A l’occasion du Hellfest 2022, La Grosse Radio s’est entretenue avec Survival Zero, groupe émergent mélangeant diverses influences. On y parle de leur premier album, The Ascension, ainsi que de ce qui les a poussé à créer le groupe. Rencontre touchante avec le combo originaire de Troyes.
Bonjour à vous deux, pouvez-vous présenter Survival Zero pour commencer ?
Pierre : Je m'appelle Pierre, je suis le chanteur du groupe et j'ai été à l'initiative du projet avec les premières idées de compo. J’ai rassemblé mais mes amis dont Régis qui est avec nous ici et qui est guitariste. Le groupe a été créé en 2017 avec la base des idées que j'ai amenées et qu'on a triturées tous ensemble sans révéler notre nom. En préparant notre premier album The Ascension, qui est sorti en avril 2020, chez M&O et Season of Mist. Il est sorti pendant le confinement, donc ça été un peu un crève-cœur pour nous, mais malgré tout après un hiatus forcé, on est au Hellfest. On va même pouvoir jouer notre musique à l'espace VIP ce soir donc pour nous c'est une belle revanche.
Régis : Nos copains nous définissent comme des fans de TOOL qui jouent du Pantera. On joue du groove metal mais on essaie de mélanger plusieurs influences. On vient tous d’univers très différent, du black metal ou du hardcore par exemple. On a beaucoup d'influences que l'on essaie de réunir et de mixer pour en faire quelque chose d'intéressant et d’original. On essaie de se déclassifier d'un genre en particulier.
Et qu’est-ce qui inspire vos albums, hormis Pantera ?
Régis : Alors si vous avez une heure et demie, on peut citer à peu près toutes les influences que l'on a (rires).
Pierre : Il y a une réponse que j’aime bien donner à cette question. Survival Zero vient de la Champagne, et le champagne c'est un vin d'assemblage. On ne fait pas du pinard en l'occurrence, mais on fait du metal. Alors on essaie de faire un assemblage de tout ce qu’il y a de mieux selon nos critères dans le metal pour faire notre musique. Il faut que ça groove et que tu aies envie de te décrocher la nuque sur notre musique. En même temps, il y a un côté très mélancolique et très sombre que l’on va chercher du côté du black metal et du post hardcore, deux styles que l'on affectionne particulièrement.
Régis : Il faut qu’il y ait des ambiances, des univers à chaque morceau et des textes assez forts. Pierre pourra en parler après car c'est lui qui les écrit.
Et le chant est en quelle langue ?
Pierre : Il est en anglais et par rapport à ce qu’expliquait Régis, le premier album est un concept album mais pas dans le sens où il raconte une histoire. C'est souvent ce qu'on entend lorsque l’on parle de concept-album aujourd’hui. Néanmoins, dans les années 70, pour les groupes de rock prog, un concept album est un opus ou tu as des des figures rythmiques qui reviennent d'un morceau à l'autre, ou des thématiques qui reviennent sans histoire forcément. C’est cette approche que nous avons. Nous nous appelons Survival Zero et il y a une idée de survie dans notre premier album, survivre à une dépression. Il se trouve que j'ai lancé l'initiative du groupe après avoir guéri d'une dépression. J'ai été malade plusieurs années, je faisais déjà de la musique auparavant mais j'avais arrêté quand j'étais malade. L'idée de refaire de la musique au terme de cette étape de guérison, avec des copains de longue date, ça a achevé mon processus de guérison. Emmener les copains là-dedans est aujourd'hui une satisfaction.
Sortir du positif de tout cela doit être une sacré fierté ! D’ailleurs si vous deviez décrire le groupe en un ou deux mots, qu’est-ce que ça serait et surtout pourquoi ?
Régis : La bagarre !!
Pierre : (rires), c’est vrai que lorsque l’on compose les passages avec les gros riffs, on dit toujours qu’il faut que cela soit la bagarre. Cela donne un petit peu le ton en terme de niveau intellectuel dans le groupe.
C’est plutôt du côté du metalcore et du hardcore que l'on a tendance à utiliser le terme bagarre.
Régis : On a beaucoup d’influences différentes mais on est beaucoup à affectionner le hardcore particulièrement, et cela ne se ressent pas forcément. Toutefois, il faut qu'il y ait un moment de bagarre dans la chanson.
