Jeudi 17 août, Carhaix
Il fait beau, il fait chaud pour ce premier jour du Motocultor Festival, qui a quitté Saint Nolff cette année, destination Carhaix en centre Bretagne, sur la plaine de Kerampuilh. Rendez-vous pour un jeudi plutôt rock, mais marqué par de bons rouleaux compresseurs.
On attend avec impatience de découvrir le nouveau site du Motocultor, (site connu pour accueillir déjà, entre autres, les Vieilles Charrues), mais auparavant il faut se soumettre à une très longue attente à la fouille et à la pose des bracelets, pour pouvoir accéder au festival. De quoi s’interroger, déjà, sur l’organisation et la logistique du festival qui en est pourtant à sa quatorzième édition, les problèmes d’accès et les files d’attente à rallonge étant récurrents ces dernières années.
Heureusement le soleil est au beau fixe, comme l’humeur générale, et le site se révèle vaste et agréable : la circulation est aisée, les zones d’ombre sont nombreuses, et les stands de restauration considérables et très variés. Place à la musique avec une affiche de qualité pour ce premier jour qui réserve, déjà, de très bonnes surprises.
Nos concerts du jeudi 17 août :
Komodor – The Psychotic Monks – A.A. Williams – Worst Doubt – Royal Republic – Ugly Kid Joe – Hällas – Wolfmother – Zeal & Ardor – Kadavar – Coroner – Hatebreed – Steve’n’Seagulls – Long Distance Calling
Komodor
Bruce Dickinscène, 15h45
On attaque ce premier jour de Motocultor avec le rock états-unien de Komodor. OK, en vrai ils sont douarnenistes, donc quasiment à la maison maintenant que le festival s’est délocalisé dans le Finistère, département de Douarnenez, mais leur son pourrait largement nous transporter au pays de l'oncle Sam ! Une batterie, une basse, trois guitares et plein de pantalons patte d'eph (sans oublier la veste à franges) : c’est un voyage dans le temps que Komodor nous propose, visuel comme musical !
Très influencé classic rock, voire heavy rock américain, l’inspiration du groupe est aussi à chercher du côté des Who. Trois micros sont disposés sur scène, et si Goudzou (basse) et Slyde (guitare) se partagent l’essentiel des leads avec leurs timbres très distincts, une grande partie du chant est très souvent assurée en duo, voire trio. Refrains comme couplets, nombreux sont les passages copieusement accompagnés de chœurs énergiques.
Après trois premiers titres dynamiques, parmi lesquels on retrouve “Nasty Habits” issu de l’album éponyme, “Mamacita” vient ralentir le tempo. Avec sa rythmique aux mailloches et ses accords bien bluesy ponctuant les phrases musicales, il apporte un moment plus soft avant le reste du set. Dès “Believe It” en effet, les riffs énergiques sont de retour, de même que les bonnes rythmiques qui font taper du pied et hocher les têtes.
Komodor propose dans la suite de la setlist une invitation à rejoindre le groupe (“Join The Band”) puis à nous faire lessiver le cerveau (“Washing Machine Man”), avant de lancer un “Ramblin’ Rose” en clotûre du set, standard des MC5. L'occasion de quelques dernières postures toutes guitares levées et de derniers solos endiablés, disputés entre Ronnie (guitare) et Slyde. Ce dernier finit même au sein de la fosse de la Bruce Dickinscène, possiblement pour le premier bain de foule du Motocultor. Si le rock du combo reste somme toute très classique, les Bretons ont fourni un bon set d’ouverture.
The Psychotic Monks
Bruce Dickinscène, 17h25
Boucles électro, accords de guitare répétés et phrasés incantatoires. L’introduction tout en crescendo du quatuor révèle un style post-punk psychédélique drapé de touches noise. Les guitares d’Artie et Martin sont chaotiques, versant en fonction des envies soit dans les gros riffs assassins, soit dans les expérimentations sonores. La batterie apporte le côté martial des rythmiques techno, largement présentes depuis la sortie du dernier album Pink Colour Surgery, tandis que Paul assure l’essentiel des parties de synthétiseur, mais parfois aussi la basse, et même une trompette pour un moment de transe particulièrement psychédélique, sur une partie de batterie au toucher jazzy. Clairement, la musique proposée par le quatuor parisien est très singulière sinon unique, et l’intensité du spectacle fait des ravages au sein du public du Motocultor.
