Mine de rien, cinq ans se sont écoulés depuis l'excellent Gods of Violence. Pourtant, Kreator a tellement écumé les salles de France et les festivals avant la pandémie, tournant à n'en plus finir, que l'attente ne nous a pas paru si longue que cela. Profitant des deux ans de pause forcée, le combo allemand a renouvelé une partie de son line-up, incluant notre Fred Leclercq (Loudblast, Sinsaenum) national à la basse. De quoi espérer un retour au thrash direct et sans concession des débuts, à en croire les premiers extraits dévoilés ("Hate Über Alles" et "Strongest of the Strong").
Pourtant, Mille Petrozza et ses compères trouvent un juste milieu entre l'agressivité thrash à la Pleasure to Kill et mélodies des derniers opus, tout en tentant des choses nouvelles. Passé la curieuse introduction "Sergio Corbucci is Dead" et ses clins-d'oeil aux western spaghetti (ce qui change des intros orchestrales il faut l'avouer), le quatuor entre dans le vif du sujet avec le morceau titre.
Pourtant, ce titre thrash et in your face n'est que l'arbre qui cache la forêt. En effet, "Crush the Tyrants" est un mid-tempo un peu lourd (un peu dans l'esprit "Sad But True" de Metallica) avec un refrain pompeux. "Conquer and Destroy" aurait pu totalement se trouver sur l'album précédent, avec un aspect mélodique poussé à son paroxysme avec des choeurs un peu hors de propos. Et quant à "Become Immortal", il lorgne du côté de Maiden, sans grande originalité, en reprenant les choeurs déjà évoqués. Le riff d'intro de "Midnight Sun" aurait pu annoncer le meilleur titre de l'album, à travers une vitesse d'exécution qui fait plaisir à entendre. Malheureusement, le titre est plombé par la voix de Sofia Portanet qui n'a pas grand chose à apporter et qui fait clairement tache au milieu du morceau.
Heureusement, "Demonic Future" est là pour redresser la barre, avec un thrash certes un peu convenu, mais bien écrit. C'est également le cas de "Killer of Jesus", ou du titre éponyme, qui sont dans la veine des morceaux les plus thrash de Phantom Antichrist ou Hordes of Chaos ("Killer of Jesus" a d'ailleurs un refrain assez proche de "Hordes of Chaos"). "Pride Comes Before the Fall" voit Petrozza user de sa voix claire, choix surprenant mais qui apporte un contraste plutôt bienvenue au sein de la composition. "Dying Planet" et son thème inquiétant constitue également une belle surprise montrant que les Allemands peuvent tout de même tenter de nouvelles choses sans tomber dans l'excès.
En clair, ce Hate Über Alles n'est ni une réussite, ni une déception totale. Il souffre principalement d'un manque de cohérence et de compositions inégales. De quoi ressortir frustré, car il est clair que le quatuor a souhaité tenter de nouvelles choses et ne pas proposer le même disque que les deux précédents, qui étaient (il est vrai) relativement proches en terme d'ambiance. Gageons que cela ne se remarquera que peu lors des prochains concerts de Kreator, puisqu'on imagine aisément que le combo ne jouera probablement que les meilleurs titres (ceux dévoilés avant la sortie de l'album). Petit faux-pas donc pour la bande de Petrozza, qui rectifiera très certainement cela en live, à commencer par le Hellfest dans les prochains jours.
Tracklist :
Sergio Corbucci is Dead
Hate Über Alles
Killer of Jesus
Crush the Tyrant
Strongest of the Strong
Become Immortal
Conquer and Destroy
Midnight Sun
Demonic Future
Pride Comes Before the Fall
Dying Planet
Déjà disponible chez Nuclear Blast Records.
Photographie promotionnelle : DR Kreator