Paranoid est le second album du groupe de Black Sabbath sorti le 18 septembre 1970 au Royaume-Uni et le 1er janvier 1971 aux États-Unis. L'album a été produit par Rodger Bain aux studios Regent Sound & Island à Londres et fut enregistré en deux jours seulement pour le compte de Vertigo Records. Il atteindra la première position des charts anglais assez rapidement ainsi que la huitième position aux États-Unis ce qui fera de lui le plus grand succès commercial de Black Sabbath.
Et pourtant après le succès de leur premier album, les musiciens de Black Sabbath sont loin de rouler sur l’or, Ozzy Osbourne dira même plus tard : « Tout ce que je voulais, une fois que le premier album avait décollé, était d’obtenir du succès et devenir une Rock Star. Et d’après les ventes de l’album, j’avais du succès, mais j’étais toujours en train d’emprunter de l’argent à ma mère pour payer quelques tournées de bières de ci et là. »
Lourdeur, épaisseur, on en arriverait même à visualiser la taille des cordes de Geezer Butler tellement ça en impose sous cette sirène annonçant les bombardements imminents sur ce premier titre emblématique qu’est « War Pigs ». Ozzy arrive « Generals gathered in their masses - Just like witches at black masses ». C’est la guerre, après les paroles, la machine s’emballe, la batterie tourne, monte dans le rouge et fait démarrer le moteur. Avec ce break où se mêlent différentes montés de guitares… la charleston restant « l’étalon mètre » du titre avant de finir dans un des plus beau final de ce que le Metal nous a proposé définissant les bases de ce que cette musique allait devenir. Prêt à être scandé en « Live ».
Que dire pour « Paranoid » si ce n’est que le titre est si dense qu’il suffit à lui-même tel un « Breaking the Law » d’un Judas Priest qui arrivera 10 ans plus tard, il fut écrit et enregistré en une demi-heure au dernier moment… une légende venait de naître.
« Planet Caravan » est la chanson planante en adéquation avec son époque, délire d’utilisation abusive de cannabinacées d’une période libertaire où la possibilité de rêver n’était pas encore interdite, bercée tel un morceau de Santana distillant ses notes sur un rythme de Bossa Nova.
Une intro, et quelle intro pour l’époque, voix trafiquée et un riff, enfin je voulais dire « LE RIFF » où seule la voix d’Ozzy arrive à le suivre, un riff au service d’une voix ou inversement ; ponctué par une basse métallique à coup de couteau, écrasé par une batterie vrombissante. Rien de mieux depuis « Iron Man ». « Nobody wants him - They just turn their heads - Nobody helps him - Now he has his revenge ».
Essayer donc de balancer une basse aussi groovy sur un solo aussi Metal ! Puis inverser la tendance en mettant une basse métallique sur des solos passés dans une réverbération cosmique.
Le Doom est né là avec « Electric Funeral » et nul par ailleurs. Quand on était jeune on nous disait que la voix ne devait pas suivre le riff de la guitare… et c’est exactement ce que fait Ozzy suivi de la basse qui ne le quitte pas d’une semelle. Gorgé de puissance par la mise en avant de la présence de Ward sur un solo fuzzy très Jazzy, le break en a étonné plus d’un.
Telle une confession, la voix du Mad Man est douce et monocorde avant de devenir très agressive en fin de couplet. Ange ou Demon? « First it was the bomb, Vietnam Napalm » le break, peut-être l’un des plus cinglant où Ozzy nous dit « Oh you, you know you must be blind » marquant à jamais d’un fer rouge une future génération de musicien en herbe. Sur « Hand of Doom », soudain le monde du Metal se rencontre qu’un riff linéaire ne suffit plus et ceux qu’on avait gardé sous le coude pouvaient très bien se retrouver dans la structure complexe à tiroir d’un titre. Et ce, avant que la basse viennent rejeter « les bases » maîtresses tel un ressac sur une grève abandonnée… « It's too late to turn, You don't want to learn - Price of life too high, Now you're gonna die! » Le titre parlait de la dépendance des GI américains à l’héroïne pendant la guerre du Vietnam.
Instrumental, tel un interlude Flower Power, le solo de batterie de « Rat Salad » aurait très bien pu se retrouver chez Sweet Smoke.
« Fairies Wear Boots » est encore un chef d’œuvre, le délire d’un fou, la promenade d’un Ozzy divagant à la vue d’une scène les plus folles « Goin' home, late last night - Suddenly I got a fright - Yeah I looked through a window and surprised what I saw - A fairy with boots and dancin' with a dwarf » (Rentrant à la maison, la nuit dernière - Tout à coup, j'ai eu une frayeur - Ouais j'ai regardé par la fenêtre et surpris de ce que j'ai vu - Une fée avec des bottes dansant avec un nain). L’histoire nous dit d’ailleurs ce qu’il faut prendre pour arriver à de telles visions car à la fin Ozzy ayant perdu la boule va chez son docteur : « So I went to the doctor - See what he could give me - He said « Son, son, you've gone too far. - 'Cause smokin' and trippin' is all that you do. » (Alors je suis allé chez le médecin - Voir ce qu'il pourrait me donner- Il dit: « Fils, fils, vous êtes allé trop loin. - Parce la fumette et la prise de trip est tout ce que vous faites.) …ah bon ?
Il restera un morceau instrumentalisé par un riff assassin faisant passer l’auditoire d’une élévation stratosphérique à une chute brutale dans les abysses. Bad trip !
Le jour où Paranoïd est sorti (le 18 septembre 1970), Jimi Hendrix nous quittait.
Lionel / Born 666