En plus d’assurer le show par les compositions, les Psychotic Monks ne sont pas en reste au niveau du show. D’emblée, il faut reconnaître que la dualité de la formation saute aux yeux, avec d’un côté Clément et Paul en arrière plan, sobrement habillés en noir et blanc. De l’autre, Martin et Artie crèvent l’écran (enfin, la scène) au premier plan ! Les deux guitaristes androgynes (depuis son coming-out, Artie est officiellement une femme) arborent robe léopard, maquillage et bas-résille troués. Martin s’adonne régulièrement à des moments de danse en transe, et s’autorise une descente dans le pit.
Chacun donne de la voix en fonction des morceaux, il n'y a aucun chanteur attitré. Dans l’esprit du groupe, chacun chante sur ses textes. Il en ressort des compositions variées, bien que toutes au fond nous entraînent dans cet univers barré, entre rythmiques répétées, expérimentations sonores et sommets d’intensité. Adepte des progressions, nombreuses avec leurs compositions fleuves, The Psychotic Monks nous envoie régulièrement dans des sommets de décadence et d'explosions sonores, où tous les instruments et les lignes de chant instables semblent s'accumuler pour concourir au malaise. Une claque, si déroutante et impressionnante que le set semble atteindre bien trop vite son terme !
A.A.Williams
Massey Ferguscène, 18h20
Sur la Massey Ferguscène, on installe une quantité impressionnante d’enceintes et d’amplis au milieu desquels trône un panneau orné de la lettre « A. ». Il s’agit du seul élément de décor de l’artiste anglaise A.A.Williams, qui investit la scène vêtue de noir, comme les trois musiciens qui l’accompagnent. Quel chemin parcouru en peu de temps, depuis les tournées avec Cult of Luna ou Mono en 2019 jusqu’à la récente date en tête d’affiche au Backstage à Paris ! Un discret lightshow met en valeur les compositions dark rock lentes et intenses de la multi-instrumentiste, ce soir à la guitare et au chant.
Sur des morceaux issus en majorité du dernier opus As The Moon Rests (2022), les moments délicats laissent place à des passages bien plus lourds et intenses sur lesquels la basse (sans tête), la guitare et la batterie restent bien audibles, tout en laissant suffisamment d’espace à A.A.Williams pour développer son chant plein d’émotion et de mélancolie. D’élégantes parties au clavier sont assurées par le second guitariste, qui partage les chœurs avec le bassiste Thomas Williams. Le vibrato de la vocaliste semble envoûter le public de la Massey qui se laisse embarquer par la prestation sobre et séduisante, le temps d’un set court mais hors du temps.
Setlist A.A. Williams :
For Nothing
Evaporate
Murmurs
Control
Melt
Love and Pain
Golden
As the Moon Rests
Worst Doubt
Supositor Stage - 18h20
Il fait déjà chaud lorsque le groupe rennais (pardon, on voulait dire originaire de Paris) Worst Doubt prend possession de la Supositor Stage. Bien qu’Hugo se soit fait légèrement attendre, Antoine, et son talent de one man show ont su faire patienter le public du Motocultor. Et c’est d’entrée que la foudre s’abat avec déjà un nuage de poussière qui s’élève dès les premiers riffs. Hugo demandera ainsi à de très nombreuses reprises au public venu nombreux les voir de se “péter la gueule”.
Les titres s’enchaînent, notamment ceux issus du dernier album Extinction qui restent toujours aussi efficaces en live. On apprécie également le son plus que convenable sur une scène qui ne nous réservera pas forcément que de belles surprises à ce niveau là. Worst Doubt délivre donc une prestation solide sans aucun temps mort avec un set court mais musclé de trente minutes qui a su convaincre.
