Découvrez notre sélection mensuelle des Gros Émergents Metal ! Notre rédaction y met à l’honneur quelques formations émergentes qui lui ont tapé dans l’œil (ou plutôt dans les oreilles). Nous espérons que cette mise en lumière permettra à des groupes passionnés et de qualité d’obtenir l’exposition qu’ils méritent, car ils sont la preuve de la richesse et la diversité de notre scène musicale. Bonnes découvertes !
Cathubodua – Interbellum (metal mélodique / symphonique / folk)
Cathubodua, groupe belge, tire son nom d'une déesse guerrière de la mythologie gauloise. Et il propose avec Interbellum (« entre-guerre ») un album concept qui « raconte le conte de la création et la destruction d’une déesse guerrière ».
La musique est à la fois extrêmement épique et mélodique, et embarque sans mal dans l’univers du quintette. Il s’appuie sur des mélodies d'inspiration celtique et se qualifie de metal symphonique, ce qui n'est pas forcément l’impression prédominante à l'écoute. Il y a certes des arrangements orchestraux et des chœurs épiques sur presque tous les morceaux, mais pas forcément très mis en avant. Les claviers sont en revanche bel et bien là, comme souvent dans ce genre musical.
La chanteuse Sara Vanderheyden officie rarement dans le genre lyrique, mais s’y aventure parfois pendant quelques instants. Sa voix n'en demeure pas moins puissante et tout à fait agile, puisqu'elle peut parfois aller sur un terrain un peu saturé et à d'autres moments offrir des sonorités avec plus de pureté. Le violoniste, Arvid Vermote, apporte, sur les passages où il est vraiment mis en avant, une réelle plus-value au groupe, et une touche plus folk.
Au global, le combo offre un disque tout à fait convaincant, entre folk, power, sympho et un zeste d’autres influences, avec des morceaux efficaces dont certains particulièrement entêtants (mention spéciale à « Foretelling »). Le disque est dans la lignée de son EP et son premier album, et ravira les fans de musique épique et mélodique. Il manque peut-être encore juste un peu de folie à Cathubodua pour réussir à affirmer pleinement sa singularité, mais les qualités sont bien là.
Chronique de Aude D
Sorcerer - Devotion (hardcore)
Le combo parisien, qui a à son actif deux EP et demi depuis 2021, développe sur son premier opus une version modernisée du hardcore, osant le mélange des genres. L’essence même du son de Sorcerer réside dans le hardcore, viscéral et organique, ce sentiment d’urgence qui perle dans le chant crié de Dominique, à la Converge, la rugosité des riffs et des rythmiques galopantes ("The Eternal Grief", "The Bell Jar"), ou les breakdowns meurtriers, à foison, mais le combo repousse les limites du genre en y incorporant pas mal de nuances et d’influences.
Les hurlements se parent parfois de mélodies, avec une force d’interprétation assez saisissante. L’instrumentale n’est pas de reste : le quatuor parisien fait verser l’ensemble dans le massif pour un effet parfois surprenant ("Badlands", "Someone Else’s Skin"). Les riffs à deux guitares s’imposent, hurlent, ralentissent ou se parent d’un groove irrésistible, portés par les superbes lignes de basse de Goulven. L’ambiance devient plus sombre voire mélancolique sur plusieurs titres avec un art pour les ralentissements frôlant le doom, et une teinte emo qui s’invite souvent.
La violence a beau être perceptible sur tout l’album, même scandée sur "In The Arms of Mortality" en featuring avec le vocaliste du groupe de crossover Guilt Trip, elle n’est pas assénée à coup de poings, il s’agit plus ici d’une rage intérieure, sourde, qui s’exprime dans les compositions assez nuancées. Avec en sus des titres mid-tempo, presque dansants et des refrains mémorables ("Fortress"), c’est une profusion de sonorités que proposent les ambitieux Sorcerer.
Si parfois le fil conducteur semble nous échapper, il faut cependant reconnaître la redoutable efficacité des huit titres de cet album, produit par l’excellent Amaury Sauvé. Pour ceux qui ont raté les dates récentes de Sorcerer qui vient de tourner avec des groupes comme Terror ou Worst Doubt, il n’y a plus qu’à attendre l’été pour découvrir Devotion en live au Hellfest, à l’Xtrem Fest et au Motocultor. On a hâte !
Chronique de Julie L
KYLE - Seize the Light (stoner)
Pour un premier album, Kyle transforme l’essai. Le groupe de stoner rock affirme qu’il s’agit de l’aboutissement de trois ans de travail. Kyle, c’est du sérieux ! Le quatuor bordelais est très loin des clichés rock “français”. Le son que le combo propose a une puissance digne des groupes américains. Les notes sont frappées très fort, le chant s’impose comme l’étage supérieur d’une fusée qui serait propulsée par un moteur hyper performant. Il y a du rock, du metal, du hardcore et punk dans les compositions de Kyle. Vous êtes prévenus : la musique pulse.
Ce qui saute aux oreilles est la forte présence de la paire basse / batterie. Laurent et Fred Girard sont de vrais tueurs. Pas si loin que cela de Motörhead pour la puissance. L'effet est jouissif car pas souvent utilisé dans la musique aux guitares saturées. La voix de Laurent existe en plusieurs états, celle qui vous raconte une histoire, celle qui vous excite, et celle qui entre dans une transe hurlante. Le son des guitares de David Passicos et Antoine Leroux est particulièrement réussi, les riffs sont divers et se fondent dans ce paysage musical très particulier.
Avec Kyle, l’expérience transpire à l’écoute des compositions. Il n’est pas simple de ne pas lasser, il est très difficile de faire simple (Metallica) et il est vraiment très compliqué de ne pas tomber dans le déjà entendu. Simple, efficace et original. La recette de Kyle éclate bien les oreilles. Écoutez !
Chronique de Thomas Bertrand
Folterkammer - Der Lederpredigt (black metal opératique)
Le black metal symphonique est un sous-genre bien connu qui fonctionne souvent parfaitement. Le combo allemand Folterkammer pousse le concept encore plus loin, puisqu'il propose carrément du black metal opératique. Et, tuons le suspense tout de suite, le résultat est absolument saisissant.
La voix de la chanteuse Andromeda Anarchia est complètement bluffante. Sa voix maîtrise parfaitement le chant opératique et impressionne en tous points. Mais dans le même temps elle peut passer sur un son totalement saturé pour du chant black ou growlé, malsain à souhait, tout aussi saisissant. Comme elle chante en allemand, Folterkammer peut sonner comme l'improbable chaînon manquant entre les opéras de Mozart et Der Weg.
L'ambiance instrumentale est agressive et malsaine à souhait. Il faut dire que le nom du groupe signifie en allemand "chambre de torture" , ce qui donne le ton de sa musique. Le seul reproche qu'on pourrait faire, c'est que les instruments ne sont pas vraiment mis en avant, ils ont vraiment un rôle d'accompagnement de la voix et guère plus.
Il n'empêche que le résultat est ultra original et tient la route d'un bout à l'autre du disque. Il faut dire que le combo comprend Zachary Ezrin, guitariste d'Imperial Triomphant, autre ovni musical du black avant-garde. Et le groupe a le bon goût de conclure ce deuxième disque par une reprise du Velvet Underground, "Venus in Furs" . Cette version est fabuleuse, elle garde quelque chose de l'atmosphère originale tout en créant une ambiance pesante, et reste à sa façon fidèle tout en démontrant les capacités d'appropriation du combo. Folterkammer séduit de la première à la dernière minute de Die Lederpredigt. Un groupe unique à découvrir d'urgence.
Chronique de Aude D
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