Pierre : Pour revenir à la question de base, “Percutant” serait le premier mot et “sombre” serait le second.
Régis : D’ailleurs, vu qu’il faut toujours mettre un style en dessous d'une affiche, nous on se décrit comme “striking metal, dark universe”. C’est toujours cette idée de mélange qui est là et c’est cool.
Le nom du groupe, Survival Zero, vient de la dépression que tu as vécue Pierre ?
Pierre : La réflexion autour du nom est partie d’images que j’avais en tête concernant la maladie de la dépression, je la compare à un virus dans pas mal de nos textes. Un virus, quand il y a une une épidémie qui commence, on part toujours d'un patient zéro. Donc je me suis dis que l'inverse, à savoir le premier guéri, serait le survivant zéro. En anglais cela donne survivor zero. En cogitant un peu, on s’est dit qu’avoir un nom de groupe qui n’évoque qu’une seule personne, un survivant, ce n'était pas pertinent parce qu'on est cinq dans le groupe. Alors nous sommes plutôt partis sur la survie et c’est ce qui a donné Survival Zero.
Dans votre album, The Ascension, quel est votre titre favori et pourquoi ?
Régis : C’est difficile comme question. Je suis partagé…
Allez, vous avez le droit d’en choisir deux chacun !
Régis : L’album est une continuité donc il y a beaucoup de choses et il passe par des phases différentes. Sinon je choisirais “The Otherverse”, il est massif et clôt l'album plutôt bien. Puis “Eternal Return”, qui se démarque des autres avec son énergie très positive. Il apporte vraiment cette touche de diversité que l’on évoquait tout à l’heure et c’est pour cela que je l’aime beaucoup.
Pierre : Pour compléter ce que vient de dire Régis, c’est vrai que lorsqu’on fait un album, on prend notre temps. On essaie de le concevoir comme un tout, pas simplement comme une succession de chansons. Il faut que cela passe par des moments de répit, des moments un peu plus épiques, etc. C'est vrai que “Eternal Return”, c'est un moment dans l'album où le positif revient un peu dans tout le flot de choses sombres caractérisant l'album. Cet opus se clôture par avec “Foundation” et “The Otherverse”, qui sont des moments un peu plus épiques. Dans le concept de l’album, c'est le moment de faire un choix et de se dire que la dépression est une maladie et que l’on peut en guérir. Il faut poser des mots là-dessus et il n’est pas trop tard pour continuer sa vie. Avec ‘Foundation”, il y a une émotion qui me prend à chaque fois que j'en parle ou à chaque fois que je la joue. Je n’ai pas eu des idées de suicide, mais j'ai eu dans mon entourage des gens qui ont pu y penser. Or, cette chanson parle du fait de ne jamais oublier ce qui constitue nos fondations pour aller de l'avant. Désolé je suis un peu pris par l’émotion rien que d’en parler. Donc j’aime beaucoup ce morceau, d'autant plus qu’il a une vibe très Gojira, qui est une grosse influence pour nous également. Sinon je choisirai “Glorious Nemesis” qui est une performance en live que j'aime bien faire. Il s’agit d’un morceau très rapide avec un gros débit de voix. Il est bagarre mais avec un passage au milieu très pesant et très ambiant.
C’est très important de comprendre l'histoire qu'il y a derrière chaque chanson, on y apporte une écoute différente. C’est bien d’écouter un album mais de faire des recherches en amont ou par la suite histoire de mieux le cerner et d'être parfois encore plus touché.
Pierre : Je suis entièrement d’accord. J’adore écouter un album de façon neutre au début, vraiment que pour la musique, quelle que soit la langue chantée. Après je fais une deuxième écoute active, si vraiment j'ai adhéré à la première écoute et là tu creuses puis il se passe des choses quoi. Quand je reviens à nos morceaux, notamment “Glorious Nemesis”, c’est un morceau qui parle vraiment de la colère. Quand j'ai été malade, la première émotion que j'ai à nouveau ressentie quand j'ai commencé à guérir, c'était de la colère. Et le problème c'est que si tu t'enfonces dedans, tu n’en sors jamais. C'est pour ça que c'est intense de jouer ce morceau là.
D’ailleurs, quelle est la suite des projets envisagés pour Survival Zero ?