On regrette cependant que des faits d'agressions sexuelles se soient déroulés lors du set des Parisiens. En effet, le groupe lui-même a partagé sur sa page Facebook un témoignage d’une festivalière mentionnant le comportement irresponsable et infâme de certains festivaliers. Une prise de parole au sein de laquelle le groupe rappelle que ce genre de gestes n’a pas sa place en concert ni nulle part ailleurs. Une prise de position du groupe qu’on apprécie pleinement et dont certains pourraient s’inspirer.
Royal Republic
Dave Mustage, 19h30
Royal Republic a beau officier dans un style éloigné du metal, beaucoup de connaisseurs sont aux premiers rangs, ainsi que de nombreux curieux probablement alléchés par la réputation de bêtes de scène du quatuor suédois. Avec quelques minutes de retard, la sono fait retentir du Haendel aux arrangements étrangement electro. Les quatre musiciens, en pantalon noir et blouson de cuir, montent sur scène et entament «Fireman & Dancer». L'énergie très rock'n'roll, un peu garage, se fait déjà sentir, même si la voix du chanteur Adam Grahn est sous-mixée les premières minutes. Il ne se démonte pas pour autant et profite des passages instrumentaux pour s’agiter, tirer la langue au public, et parler en permanence à grand renfort d’humour absurde. Les autres musiciens ne sont pas en reste, l’air tout aussi fous que lui, le batteur Per Andreasson jouant parfois debout.
Le frontman harangue le public qui chante, danse et saute allègrement partout, applaudissant parfois dès les premières mesures d’un morceau. Un premier pogo central éclate rapidement, un deuxième excentré à mi-concert, et même un wall of death. Le son est bon à l'arrière, plus compliqué devant la scène sur la première moitié du set, notamment pour les titres les plus lourds, avec trop de vrombissement de basse à tel point qu'on a parfois du mal à entendre les discours du chanteur.
Si le groupe joue globalement un rock à grosses guitares un peu garage et très dansant, on ne peut plus efficace, il sait varier ses morceaux. Ainsi, «Stop Movin’» commence au vocodeur avant de radicalement s'énerver. Le bassiste Jonas Almén a troqué son instrument contre un keytar, ce mélange de guitare et de clavier dont il tire d'étranges sons. Le chanteur profite d'un pont pour aller taper sur les cymbales d’Andreasson, avant de revenir sur le devant de la scène lancer sa baguette à la foule. Mais il sait aussi se rapprocher du public du Motocultor. "Ceci est ma guitare heavy metal, assure-t-il ainsi en brandissant son instrument. Elle n'est bonne qu'à une chose : le free jazz. Vous voulez voir ce qu'elle peut faire dans un quartette de pop suédois ?". Et d'enchaîner : "Nous sommes probablement le groupe de musique le plus éclectique. Nous désorientons les gens depuis plus d'une décennie. Même moi je ne sais pas ce que nous sommes, et j’aime ça".
C'est un peu excessif mais l'humour absurde fait mouche, et permet de lancer "le morceau le plus proche que nous ayons du heavy metal", à savoir «Back From The Dead». Un titre basique au premier abord mais qui tabasse bien, avec presque des passages jazzy dans la rythmique. Alors que les guitaristes (Grahn et Hannes Irengård) assurent depuis le début du set des riffs classiques du metal, c’est l’occasion pour le chanteur d’assurer qu'il "aime le heavy metal mais préfère l'argent", et que "c'est ainsi que le groupe aurait sonné s'il avait suivi son cœur".
