Jeudi 14 mars dernier nous avons très gentiment été conviés par l’Amex (American University Of Paris) à assister au concert privé de Blaze Bayley en son bar cosy. Le chanteur à la discographie abondante et métissée, voix des groupes Wolfsbane et anciennement Iron Maiden, y donne ce soir un show en trio acoustique, dans une ambiance des plus intimistes façon ‘pub à l’anglaise’. Environ une soixantaine de personnes viennent boire leur verre et passer une soirée intime avec Bayley et ses musiciens. L’on distingue dans l’assistance aussi bien des tee-shirts d’Iron Maiden, que de Blaze en solo, ou encore de Wolfsbane (excellent groupe de hard rock fondé en 1984, et ayant splitté en 1994 au moment de l’intégration de Blaze dans la Vierge de Fer, et fort heureusement reformé depuis 2010).
L'intérieur chaleureux de l'Amex Café, qui propose ce soir une rétrospective sur la carrière de Blaze Bayley. Ici : Iron Maiden sur les écrans
L’ambiance est chaleureuse, au cœur de ce qui s’annonce une belle soirée à thème, avec diffusions sur les écrans de clips-vidéo couvrant toute la carrière du chanteur anglais, d’une musique de fond analogue, drapeaux et accessoires ornant également le bar.
Back to the roots avec une ambiance intimiste digne d'un bon pub anglais
Thomas Swijsen, le jeune guitariste Hollandais avec lequel Blaze a réalisé son nouvel album intitulé Russian Holiday (et déjà présent sur son album précédent The King Of Metal, 2012) grimpe sur scène afin de présenter quelques réécritures du répertoire d’Iron Maiden en guise de hors d’œuvre appétissant (extraits de son album Nylon Maiden, un bouquet de chansons d’Iron Maiden entièrement réadaptées en acoustique). Armé de sa guitare acoustique (aux cordes de nylon donc), Thomas lance The Evil That Men Do, épaulé par la violoniste Anne Bakker qui reprend de manière fort astucieuse les lignes mélodiques de guitare, de chant, mais aussi les solos ! Le public adhère immédiatement au propos du guitariste, et montre un engouement qui rappelle à quel point les titres de la formation Britannique sont béton, et leur dimension, culte. Clive Burr (le batteur aux fondements d’Iron Maiden) décédé la veille a évidemment droit à son hommage, et Thomas choisi « Run To The Hills » et son intro à la batterie si caractéristique. Le mini-set se termine avec « Wasted Years », et Bayley monte sur scène en toute simplicité, avec « Lord Of The Flies » extraite de son premier album avec Iron Maiden, The X Factor (1995).
Le bar de l'Amex, bien avant les hostilités
Il est intéressant de noter que la chanson se base sur le prix-Nobel de littérature du même nom, signé de la plume de William Golding, un roman allégorique mettant en scène un groupe de gamins échouant sur une île déserte et tentant de créer leur propre système politico-social. Allégorie intentionnelle ? Le trio continue dans la lignée thématique de l’isolation insulaire avec « Como Estais Amigos », chanson extraite cette fois-ci de l’album Virtual XI (Iron Maiden, 1998) et abordant le thème douloureux de la guerre dans les îles Falkland (îles Malouines, au large de l’Argentine, tentant de s’autogouverner mais éternellement ballotées entre le joug Britannique et Espagnol). Le public reprend en chœur le somptueux refrain « No more tears », puis Bayley casse le rythme en opérant une introspection radicale sur « Meant To Be » (extraite de son album Tenth Dimension, 2002), autobiographie questionnant la place du destin dans nos vies. « All my life I have followed dreams, never cared where they’ve taken me… Does the end justify the means? Is it meant to be? (…) I must now make a stand, and break out of these walls. I’ll make my own rules…” ("toute ma vie j'ai poursuivi des rêves, ne me souciant jamais d'où ils me mèneraient... La fin justifie-t'elle les moyens? (...) Je dois à présent prendre position, et me libérer de ces murs. J'érigerais mes propres règles..."')
Thomas, Anne & Bayley
“The Launch” extraite de son premier album solo Silicon Messiah (2000) puis “Futureal” (Virtual XI) établissent un rythme plus up-tempo et enflamment le public. C’est assez impressionnant car on a l’impression de revoir le chanteur devant les foules gigantesques de naguère avec Iron Maiden, et le public VIP de ce soir est comme un échantillon de cette liesse. Force est de constater que Bayley apporte la même énergie, le même entrain, que ce soit devant 5000 personnes ou devant 50, et la réaction du public suit de la même manière. Il n’y a que l’échelle qui change, vraiment. Après une allocution très sincère pendant laquelle Bayley adresse ses remerciements personnels au public, le trio entame « Russian Holiday » issu du nouvel album du même nom (voir ma chronique à ce sujet). Avec «One More Step » (The King Of Metal, 2012, puis Russian Holiday) et « Soundtrack Of My Life » (Blood & Belief, 2004, puis Russian Holiday) on avance encore d’un echelon dans l’introspection. Porté par la performance impeccable de Thomas à la guitare et d’Anne au violon, qui affichent une grande dextérité dans la pratique de leurs instruments respectifs, la performance déchirante de Bayley n’en est rendue que plus intense. Le chanteur utilise toute sa gestuelle, pour une interprétation mélodramatique empreinte d’une conviction poignante. On sent la douleur qui l’habite, notamment lorsqu’il se confie au public avec « One More Step » : « there are times when you find no meaning in life… ‘It’s not the falling down that counts, what counts is getting up again. When you get up it might seem like a thousand steps to take will be impossible. Just focus on this single step, forget about the rest of them, all you can do is just take one more step’” ("il y a des moments où tu ne trouves pas de sens à la vie... "ce n'est pas la chute qui compte, ce qui compte est de se relever. Lorsque tu te relèves, il pourrait sembler qu'un millier de marches à arpenter soit une chose impossible. Concentre-toi sur le premier pas, oublie tout le reste, tout ce que tu puisses faire est arpenter cette première marche"). “Soundtrack Of My Life” est selon Bayley un hommage à ces chansons qui ont marqué notre vie, et en ont été véritablement sa bande-son à un moment-donné. L’émotion est à son paroxysme, et l’on peut dire que le bougre a un sacré coffre. Profonde par moments, toujours animée d’une conviction sans faille (d’où le titre Blood & Belief d’ailleurs), la voix du chanteur est à son top durant tout le show, et l’on sent qu’il n’aurait presque pas besoin de micro tant il fait des efforts pour se contenir justement !
