Pelican - Week-end 1 - Valley - Samedi 18 juin - 17h35
Long moment instrumental sous la Valley, la scène dédiée entre autres aux musiques qui font planer dans plusieurs sens du terme. Les Américains de Pelican y ont offert un set tout en ambiance, idéal pour un break entre deux sets plus agressifs.
La Valley est pleine à ras-bord en cette fin d’après-midi. Sans vouloir minimiser les talents indéniables de Pelican, le fait que la scène soit couverte et que l’organisation arrose le public à coup de jets d’eau n’y est peut-être pas pour rien alors que la canicule se poursuit.
Cela permet donc à un public nombreux de profiter des attraits de Pelican. Le quatuor américain offre un post metal assez planant, entièrement instrumental, avec des influences stoner et post hardcore – à vrai dire, les tentatives pour le classifier abondent, et Pelican prend plaisir à être insaisissable en la matière.
Les morceaux s’étirent au-delà des cinq, voire dix minutes, et il n’y aura qu’une grosse demi-douzaine de morceaux joués sur cinquante minutes. La longueur des titres permet aux musiciens de proposer des compositions denses, avec une évolution constante au sein même d’un morceau.
On se retrouve donc par exemple avec des titres très massifs, portés par un mur de guitares (Trevor de Brauw et Laurent Schroeder-Lebec), qui aboutissent à un pont planant, pour progressivement gagner de nouveau en agressivité jusqu’à ce que la lourdeur se fasse encore plus suffocante.
Les guitares balancent des sons gras, les étirent jusqu’à résonner physiquement dans les organismes, devenir de plus en plus massif. Ces accords imposants flirtent avec des arpèges clairs beaucoup plus légers, avant que l’ensemble ne se fasse balayer par des gros riffs agressifs. Le bassiste Bryan Herweg fait vrombir sa basse, particulièrement imposante, semblant aller remuer dans les entrailles de la terre pour en faire sortir les forces telluriques. Le batteur Larry Herweg, tout aussi imprégné, alterne les blasts, les martèlements tonitruants et les passages plus subtils.
Les rythmes sont relativement lents mais varient au sein des morceaux, tantôt brusquement, tantôt très progressivement, si bien que l’on ne s’en rend compte que tardivement. Pour peu que l'on soit distrait trente secondes, le titre a complètement changé de visage. On passe de quelque chose de très distordu à quelque chose de beaucoup plus clair, de très doux à extrêmement agressif.
L’évolution des morceaux est assez fascinante, tant le groupe a la volonté de ne pas faire simplement un morceau avec un thème mélodique qu'il développe, mais au contraire étire sa musique dans tous les sens, la fait changer de sens, empile les textures et les sonorités pour en faire un ensemble qui reste malgré tout cohérent, alliant des sonorités qui semblent surgir des profondeurs à des envolées aériennes, pour souvent finir dans un maelstrom auditif dans lequel on plonge inexorablement.
Le seul reproche que l’on pourrait faire au groupe est que l’on a parfois du mal à distinguer les morceaux, car si chacun évolue énormément du début à la fin, il y a peu de différence marquante de l’un à l’autre. Mais cela crée aussi une atmosphère particulière au set, un côté lancinant qui chercherait à plonger l’auditoire dans un état second.
Le groupe parle peu, si ce n’est pour remercier quelques fois le public, et semble dans un autre univers, comme sa musique. Mais cela n’a pas l’air de déranger le public, qui adhère manifestement. « Honnêtement, c’est complètement irréel, avoue l’un d’eux juste avant le dernier morceau. Ces dernières années, on s’est presque arrêtés, mais cette sensation d’appartenance nous a rattrapés. Alors de nouveau, merci beaucoup ».
Après un dernier morceau construit sur le même modèle que les autres, qui offre de nouveau de multiples changements d’ambiance avec une basse très puissante, Pelican tire sa révérence. L’expérience qu’il a proposée cet après-midi aura laissé une empreinte singulière sur les festivaliers.
Photo : Hasna Ben Brahim. Reproduction interdite sans autorisation de la photographe