Comme souvent, le groupe offre un passage acoustique - ce qui permet au chanteur de nous expliquer que cette fois, ce n'est pas sa guitare à heavy metal qu’il tient mais sa guitare acoustique, "la plus dangereuse arme sexuelle sur Terre" - suivie du début de “Wonderwall” histoire d'appuyer son propos. "Nous sommes formés pour ça, ne le refaites qu’avec précaution”. Et tous les quatre démarrent en chœur "Boomerang", quasiment a capella, avec donc seulement la guitare de Grahn et l'harmonica d’Irengård, pour un effet country assez désuet.
Le set électrique reprend ensuite, le chanteur continuant de blaguer, présentant par exemple «Anna Leigh» comme un exemple de son de guitare épuré - elle commence avec un clavier très typé 80 et inclut du keytar et une voix très vocodée – pour demander à la fin si c'était heavy. Le morceau est d'ailleurs suffisamment kitsch pour qu'une partie du public du Motocultor lance une chenille.
Le temps d’annoncer que le groupe va repartir en studio, et le concert finit sur un des classiques du groupe, «Baby», avant lequel le chanteur assure que le guitariste a la responsabilité de finir le set avec style - il s'exécute avec des mouvements de danse suivis d'un grand écart. Le public clôture sur une nouvelle chenille, à l'image d'un groupe décalé, festif, plutôt éclectique, mais qui ne se prend pas au sérieux.
Setlist
Music for the Royal Fireworks (Haendel, enregistrement)
Fireman & Dancer
RATA-TATA
Stop Movin'
Full Steam Spacemachine
Back from the Dead
Boomerang
When I See You Dance With Another
Tommy-Gun
Anna-Leigh
Battery (reprise de Metallica)
Baby
Ugly Kid Joe
Bruce Dickinscène, 19h10
La tente Bruce Dickinscène est déjà remplie, bien avant le show des Californiens qui ont marqué la scène hard rock / heavy metal du début des années 90. Et c’est bien un Ugly Kid Joe des grands soirs qui va offrir à Carhaix un set à 100 à l’heure. Le groupe fait preuve d’une énergie impressionnante et les interactions avec le parterre se multiplient. Le patron Whitfield Crane, en très grande forme, fait le show et ne lâche pas le public une seule seconde. Il fait même monter sur scène la quinzaine de photographes présents dans le pit photo sur “Neighbor”. Si par moments il semble gêné par quelques problèmes techniques, cela ne se perçoit pas du côté de la fosse. La prestation vocale est juste, dynamique, et l’on retrouve sans peine toute l’impertinence et l’énergie qui caractérisent le frontman depuis plus de trente ans.
Seul titre récent, “That Ain’t Livin’” se glisse sans peine dans la setlist composée de classiques qui emportent la tente tout entière dans un état fiévreux (“Bad Seed”, “Goddam Devil”). Les musiciens, très en phase et complètement dans leur rôle, se montrent très complices, alors que seuls le vocaliste et le talentueux guitariste Klaus Eichstadt sont présents depuis les années 90. Le guitariste britannique Chris Catalyst délivre avec énergie, humour (et une tenue fruitée) des parties rythmiques impeccables, et assure également les chœurs, tout comme le batteur Zac Morris, très à l’aise dans son rôle polyvalent.
Dans la fosse l’ambiance est enflammée, slams et pogos s’enchaînent, souvent lancés par le maître de cérémonie qui sollicite l’auditoire pour taper des mains ou donner de la voix. C’est vu et revu, certes, mais tout fonctionne à merveille et la réactivité du public semble ravir le groupe qui se donne corps et âme. Des moments de grâce marquent la fin du set, avec un “Cat’s in the Cradle” plein d’émotion, une reprise enflammée de “Ace of Spades” de Motörhead et un “Everything About You” festif et collaboratif, sur lequel le Motocultor donne une dernière fois de la voix, encouragé par les bondissants maîtres d’orchestre californiens.
