ». Cette chanson, au même titre que "With Broken Wings", signe un retour aux racines du brutal death d’origine du combo natif de Manchester. N’en déplaise aux plus puristes d’entre nous.
Les trois guests apportent vraiment une plus-value à ce Ashes Lie Still car oui, il y a quelques points négatifs à relever. Selon le groupe : « Il y a toujours les éléments core d’Ingested avec les riffs groovy claquants, les percussions rapides et le chant guttural mais il y a aussi une dimension atmosphérique, des passages aériens et quelques passage brutaux et agressifs old school. ». En travaillant sur le côté plus émotionnel, Ingested a légèrement mis de côté la brutalité qui faisait sa renommée d’antan. Le rythme se veut plus mid-tempo, amplifiant le côté sombre et mélancolique mais perdant la rage et la violence des riffs et des blasts. "Tides of Glass" et "Scratch the Vein" en sont le parfait exemple, le côté death est plus évident que le brutal death.
Ashes Lie Still reste un bon album d’Ingested. Un peu moins percutant que les précédents mais d’une très grande efficacité. Les trois Britanniques ont su bien s’entourer pour ce premier album chez Metal Blade Records qui se veut dynamique, audacieux et inventif. Nous avons hâte de voir ce que va donner cette nouvelle version d’Ingested sur scène avec les six dates française prévues au printemps en compagnie de Cannibal Corpse, Dark Funeral et Stormruler !
Tracklist:
Ashes Lie Still (feat Julia Frau)
Shadows in Time
You’ll Never Learn
Tides Of Glass
From Hollow Words (feat Sven De Caluwé)
Sea of Stone
All I’ve Lost (feat Matthew K Heafy)
With Broken Wings
Echoes of Hate
Scratch the Vein
Rebirth (seulement versions physique, mixé par Christian Donaldson)
Ashes Lie Still est sorti le 4 novembre 2022 via Metal Blade Records.