Qui a dit que le power metal c'était pas le Pérou ?
Qui a osé ?
Parce que pour tous ceux qui croient le style sur le déclin, il existe aussi cette part de nostalgie profonde qui se rappelle à nous lorsque nous découvrions les autres Rhapsody, Angra ou Stratovarius au débuts des années 90. Précédés des Helloween ou Gamma Ray, suivis par les Sonata Arctica, Edguy ou autres Kamelot voire Heavenly pour le cocorico national (quel groupe sous-estimé d'ailleurs, c'est bien la France tiens et son public metal stéréotypé à l'américaine ... bref). Et si vous imaginiez cette époque morte, uniquement basée sur le souvenirs, vous pouvez revoir votre copie car de jeunes groupes semblent prêts à relever le défi. Bien sûr tout le monde se rappelle de Powerwolf ou encore Pathfinder (même si ce dernier aura du mal à survivre le départ de son chanteur) qui ont sorti des gros sons ces dernieres années, on peut désormais rajouter les jeunes Nautiluz dans la liste. Groupe venu du... Pérou !
Voilà comment boucler habilement la boucle.
Nautiluz, 20.000 lieues sous l'amer ? Ultime clone sans intérêt ou surpuissant combo marquant la renaissance du speed power classique ? La réponse se trouvera peut-être entre les deux, mais voila quoi comment rester insensible à ces cavalcades et mélodies en tout genre ? Diantre, le power metal a encore des choses à offrir, n'en déplaisent à ses détracteurs bouffis de metal moderne souvent sans âme.
Comment ouvertement descendre un groupe qui fait l'effort de soigner ses mélodies, ses compos et ses arrangements avec fort peu de moyens et une technique issue de l'autoprod sans soutien financier aucun ? On est bien loin des prods à la Rick Rubin ou Logan Mader là, et c'est tant mieux ! Pas même Sascha Paeth, maestro du genre dans le son, même si on se rapproche du style bien grandiloquent qui fait les Rhapsody d'antan, j'en veux pour preuve cette intro "Somniac Lifeline" qui met les choses au point. Cependant le reste (bien que mâtiné de choeurs et effets sympho utilisés à bon essient) sera bien plus direct et brute, clairement à l'ancienne, faisant de Leaving All Behind, premier opus du combo paru le 15 avril dernier distribué par l'obscur Total Steel Records, un flashback tout droit sorti des 90s glorieuses.
Sans attendre, le ton très Stratovarius du morceau introductif "Under the Moonlight" encaisse les coups bas et survit aux préjugés. On a du mal à croire Nautiluz ainsi sud-américain tant son chanteur fait plus penser à un japonais, y compris dans le phrasé, Galneryus est pas bien loin et on va pas s'en plaindre. Idem au niveau des claviers assez video games qui renforcent le côté easy listening d'un début de CD fort prometteur qui s'offre même un solo Vivaldien.
Qui dit sud-américain dit forcément Angra, pourtant les influences du grandiose quintet brésilien (en mode quasi RIP désormais sauf si Fabio Lione décide de rester pour une aventure studio) sont assez minimes, même dans le feeling. Non, c'est bien plus du côté de l'Europe et du pays au soleil levant qu'il faudra aller fouiner, Nautiluz poursuivant son Tour du Monde en moins de 80 minutes pour ainsi coller jusqu'au bout à son symbolisme Jules Vernien. Edguy semble être une belle base de départ au fond, aussi bien sur quelques bases mélodiques ou clavier discret ("Burning Hearts" rappellera certaines choses de l'album Hellfire Club paru en 2004), les choeurs ou carrément le chant par moments : j'en veux pour preuve le "Scent of Lust" quasi final où on croirait entendre un guest de Tobias Sammet redevenu bon chanteur. Chose impensable donc.
Entre esprit baroque Rhapsody à la Dawn of Victory (ou le plus récent of Fire de "Reign of Terror" sur l'intro de "Chasing the Light"), speed Strato Arctica, même quelques tendances thrash Megadeth ("The Mirror") pour déconner, Nautiluz ne s'arrête jamais et avance bille en tête, piste par piste, bien déterminé à prouver sa fraîcheur ainsi que ses prouesses techniques parfaitement maîtrisées. Peu d'erreur à ce niveau, même la ballade "Unwritten Serenade" un temps poussive finit par être acceptable au fil des écoutes même si on est loin d'un "Glory to the Brave" (best metal ballad for me). Le groupe pousse même le vice du cliché en invitant une chanteuse sur le titre "Eden's Lair". Bon, c'est pas Sharon den Adel ou Simone Simons, mais ça reste correct et permet de poursuivre une tonalité légère entamée par la ballade précédente avant d'attaquer sans complexe le gros morceau de la galette : "The Bard". Meilleur titre dans son rendu et sa structure, un temps hypnotisant avec ses incantations (Mayas ?) d'outre tombe (qui reviendront plus tard en mode Angra ou Shaman pour le coup, jusqu'à ce solo... qui ouais rappelle aussi le Brésil, seul moment de l'album où Nautiluz affirme sa base America del Sur), puis plus progressif et travaillé sur la suite jusqu'au refrain qui marquera les esprits d'emblée (ont-il écouté le dernier Luca Turilli's Rhapsody au fait ? Y a du Alessandro Conti et du maestro italien dans certains passages). Etc etc, on pourrait passer des heures à décrire tout le reste en détail, mais ça vous saoulerait et vous gacherait le plaisir n'est-ce pas ?!
Alors on peut reprocher tout ce qu'on veut à cet album : sa longueur relative pour le genre (55mn c'est un poil trop avouons le), ses titres souvent trop alambiqués (ça manque de direct punch souvent et se perd un peu en tricotage technique, défaut de jeunesse) et évidemment son côté zéro originalité qui peut lasser au fil des écoutes. Mais dans le genre, en l'an 2013, difficile de trouver plus sentimental pour les amateurs d'un genre qui se perd sous la masse des grosses prods et supposées évolutions en tout genre. Et c'est déjà plus agréable qu'un Reinxeed et son chant/sa prod souvent en carton, c'est déjà ça. A suivre !
Note réelle : 7.5/10 (arrondi à 8 du coup pour l'effort autoprod)
La Folle Fougère