Setlist Ugly Kid Joe :
That Ain’t Livin’
Neighbor
Panhandlin’ Prince
Milkman’s Son
Bad Seed
No One Survives
Devil’s Paradise
Cat’s in the Cradle (reprise de Harry Chapin)
I’m Alright
Goddam Devil
Ace of Spades (reprise de Motörhead)
Everything About You
Hällas
Massey Ferguscène, 20h10
C’est sous le plus grand des deux chapiteaux du Motocultor que nous nous dirigeons pour aller à la rencontre du groupe suédois Hällas, une formation faisant presque office d’hommage à la mouvance du rock psychédélique des années 70 avec ses envolées lyriques et ses rythmiques groovy. Avec un set en soirée, nous profitons pleinement du light show qui nous transporte un peu plus dans cet univers coloré et symphonique. Le jeu tout en souplesse de Rickard Swahn, le tout nouveau guitariste et de Marcus Petersson, est parfaitement complété par les synthétiseurs et l’orgue de Nicklas Malmqvist.
Le groupe se décrivant comme faisant du “rock d’aventure” nous transporte véritablement dans un autre univers. Le public nous fait autant voyager par son implication, en dansant, sautant et chantant à tue-tête chaque morceau du groupe. La foule va même jusqu’au délire sur “The Astral Seer” et “Star Rider”. Hällas a très certainement tapé très fort dans le cœur des festivaliers et a dû en conquérir plus d’un avec sa prestation extrêmement solide couplée à une qualité sonore à tomber par terre.
Setlist
Repentance
Earl's Theme
Carry On
Birth/Into Darkness
Gallivants (Of Space)
The Astral Seer
Star Rider
Stygian Depths
Fading Hero
Hällas
Wolfmother
Dave Mustage, 21h05
OK, Wolfmother c’était déjà à voir il y a 18/19 ans à l’époque du premier album, et le groupe d’Andrew Stockdale (seul membre permanent) a la réputation de se perdre un petit peu avec ses albums récents. En somme, on peut s’attendre à une formation en perte de vitesse, alors quand en plus c’est l’impressionnant phénomène Zeal & Ardor qui joue en même temps, on comprend assez vite pourquoi le public est présent sans être vraiment très compact en ce premier soir de festival. Rassurons cependant rapidement sur l’état du groupe et notamment d’Andrew, ça va !
Le premier titre, “Dimension” issu du premier album, met directement dans le bain. La voix d’Andrew est toujours aiguë et ne semble que peu altérée par rapport à ce qu’elle était avant, et la formule hard-rock psyché du groupe australien est super efficace. Wolfmother sait très bien que son début de carrière est le plus solide et incontournable, le groupe réserve donc pratiquement la moitié de la setlist au premier album. En y ajoutant “California Queen” et “New Moon Rising” de Cosmic Egg, interprétés relativement tard, on se retrouve avec une setlist effectivement centrée sur les débuts du groupe. Au milieu des compositions plus anciennes, on note toutefois la présence de quelques titres récents, “Rock Out” et “Feelin Love” sortis il y a deux ans sur le dernier album studio, mais surtout “Midnight Train”, un des derniers singles du groupe, que Wolfmother a sorti en 2022.
Efficace derrière son micro, Andrew se montre également bon showman, lorsqu’il n’est pas entravé par sa guitare cependant. Après trois premiers titres où il est plutôt statique, il lâche son instrument et se retrouve nettement plus mobile. Arpentant la scène de long en large, grimpant sur la batterie, il fait le spectacle. “Apple Tree” et sa ligne de chant endiablée semble lui donner un coup de boost, et à force de se donner Andrew finira même par tomber le t-shirt sur “Colossal”.
Dans cette configuration à trois instruments, le combo est très dynamique et ravit le public présent, invitant Andrew à se positionner sur la crash barrière, finissant la ligne de chant de “Joker & The Thief” au milieu des jambes des slammeurs.
