Faire de l’adversité une force, mettre en mots et en musique le mal-être et le long chemin pour sortir de cette crise : voilà la philosophie de ce cinquième opus du groupe américain Halestorm, présenté par sa meneuse Lzzy Hale comme un « voyage entre santé mentale, débauche, survie, rédemption, et redécouverte ». Aucun doute, le groupe de heavy rock est de retour et le crie haut et fort !
Sur onze titres à la durée moyenne de 3min30, le quatuor Halestorm donne dans la concision et l’efficacité. Ces hymnes imparables taillés pour la radio, dans le plus pur esprit hard rock US, sont déroulés avec facilité par le combo habitué du fait. Cependant, l’ensemble possède un côté lisible et homogène, tellement la tracklist nous met sur la voie d’un chemin personnel, des hauts et des bas et de ce parcours de retour à la vie après un processus ardu de guérison.
Sans équivoque, le groupe signe une entame d’album directe, phénoménale, tout en puissance. Les hurlements de Lzzy s’imposent sur le groove imparable et les gros riffs du morceau éponyme d’ouverture. Transparaît une parfaite convergence du fond et de la forme, l’énergie brute exprimant ce cri primal d’un désir sauvage de vie.
La rage est palpable dans l’affirmation brute d’une indépendance rebelle du plus punk "Wicked Ways". Animée d’un feu sacrée, Lzzy Hale y crie sa liberté, y compris celle d’avoir des pensées indécentes, tandis que Arejay Hale signe des passages plus rudes à la double pédale et que les jeux de guitares plus durs sont à peine apaisés par le côté mélodique des chœurs et du clavier. L’atmosphère se fait vengeresse, plus lente, et les riffs plus bas encore, pour tirer de la force de sa singularité et son identité de freak dans "Strange Girl", morceau qui ne pourra que rassembler parias et personnes marginalisées.
Dans une approche complètement décomplexée mais moins lisse que dans ses débuts studio, le combo n’hésite pas à se salir quelque peu. Riffing grunge et paroles à double lecture s’enlacent dans "I Come First", parfaite bande-son d’un élan d’émancipation féminine. Maîtresse de son plaisir et consciente de sa valeur, refusant résolument de se poser en proie ou en victime, Lzzy n’a rien d’une petite fleur fragile, c’est même une bombe – c’est également ce qu’elle affirme dans l’explosif et étrange "Bombshell", lourd et expérimental, sur lequel les énormes riffs laissent la place dans le couplet à un duo chant / basse du meilleur effet. Josh Smith impose d’ailleurs un groove marquant sur de nombreux titres, comme sur "Psycho Crazy", percutant et complètement jubilatoire. L’album est doté d’une production dynamique et travaillée signée, pour la première fois pour le groupe, d’un duo de professionnels : Nick Raskulinecz (Foo Fighters, Alice in Chains) et Scott Stevens en co-production (Shinedown).
Halestorm tire sa force de ces moments difficiles traversés, et montre une cohésion encore renforcée, palpable par exemple sur "My Redemption", où l’énorme groove et les passages rugueux forment un écrin idéal pour porter l’affirmation d’une indépendance, presque une renaissance, dans cet instinct de survie salvateur, après les désillusions de la foi. On retrouve des thématiques proches mais une énergie positive, celle d’avoir trouvé un pilier dans ses soutiens, sa communauté, sur l’hymne en puissance "The Steeple", fédérateur au plus haut point, agrémenté d’un pur solo signé de l’excellent Joe Hottinger.
Racontant avoir touché le fond, touchante sur le propos, Lzzy Hale signe une performance vocale impressionnante, tout en puissance et en maîtrise, durcissant sérieusement le ton d’une palette rugissante plus étendue que sur les albums précédents, comme si le propos à vif avait déverrouillé de nouvelles barrières. L’exceptionnelle vocaliste, parmi les meilleures, imprime une rage de vivre palpable sur chaque seconde de l’opus, dans des registres différents.
Deux ballades, habilement placées dans la tracklist, ne font pas redescendre l’intensité. "Terrible Things" à la guitare porte une bonne dose d’émotions et de mélancolie pour narrer une traversée du désert à travers des lignes vocales intenses. Le final de cet album coup de poing surprend enfin, le titre "Raise Your Horns" (non, rien à voir avec Amon Amarth) ne laissant pas vraiment présager une ballade piano / voix. Cette poignante invitation à la communion, et à la guérison, par la voie - et la voix - de la musique et du rock, termine de décliner ce cri du cœur perceptible tout au long d'un opus à la fois intime et rassembleur.
Les Américains signent finalement aujourd’hui un album (enfin) à la hauteur de la force brute et de l’énergie viscérale qu’ils ont toujours démontrée sur scène.
Chaud, vibrant, agressif, aussi torturé qu’audacieux, le Halestorm 2022 remplit toutes ses promesses. Si Back From the Dead ne révolutionne pas les codes du hard rock US, il frappe un grand coup là où cela fait du bien, et témoigne d’une cohérence et d’un sentiment rare d’unité, déclinant la thématique de la communion sous tous les angles : celle d’abord d’un groupe plus soudé que jamais, ayant trouvé une force d’expression percutante, et celle enfin d’une relation toujours aussi forte entre le quatuor et son public.
De quoi attendre avec impatience le prochain passage de Halestorm en concert dans l’Hexagone. Ce sera chose faite le 16 novembre 2022 aux côté d’Alter Bridge sur la scène du Palais des Sports à Paris.
Tracklist :
1. Back From the Dead
2. Wicked Ways
3. Strange Girl
4. Bright Side
5. The Steeple
6. Terrible Things
7. My Redemption
8. Bombshell
9. I Come First
10. Psycho Crazy
11. Raise Your Horns
Back From the Dead est sorti le 6 mai 2022 via Warner Music.