La cure de jouvence de Stratovarius
Ce vendredi 22 février sort Nemesis, 14e album du groupe de power metal finlandais. Après un Elysium de toute beauté qui avait définitivement remis Stratovarius sur les rails vient un disque de très bonne qualité qui montre un groupe soudé qui n’a pas peur d’aller de l’avant et d’inclure de nouvelles influences dans sa musique, faisant ainsi souffler un vent de fraicheur bienvenu dans sa riche discographie.
Si certains groupes qui approchent les 30 ans de carrière ronronnent doucement en se reposant sur leurs acquis, Stratovarius a décidé de continuer d’aller de l’avant. Dans ce nouvel album, Nemesis, cela passe par de nouvelles influences, plus actuelles, venant de la scène electro, savamment distillées à travers certains titres. Le plus représentatif de ce bond en avant est "Halcyon Days", avec son beat entraînant et son solo de guitare venu d’une autre planète. Ce titre n’est cependant pas le seul à bénéficier d’arrangements étonnants de la part du groupe.
Ces idées nouvelles sont signées Matias Kupiainen, guitariste du groupe depuis 2008, qui s’est affirmé en tant que compositeur principal sur l’album Elysium (2011). Le musicien a notamment pu expérimenter de nouveaux rythmes avec Rolf Pilve, nouveau batteur du groupe, qui remplace Jörg Michael après son départ. Plus "moderne" et " versatile" selon le groupe, le petit nouveau a pu aider le Matias à mettre en place ses expérimentations, avec une frappe plus sèche que son prédécesseur allemand. Le guitariste se montre une nouvelle fois à la tête de la direction artistique du groupe et confirme le bon fonctionnement de la nouvelle formule de Stratovarius.
Le groupe fonctionne donc à merveille avec des membres bien en place. Le duo Rolf Pilve à la batterie et Lauri Porra à la basse fonctionne à merveille, avec une ossature rythmique qui fait toujours mouche et qui ne défaillit pas quand Matias Kupiainen vient la renforcer avec ses riffs incisifs. Côté mélodie, ce dernier se tire la bourre avec le claviériste Jens Johansson, les deux assurent les parties mélodiques chacun à leur manière et proposent des duels instrumentaux efficaces qui ne tombent jamais dans la démonstration absconse. Au-dessus des débats de musiciens, Timo Kotipelto, en poste depuis 20 ans, n’a rien perdu de son timbre caractéristique et continue d’interpréter les titres avec brio, qu’il soit agressif ("Stand My Ground"), conquérant ("Nemesis") ou même enjoué ("Fantasy"). Quelques effets, production moderne oblige, viennent se poser sur sa voix sans jamais la dénaturer.
Si beaucoup de groupes de metal ont aujourd’hui recours à une production chargée et "over the top", Stratovarius garde son crédo depuis plusieurs années, à savoir de maintenir l’équilibre entre clarté et puissance. Ainsi, le son est massif, avec un duo basse-batterie bien audible, une guitare ample mais lisse, aux distorsions toujours maîtrisées. On pourrait croire que l’abondance d’effets en tous genres viendrait dénaturer cette belle formule, mais l’utilisation sage que le groupe en fait et le mix savant de Matias Kupiainen permettent à tout ce petit monde de conserver son équilibre et de mettre chacun en avant lorsque cela est nécessaire. Les ornements synthétiques et les nombreux chœurs sont don utilisés intelligemment.
Ainsi, cette production rend grâce aux onze morceaux de l’album, pour la plupart de qualité. Si l’ambiance de l’album est perçue comme "sombre"» par Timo Kotipelto, avec l’agressif "Stand My Ground", le mélancolique "Castles In The Air" ou bien le pachydermique "One Must Fall", deux chansons plus légères et enjouées arrivent à tirer leur épingle du jeu : le single entêtant "Unbreakable" et la sucrerie assumée "Fantasy". Le groupe n’a pas non plus oublié son amour pour le power metal pur et dur avec "Dragons" qui semble faire écho au tube "Hunting High And Low" et n’a pas perdu son goût pour les pièces épiques avec le grandiose "Nemesis", qui ferme l’album avec puissance et classe.
On regrettera cependant quelques morceaux en deçà, comme la ballade "If The Story Is Over", prévisible et mielleuse, le maladroit "Out Of The Fog" dont l’écriture n’est pas des plus heureuses et le banal "One Must Fall", mid-tempo lourd au refrain trop facile.
Malgré ces légères zones d’ombres, Nemesis confirme le fait que Stratovarius a su faire remonter en flèche sa carrière, après une période difficile pour l’ensemble du groupe, qui s’était soldée par le départ du leader Timo Tolkki, et un retour en demi-teinte avec l’album Polaris. Cette fois, pas de doute, Stratovarius est bien sur les rails et montre des envies d’aller de l’avant en modernisant ses compositions. Une seconde jeunesse aussi inattendue que réjouissante.