Setlist Wolfmother :
Dimension
Rock Out
Woman
White Unicorn
Apple Tree
Feelin Love
Pyramid
Midnight Train
Colossal
California Queen
Rock n Roll Survivor
New Moon Rising
Gipsy Caravan
Victorious
Joker & The Thief
Zeal & Ardor
Bruce Dickinscène, 21h05
Une tente, deux ambiances : une heure après le set euphorisant de Ugly Kid Joe, la Bruce Dickinscène se charge d’une épaisse fumée, en préparation du rituel du combo suisse Zeal & Ardor. Signant un parcours irréprochable depuis sept ans, le groupe mené par Manuel Gagneux séduit les foules avec son mélange unique de blues, de gospel, et de metal extrême. La posture des musiciens est solennelle et mystérieuse à leur arrivée : seul le batteur Marco Von Allmen est en retrait, et les cinq musiciens et choristes sont alignés face au public, le visage dissimulé sous des capuches noires qu’ils retirent dès le second titre, l’excellent “Götterdammerung” et ses accents black metal. “Ship on Fire” et la fin épique pleine de blast beats de “Row Row” achèvent d’enflammer le chapiteau, plein à craquer, qui s’anime de pogos furieux et des paroles chantées à tue-tête. Les musiciens sont tous dynamiques sur scène, et le frontman s’excuse de son mauvais français tout en prévenant la foule : « on va faire de la musique agressive ».
La prestation est fascinante, le son excellent, Manuel Gagneux enchaînant souvent au sein des mêmes titres des moments bluesy mélancoliques et des passages de scream furieux sur chacun de ses deux micros, soutenu par les deux excellents choristes Denis Wagner et Marc Obrist. L’instrumental n’est pas de reste, les riffs incisifs et modernes du frontman et de Tiziano Volante, ainsi que la section rythmique puissante, entraînent le déferlement des headbangs. La setlist généreuse de Zeal & Ardor touche à sa fin avec l’enchaînement redoutable de “Feed the Machine”, “I Caught You” (l’occasion d’un wall of death très suivi) et “Baphomet”, conclusion d’un set aussi brutal qu’intense, qui a indéniablement marqué cette première journée du Motoc.
Setlist Zeal & Ardor :
Intro
Church Burns
Götterdammerung
Row Row
Ship on Fire
Blood in the River
Run
Gravedigger’s Chant
We Can’t Be Found
Tuskegee
Erase
Death to the Holy
Trust No One
Don’t You Dare
Satisfactory Lucifer
J-M-B
Feed the Machine
I Caught You
Baphomet
Kadavar
Massey Ferguscène, 22h20
De retour sous la Massey Ferguscène avec un autre groupe pilier du stoner rock, nous avons nommé Kadavar ! Tout comme pour Hällas la qualité sonore est au rendez-vous, tous les instruments sont parfaitement audibles, cela ne joue ni trop fort ni pas assez. Cela étant couplé à des lights également bien réglées et accompagnant parfaitement la musique, nous partons déjà sur les bases d’une prestation réussie.
On ne pourra pas non plus perdre des yeux la prestation presque hypnotique du bassiste Simon Bouteloup qui a très certainement fait chavirer les cœurs ce soir-là avec son déhanché. On apprécie également la belle partie d’improvisation où on sent un Christoph Lindemann (guitariste et chanteur) déchaîné sur ses solos. Le public se laissera même aller à chanter avec le groupe sur quelques morceaux. Une chose est certaine, les fans de prog et de stoner n’auront pas été laissés pour compte aujourd’hui sous le chapiteau !
Coroner
Supositor Stage, 22h20
Poids lourd de la scène thrash technique, les Suisses de Coroner méritent sans mal leur position dans le running order. À vrai dire, on les aurait même vus plus bas, en clôture de la journée. Le combo ouvre avec “Internal Conflicts”, titre aux riffs super énergiques, fort bien accompagné par des effets stroboscopiques qui prennent tout leur sens alors qu’il fait nuit. Petit bémol au niveau du son. Si Coroner est loin d’être le groupe qui a eu le pire son sur la Supositor pour ce premier jour, on a clairement connu des jours meilleurs. La guitare de Tommy Vetterli et la voix de Ron Broder ressortent particulièrement bien du mix, en revanche sa basse se fait beaucoup trop discrète. C’est manifestement un problème régulier sur cette scène, et Worst Doubt plus tôt ce premier jour restera une des rares prestations où le son de la scène n’a pas fait défaut.