Régis : On essaye d’abord de faire vivre l'album en live, parce qu’on a été coupé dans notre élan de façon assez importante. Nous avons quelques dates de prévues et c'est bien reparti. On essaie de faire ce que l'on peut pour refaire d’autres concerts même si l'album a déjà deux ans. On commence aussi à réfléchir au prochain album. On est déjà dessus pour pouvoir continuer à avancer et avoir une dynamique. On amasse des riffs et des concepts et on va avoir des choses à faire et des choses à dire. On regroupe toutes ces informations que l’on finira par coucher sur un album. Par contre, on n'est pas pressé, on y va à notre rythme, car l’idée c'est de se faire plaisir.
Quelles sont les prochaines dates de prévues pour Survival Zero ?
Pierre : Nous venons de Troyes et nous allons jouer au Tramfest le 3 septembre prochain, un festival organisé par TRAM, une association locale. Pour la suite, ça ne sera pas avant 2023. Sinon, nous avons des clips dans les tuyaux.
La Grosse Radio relaiera ça avec grand plaisir alors ! Nous avons à cœur de mettre en avant le travail des groupes locaux et émergents.
Régis : Merci beaucoup ! Nous avons déjà pu être relayés par vous en plus, j’écoute souvent la webradio et une fois je me suis dis “merde mais c’est moi là !”.
Nous avons d’ailleurs rencontré Insolvency, qui viennent de la même ville que vous d’ailleurs, et on leur demandait comment il se sentait justement à Troyes, ville qui bouge beaucoup au niveau de la scène metal. On vous pose donc cette même question : Comment est-ce que vous vous sentez dans la scène troyenne ?
Régis : On s’y sent particulièrement bien. Les choses commencent à bouger un peu au niveau de la ville, car le metal n’était pas très bien vu par les institutions, simplement car ils ne connaissaient pas. A présent, ils se rendent compte que c'est la seule scène qui bouge vraiment, on a beaucoup de musiciens avec du talent à Troyes. Il y en a d’ailleurs qui sont beaucoup plus talentueux que nous ! Il y a une dynamique pour faire quelque chose de bien. La seule chose qu’il manque pour le moment, c'est un lieu pratique pour faire des concerts. Mais bon, c'est un peu la même chose partout.
Pierre : J'ai fait un petit calcul rapide avant le Hellfest, mais sur l'affiche du festival en terme de Troyens, il y a le batteur de Laura Cox, l’un des guitaristes de Disconnected, le claviériste de Seth, groupe de black, Northern Light qui jouait au VIP également et Sleazyz qui sont des copains. Puis il faut rajouter à cela des personnes qui sont dans des médias ou des bénévoles qui travaillent ici. D’ailleurs, je travaille moi-même sur la Mainstage 1 depuis 10 ans cette année. Il y a donc plus d’une trentaine de Troyens, présents au Hellfest qui vont présenter leur musique ou œuvrer à la dynamique du festival. C’est fou pour une petite ville de 75000 habitants. J'ai connu une période où on avait un seul endroit pour jouer ! C'était la cave un peu miteuse dans un bar. Tandis qu’aujourd’hui, ça se développe et on a une salle!
Selon vous qu’est-ce qu’il ne fallait pas rater durant ce Hellfest ?
Régis : On a pris une grosse claque avec Hangman’s Chair, il faut dire que l’on est de gros fans dans le groupe. Benighted aussi, c’était la folie pour tout le monde ! Il y a des copains qui sont sortis du concert en étant tout courbaturés.
Pierre : J’ai pris une grosse claque avec Leprous et Gojira qui a mis un cran au dessus de 2019. J’ai pleuré devant Korn, c’était magique, Nine Inch Nail qui était hypnotisant puis Jerry Cantrell qui nous a donné une bonne leçon !
Régis : Le meilleur concert pour moi c’était Envy, que j’adore depuis toujours et j’ai failli pleurer également.
Bon et si nous vous laissions le mot de la fin ?
Pierre : On peut déjà remercier toutes les personnes qui nous permettent d’être ici pour défendre le groupe ainsi que tous les médias et l’espace presse du festival. Puis je vais appeler de nos vœux à tous de pouvoir être prochainement sur la programmation officielle du Hellfest, le mot de la fin ça peut être un vœu (rires).
Régis : Et d’autres scènes tout au long de l’année, jouer avec des copains et rencontrer des gens, c’est ce qu’il y a de plus enrichissant !
Crédits photo Survival Zero : Studio OG