Ritual : Blood of the West (EP) : Nytt Land au Far West

On ne présente plus Nytt Land, le groupe porté par le couple russe Anatoly et Natalia Pakhalenko depuis dix ans. Leurs titres folk atmosphériques aux inspirations nordiques et slaves sont bien connus des amateurs de musiques traditionnelles, de chants gutturaux, d'instruments et de contes folkloriques ancestraux. Cependant c'est un nouvel exercice de style surprenant qui nous attend dans Ritual : Blood of the West. Reprendre les titres les plus appréciés de leur dernier album : Ritual, sorti en 2021, les transposant cette fois aux sonorités du folklore du Grand Ouest américain.

Habitués aux sonorités folk nordiques, que ce soit avec les voix ou les instruments, le duo Nytt Land, dans la lignée d'Heilung ou de Wardruna, prend ici un virage radical, s'éloignant de sa Russie natale pour se promener sur les terres nord américaines du XIXème siècle. Incongru ? Pas tant que ça.

En effet, l'inspiration spirituelle du couple n'est plus à discuter, Baba Yaga (Natalia) et Shaman (Anatoly) s'inspirent de leur culture ancestrale et des mythes nordiques et russes, registre bien connu des amateurs des séries Vikings, Last Kingdom, et autres phénomènes bien à la mode de nos jours. Peut être cette saturation de la production du genre, peut être un climat politique actuel, ou bien juste l'envie d'exploiter techniquement d'autres folks, mais quoi de plus logique que de visiter une terre et une époque où la spiritualité et la culture des natifs amérindiens se heurtaient à celle de leurs oppresseurs conquérants. Largement de quoi rappeler la conquête chrétienne sur les peuplades païennes, fortes de cette culture folklorique si chère au coeur de Nytt Land.

C'est tout naturellement dans cet album que la guitare sèche et la domra (le cousin russe du banjo) remplacent le tagelharpa et Kravik lyre, et si les textes et les constructions restent les mêmes, dès les premières mesures de "Dark country : Ritual", on s'envole vers les grandes étendues désertes américaines, à une époque où le blues et les chants rituels indiens se cotoyaient. La guimbarde croassante et l'harmonica de "Song of U Gra" nous invitent aux feux de camps des cow boys et colons, tandis que les chants gutturaux ou la voix claire et grave de Baba Yaga évoque les cérémonies chamaniques, les rites initiatiques des Navajos ou des Apaches.