Mais revenons à la musique du combo, qui a beaucoup à nous offrir. La formule de Coroner allie l'énergie brute du thrash à des influences et des arpèges largement inspirés par la musique classique, notamment audibles dans les soli de Tommy, le tout au sein de compositions progressives. Même si la technicité de l’ensemble pousse le groupe à rester très statique le long du set, il y a suffisamment de racines thrash pour que circle pits et mosh pits démarrent et perdurent tout le concert, comme souvent au Motocultor.
Les membres de Coroner fournissent un travail d’une grande précision et assurent le set, malgré la perte de tous leurs instruments dans un vol KLM, contraignant Tommy à jouer en short avec la guitare de Burning Witches ! Pas rancunier, le groupe dédie à la compagnie aérienne le titre “Semtex Revolution”, avant de continuer sur un “Metamorphosis” bien rallongé, au cours duquel une petite section jam se lance sur un riff de Jimi Hendrix.
On apprend que le groupe prépare un nouvel album, mais aucun titre n’en filtre ce soir. Le set très compact se termine sur “Grin (Nails Hurt)”, mais alors que le temps imparti de cinquante minutes est dépassé, Coroner nous accorde du rab avec “Reborn Through Hate”, jouant jusqu’au début des sets suivants. Si on aurait apprécié avoir un son plus équilibré, on se réjouit du set de haute volée que Coroner nous a réservé pour ce premier soir du Motocultor.
Setlist Coroner:
Internal Conflicts
Serpent Moves
Divine Step (Conspectu Mortis)
Semtex Revolution
Metamorphosis
Masked Jackal
Grin (Nails Hurt)
Reborn Through Hate
Hatebreed
Dave Mustage, 23h15
C’est LE groupe de crossover que tout le Motocultor attendait ce jeudi soir : Hatebreed. Les natifs de Californie sont donc venus pour démolir la Bretagne à coup de lancer de menhirs. Le public est là en nombre pour admirer les gutturales de Jamey Jasta qui n’a de cesse de courir partout sur cette belle Dave Mustage. Et le public sait le lui rendre en étant très réactif à ses demandes à savoir : soulever la poussière pour que de cette foule surgisse le chaos.
C’est très rapidement - au bout de cinq chansons tout de même - que le single “Destroy Everything” résonne. L’occasion idéale pour faire slammer une poubelle, n’est ce pas ? Oui oui, une poubelle - et son occupante - s’est bien jointe aux festivités, ce qui ne manque pas d’en faire rire plus d’un - ou de créer une impression de déja-vu chez les festivaliers présents au Motocultor 2019, lors d’un précédent slam de poubelle pendant le concert de … Hatebreed. Les titres redoutables s’enchaînent, et le punk hardcore mêlé de thrash des natifs du Connecticut semble ravir le public, même si les classiques joués ce soir commencent à dater (la plus grosse partie de la setlist est issue de Perseverance et Supremacy, respectivement sortis en 2002 et 2006). Et si le son est de plutôt bonne qualité, on regrette cependant le light show aux abonnés absents. Maintenant est-ce qu’on vient voir Hatebreed pour le spectacle lumineux que le groupe nous offre ? Ou plutôt pour se mettre des mandales ?
Jamey Masta finit également par rappeler que le groupe fêtera l’an prochain ses trente ans d’existence et qu’il compte bien célébrer sa longévité avec un nouvel album… et donc très certainement une tournée. On a déjà hâte !
