Plus c'est long, plus c'est bon ?
Attention, l'empire de l'ombre nous vient du nord et ne semble pas là pour rigoler, bien au contraire. La Finlande contre-attaque et se pare d'un grand son pour nous clouer sur place. Ainsi a-t-elle choisi le sextette de Kuppio, le déjà très réputé combo Shade Empire, pour nous faire frissonner et sursauter en toute grandiloquence. Omega Arcane, quatrième offrande du groupe, est parue le 6 mai chez Candlelight Records.
Il aura fallu attendre cinq ans pour le successeur du déjà fort excellent Zero Nexus, et à l'écoute des 11 titres et plus d'une heure et quart de musique composant ce nouveau CD, on peut comprendre pourquoi tant rien ne semble avoir été laissé au hasard. Voyez plutôt, quand on associe du metal mélodique blackisant (parfois deathisant, voire gothico-indus dans l'atmosphère) avec des parties orchestres savamment distillées de A à Z, on obtient ce qu'on appelle un "opus magnus". Une tuerie. Même s'il faut moultes écoutes pour l'apprivoiser afin de le comprendre.
Dès le premier morceau intitulé "Ruins" (ci-dessus mais amputé de son début), on s'en prend plein la gueule. Si l'intro semble nous lancer dans une BO à la Game of Thrones façon "Winter is coming" dans ta gueule, le reste se pare d'effets multiples entre agressions riffées blackisantes et voix acérées, le tout relevée d'arrangements magnifiques qu'un Hans Zimmer ne renierait pas. L'alchimie parfaite est ici atteinte et rien, je dis bien rien, ne faiblira sur le reste du brûlot.
Il est clair que c'est sur le travail du claviériste Olli Savolainen que cette magie prend appui, le bonhomme s'est en effet occupé lui-même des symphonies tantôt old school, tantôt modernes, baignant cette sortie dans un monde plus ou moins indescriptible. D'ailleurs on pourrait s'amuser à comparer ce que l'on entend là avec d'autres groupes du genre, mais on peinerait dans la comparaison, Shade Empire forçant ici la porte vers des univers parallèles et une personnalité sans nom.
Très fouillé, il est évident que cet Omega Arcane en laissera plus d'un sur le carreau, sortir indemne et embelli d'une première écoute relevant d'un exploit sans nom. Il ne faudra donc pas, ami lecteur, que tu te perdes et te relâches devant le moindre obstacle complexe de cette chimère musicale, tu pourrais laisser échapper là une révélation, une illusion de grandeur parfaitement assumée et un sommet dans l'art occulte d'un metal sombre et majestueux.
Au niveau des chansons, nous retiendrons particulièrement le superbement agencé "Dawnless Days" qui devrait ravir les fans de Septic Flesh ou Rotting Christ voire (les bons) Dimmu Borgir, l'énormissime "Disembodiment" et ses treize minutes de folie implacable, le single "Ruins" mentionné plus haut et ouvrant les débats avec excellence, ou encore le faussement lumineux "Ash Statues" aux orchestrations à la Epica (mais en bien plus bombastic). Mais nous pouvons faire autant de fois le tour de chaque morceau, il n'y en a pas un qui dépareille vraiment, aucun ne déçoit, Shade Empire se permettant même le luxe de surprendre avec l'interlude "Devolution" quelque peu expérimentale soundtrack placée juste avant une trilogie finale et cataclysmique du meilleur goût.
Vous l'aurez compris, ce Omega Arcane de Shade Empire ne se décrit pas, ne se commente pas, mais s'écoute et se déguste sans soif. Si possible dans le noir, les enceintes à fond résonnant dans toute la pièce (vos voisins apprécieront), les yeux fermés pour un voyage au-delà du Mur. Là où tout est possible, le meilleur comme le pire. Et si nous n'osons pas la note maximale, c'est qu'on espère un prochain opus encore mieux maîtrisé, peut être parfois simplifié sur certains plans, avec une meilleure accroche aussi (c'est ici le SEUL défaut véritable, difficile de retenir de véritables mélodies tant tout est basé sur les ambiances), et là ce sera parfait.
La Folle Fougère
