*Voici la chronique que nous avons reçue d'un auditeur/lecteur du nom de Eddy Elrich, fait assez rare qui mérite d'être souligné... et qui mérite surtout ici une publication. Ainsi nous parle-t-il du nouvel album des australiens de Eyefear sorti le 7 décembre chez Limb Music*
Le metal progressif, ça vous évoque quoi ? La rigueur technique d’un Dream Theater ? La rugosité grandiloquente d’un Symphony X ? La sensibilité d’un Opeth ? Ou peut-être êtes-vous plus réceptif aux bizarreries de Tool ? Très vague que cette notion de metal prog, et pourtant même en prenant la définition la plus large possible, il est ardu de comprendre la pertinence de cette étiquette pour parler de la musique d’Eyefear. En effet, le quintet australien, s’il est bien loin du traditionnel hard bluesy de son pays, pratique un power à tendance symphonique en rien comparable aux compositions alambiquées des groupes progressifs.
Enfin, peu importe le genre, l’important c’est ce qui ressort une fois le CD sur la platine et les choses démarrent plutôt bien pour les australiens avec le single "Redemption". Première constatation, la production est de qualité avec un bon équilibre entre les différents instruments, le groupe a densifié ses orchestrations et durci sa rythmique donnant un côté plus massif à l’ensemble. Comme sur l’album précédent, Eyefear met en avant ses deux atouts majeurs : le clavier et surtout, le chant. Danny Cecati, ex Pegazus, possède un organe vocal particulièrement intéressant, dans un style proche de Russell Allen ou Jorn Lande ce qui confère une puissance certaine aux compositions. Sur "Redemption", le bonhomme est en plus servi par des lignes de chants excellentes donnant lieu au meilleur refrain de l’album, voire de toute la carrière d’Eyefear.
Une entrée en matière réussie qui arrive à plonger l’auditeur dans l’univers du groupe. Ici point de dragons chevauchés par des nains volant vers Mars ou Sirius comme le veut le cliché du power, l’ambiance est mélancolique et noire et cela s’illustre sur l’excellent "Shadowdance" porté lui aussi par des orchestrations bien pensées et un chanteur au sommet (ce refrain !). "Eyes of Madness" poursuit sur cette lancée avec cette fois ci un riff tout en lourdeur conférant un côté doomy jouissif au morceau. Et au risque de paraitre redondant, je me dois encore de souligner la performance de Cecati qui sublime un refrain empli de mélancolie. Eyefear arrive à jouer sur les différents tempos et c’est conquis par le romantisme sombre de "Eyes of Madness" que nous est présenté le morceau titre divisé en deux parties. Le groupe confirme sa volonté de proposer un heavy plus sombre que la moyenne et après une nouvelle intro au clavier efficace, des growl interviennent renforçant la noirceur de l’ensemble. Le solo final est assez minimaliste et répète en boucle le même motif ce qui concorde avec l’atmosphère pesante du morceau mais reflète également l’un des gros point faible de l’album.
Car oui, cette entame dithyrambique ne doit pas occulter les défauts qui nous freinerons notre plaisir au fil de l’album. Le premier étant le niveau des guitaristes. "Eyes of Madness" mis à part, les riffs se ressemblent beaucoup trop et les solis sont soit inexistants, soit inintéressants. A la linéarité de la six cordes, s’ajoute une rythmique très redondante et si batteur et bassiste s’autorisent quelques initiatives, le tout est bien trop constant avec une double pédale devenant énervante. La 2e partie de l’éponyme, "Reborn", souffre de tout cela et ne peut pas être sauvé par le chant qui lui aussi commence à peiner avec qui plus est une intervention féminine pas forcément des plus efficace. "Perfect Images" et "Legions" illustrent cette baisse de régime en reproduisant un écueil malheureusement courant dans le genre : le clavier totalement kitsch. Enfin, "Immortals" doit tout de même être sauvé même si le refrain peine à tenir la comparaison avec ceux de la première partie de l’album.
Malgré un début tonitruant, Eyefear comme de trop nombreux jeunes groupes semble avoir grillé toutes ses cartouches trop vite et a du mal à tenir en haleine l’auditeur passé la première partie du titre éponyme. On retiendra néanmoins les très bon "Shadowdance", "Redemption" et "Eyes of Madness" en espérant que le groupe recrute de meilleurs gratteux pour enrichir sa musique et éviter de tomber dans des lignes de claviers cheap au possible. The Inception of Darkness étant déjà le 5e album des australiens, le prochain effort devra présenter une qualité plus régulière si Eyefear escompte s’exporter en dehors de sa terre natale.
Note finale : 6.5/10