Setlist
To the Threshold
Tear It Down
Live for This
A Stroke of Red
Destroy Everything
As Diehard as They Come
This Is Now
Smash Your Enemies
Spitting Venom
Before Dishonor
In Ashes They Shall Reap
Empty Promises
Last Breath
Proven
A Call for Blood
Seven Enemies
Perseverance
Burn the Lies
I Will Be Heard
Steve'n'Seagulls
Bruce Dickinscène, 23h15
L’ambiance se fait champêtre, pour ne pas dire agricole, pour ce dernier concert de la Bruce Dickinscène - quoi de plus normal pour un festival nommé Motocultor ... Pas de corpse paint ni de costumes noirs pour le quintette finlandais qui monte sur scène, mais plutôt des chapeaux de paille ou de trappeur, et les salopettes réglementaires. À grands coups de soli endiablés, de riffs de banjo, et d’harmonies vocales à l’ancienne, Steve’n’Seagulls va offrir au public venu nombreux un florilège de reprises bluegrass de classiques du hard rock et du heavy metal. La bonne humeur et l’esprit potache des musiciens multi-instrumentistes sont communicatifs, et le public ne se fait pas prier pour bouger gentiment, entamer des circle pits (en unplugged) et surtout reprendre en chœur les refrains des morceaux emblématiques que les Finlandais interprètent à la sauce country avec une virtuosité déconcertante : au-delà de la blague, la rapidité d’exécution force l’admiration.
Accordéon ou flûte accompagnent la guitare acoustique, le banjo et la contrebasse sur des tubes de Iron Maiden (“Aces High”, “The Trooper”), Metallica (“Master of Puppets”, “Seek and Destroy”) ou Mötley Crüe (“Kickstart My Heart”), sans oublier des classiques rétro “My Sharona”, “Give me All Your Lovin”, “Over the Hills and Far Away”, parfois agrémentés de folk scandinave avec des instruments traditionnels … la température monte d’un cran lorsque la bande se lance dans un “Antisocial” de Trust d’anthologie, avant le final sur le très attendu “Thunderstruck” d’AC/DC qui va jusqu’à déclencher un wall of death. Un set un poil long (une heure de country, tout de même !) mais plutôt bon enfant, qui semble avoir séduit les festivaliers présents.
Long Distance Calling
Massey Ferguscène, 0h30
Long Distance Calling, un quatuor de rock progressif instrumental pour terminer cette première journée du Motocultor sous la Massey Ferguscène ? Autant dire qu'on ne s'attend pas à ce que le groupe parvienne à remplir la tente. Et c'est vrai qu'on l'a déjà vue plus chargée et qu’au début du set le déplacement dans la tente est fort aisé. On remarque cependant que nombre de curieux restent amassés autour de la tente, attirés ou intrigués par le voyage que propose la formation allemande. En réalité, à mesure que les plans post-rock de Long Distance Calling s’enchaînent, c'est même l'inverse que l’on observe : l’affluence augmente malgré l’heure tardive, le pic étant atteint une bonne demi-heure après le début du set.
Peut-être est-ce aussi dû à la setlist, qui s’avère nettement plus efficace (et plus courte évidemment) que celle que nous avions découverte en février au Backstage By The Mill. Si le début, identique, entraîne la foule avec “Giants Leaving” puis “Blades”, on y retrouve rapidement “Black Paper Planes” puis “Eraser”. Le résultat est un concert plus rapide, plus énergique aussi, même si paradoxalement le groupe est également plus communicatif ici. On aurait pu s’attendre au contraire vu la configuration nettement moins intimiste du festival ! C’est surtout Florian Füntmann (guitare), qui prononce régulièrement quelques paroles et remerciements entre les titres. On reste tout de même sur un niveau faible d'échanges, car tout passe par la musique ! On se laisse embarquer et on savoure le concert du groupe, servi par un son aux petits oignons.
Textes :
- Valérian (Worst Doubt, Hällas, Kadavar, Hatebreed)
- Félix D (Komodor, The Psychotic Monks, Wolfmother, Coroner, Long Distance Calling)
- Julie L (A.A.Williams, Ugly Kid Joe, Zeal & Ardor, Steve'n'Seagulls)
- Aude D (Royal Republic)
Photos : Lil'Goth Live Picture. Toute reproduction interdite sans l'autorisation de la photographe.