Une performance mélodramatique qui préfigure une mise à nu totale de l'artiste
“Stealing Time” (toujours extraite de Blood & Belief, puis Russian Holiday aujourd’hui) redonne le mouvement up-tempo et la participation du public y fait parfaitement écho. Bayley explique que cette chanson est la mise en mélodie de sa croyance selon laquelle la science prouvera un jour que nous sommes tous connectés entre nous : « I seek the truth and find it, can science answer me ? I feel there must be something deeper and understanding what it means could now describe unseen connections as time unfolds in front of me” ("Je recherche la vérité et la trouve, est-ce que la science peut répondre à mes questions? Je sens qu'il doit exister quelque chose de plus profond, et comprendre ce que cela implique pourrait à présent expliquer les connections invisibles, tandis que le temps défile devant moi"). Hymne à la liberté, le trio reprend “The Clansman” (tiré de Virtual XI, et que Thomas reprend sur son album à lui, avec comme guest très spécial Bayley himself justement). La chanson que Steve Harris avait écrite en hommage à l’histoire de William Wallace, héro de la rébellion Ecossaise contre l’invasion Anglaise au XIIIème siècle, et relatée en images dans le film de Mel Gibson, Braveheart (1995). Encore une illustration de l’esprit d’indépendance qui anime Bayley, et des principes de liberté individuelle et d’autonomie morale qui lui sont si chers. Avec cette parabole du clan pour illustrer au mieux son propos, le chanteur en profite pour remercier à nouveau le public : « you’ve made me free » ("je suis libre grâce à vous"). Le trio choisit de clore le programme avec « Man On The Edge » puis « The Angel & The Gambler » (toutes deux d’Iron Maiden avec Bayley), et notre ami Anglais démontre encore une fois son talent incontestable d’orateur, notamment lorsqu’il arrête la chanson « Man On The Edge » en plein milieu, alors qu’il sent un léger mou de l’assistance, et l’exhorte ainsi à une réaction plus à la hauteur de la performance à couper le souffle délivrée ce soir.
Qu'il soit devant 50, 500 ou 5000 personnes, la performance de Blaze Bayley est toujours égale, et soulève tout autant les foules
Fidèle à ce qu’il prêche, Bayley ne se défile pas à l’issue du show, et va au contraire prêter main-forte au stand de merchandising, rencontrant le public comblé, jouant le jeu des autographes, photos, etc… Une soirée résolument VIP, dans une ambiance très cosy, avec un accueil chaleureux de la part de l’Amex, et qui donnera la vraie mesure d’un artiste de rock, et une dimension plus authentique et conforme à la réalité de sa vie. Un show magnifique, une performance très pro de la part de Bayley, Thomas & Anne, et un arrangement des morceaux superbe et si bien ficelé que l’on ne sent à aucun moment un quelconque vide. C’est un exercice périlleux que de reprendre des musiques jouées par d’ordinaire 5, 6 voire 7 instruments, et les transposer en acoustique pour 3 instruments seulement (voix comprise)... Mais la maestria du trio est telle que le pari est relevé haut-la-main, tout en apportant quelque chose en plus. Si la puissance est au rendez-vous, une grande sensibilité vient s’y greffer, pour un voyage dans les hauts et les bas de la psyché du chanteur génial. Bayley vit ce qu’il chante, et fait littéralement sa thérapie sur scène. Pas de paillettes, pas de trucage, simplement un homme (en marge ?) nu comme un ver, qui se confie volontairement, et nous fait passer du rire aux larmes en un claquement de doigts. Un excellent show, à la fois grandiose et très personnel, intelligemment construit, avec en filigrane les thèmes qui représentent toute la vie de Blaze Bayley : la liberté, l'insoumission, la conviction, l’authenticité.
Votre fidèle serviteur, son amie, et Blaze Bayley
Setlist Blaze Bayley :
Lord Of The Flies
Judgement Of Heaven
Como Estais Amigos
The Truth Is Revealed
Meant To Be
The Launch
Futureal
Russian Holiday
One More Step
Soundtrack Of My Life
Stealing Time
The Clansman
Man On The Edge
The Angel & The Gambler
Un grand merci à l'Amex & son équipe pour leur accueil cordial, et leur excellent concept de soirées. A Blaze Bayley & son band pour leur gentillesse et leur disponibilité.
Liens :
Le site officiel de Blaze Bayley
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La page officielle Facebook de l'Amex Café
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The American University Of Paris