Le groupe Saltatio Mortis au Trolls & Légendes 2013


En ce dimanche de Pâques, nous avons renconté trois des musiciens de Saltatio Mortis, qui ont joué en fin de soirée sur la scène du festival Trolls & Légendes à Mons.

La discussion était animée et très conviviale. A vrai dire, nous avons terminé de palabrer longuement après cette interview exclusive pour La Grosse Radio.

Cela nous a fait plaisir de rencontrer des musiciens passionnés, heureux d'être là et qui plus est, très sympathiques !

 

Thomas : Merci de nous accorder cette interview. Pouvez-vous commencer par vous présenter à nos lecteurs ?

Jean Le Tambour : Je suis Jean, appelé « Le Tambour » et joue toute sorte d’instruments dans Saltatio Mortis.

Falk : Je suis Falk Irmenfried von Hasenmümmelstein… Et je joue de la cornemuse et de la vieille à roue et également dans Saltatio Mortis (rires)

Luzi : Je suis Luzi das L ("Luzi le L") et je joue aussi dans Saltatio Mortis, essentiellement de la cornemuse.

Thomas : Très bien ! Maintenant que les présentations sont faites, pouvez-vous nous dire pourquoi vous êtes venus spécialement ici. Trolls & Légendes n’est pas à proprement parlé qu’un festival de musique, bien qu’il y ait de nombreux groupes également. Pourquoi Saltatio Mortis s’est il arrêté ici, justement aujourd’hui pour le jour de Pâques ?

Falk : En fait, c’est très simple. Nous avons déjà fait la rencontre avec des festivals du même genre. En Allemagne, nous avons le Festival « Médiaval » qui va dans cette direction, avec un marché médiéval, des artistes et de la musique. Nous étions également en Hollande, au… ?

Luzi : Elf Fantasy Fair

Falk : Oui, qui nous a énormément plu. L’ambiance là-bas, le fait que chacun peut se présenter en costume, etc. Nous le connaissions à travers notre spectacle médiéval-fantastique en Allemagne. Ici, c’est pareil, nous avons la chance de rencontrer des gens que nous admirons personnellement, dont nous lisons les comics ou les livres. Pour nous, c’est une aventure formidable d’être présent, de faire la queue dans la foule et de regarder tout ce qui se passe. Et il y a incroyablement beaucoup de choses à regarder et à voir. Et c’est pour tout cela que nous sommes particulièrement heureux d’être ici.

Thomas : Vous avez donc eu le temps de faire un petit tour sur le festival ?

Falk : Oui, si nous n’avions pas un interview juste maintenant, on y serait encore ! (rires)
Le Tambour : Et nous y retournons encore tout à l’heure.

 

Saltation Mortis interview Mons 2013

(Le Tambour, à gauche, et Falk à droite - Photo par Thyrd)

 

Thomas : Vous pratiquez également tout ce qui a un rapport avec le jeu ici ? Du jeu de rôles par exemple ?

Falk : Oui, nous sommes tous des joueurs passionnés de jeux de plateau et de jeux de rôles, y compris de jeux de rôles Grandeur Nature. Deux d’entre nous, à savoir Lasterbalk der Lästerliche (NDLR : le batteur et auteur de la plupart des textes) et moi-même avons collaboré à l’écriture pour l’Œil Noir, Shadowrun et l’Appel de Cthulhu. A l’origine, nous venons du coin des auteurs. Moi-même je possède un magasin de comics en Allemagne. Bref, je suis totalement dans mon élément ici !

Thomas : Et les autres ?

Luzi : J’ai joué un peu autrefois, également à l’Oeil Noir et aussi un peu de jeux de rôles Grandeur Nature, mais cela a diminué avec le temps, m’étant davantage consacré à la musique.

Le Tambour : J’ai aussi joué à l’Oeil Noir.

Falk : Nous sommes tous des rôlistes, nous lisons également beaucoup. Donc ici, c’est extraordinaire pour nous. Cela nous va donc droit au cœur.

Thomas : Nous allons parler un peu davantage de la musique. Comment pourriez-vous définir votre musique pour quelqu’un qui ne vous connait pas ? Elle est un peu difficile à ranger dans une catégorie.

Falk : Je comprends que des gens qui n’ont pas d’impression particulière sur nous essaie de nous ranger dans un quelconque tiroir, mais nous avons-nous-mêmes du mal à le faire. D’un côté, nous jouons dans des marchés médiévaux avec des instruments d’époque, sans amplification électrique. Ce sont en quelque sorte nos racines. A un moment, on s’est dit qu’on allait expérimenter avec des instruments modernes. Dans l’histoire du groupe, on a fait énormément d’expérimentations. Nous avons commencé par ajouter de l’électronique dans le son médiéval, et nous sommes actuellement dans un style que pourra le mieux décrire Jean.

Le Tambour : Je crois… (s’adressant à Falk) : Bien joué ! (rires)

Je crois que ce qu’on peut dire, c’est que nous faisons de la musique qui fait bouger les gens et ceci de plusieurs manières. Premièrement, corporellement. Notre musique t’amène à sauter, à danser, à être joyeux, mais elle te fait bouger également à l’intérieur. Certaines de nos chansons font bouger tes émotions, tes sentiments. Certaines chansons sont aussi peut-être un peu plus calmes, ce sont peut-être des ballades, mais elles te font bouger quand même. De la musique qui te fait bouger, avec des instruments modernes et anciens, et cela dans le grand domaine de la musique rock, dans la formation d’aujourd’hui, avec guitares électriques et cornemuses, des vieilles à roues. Il s’agit bien d’une forme de musique rock, mais particulière car elle te bouge. Tu ne peux pas rester immobile, tu dois sauter, tu dois danser et tu dois aussi peut-être réfléchir un peu sur les textes.

Falk : Ce qui sera difficile ici. On ne sait même pas si on est connu en France par exemple.
Le Tambour : … Si on est connu en Belgique, ici en Wallonie.

Falk : On est en Wallonie ou en Flandres ?

Thomas : En Wallonie, la partie francophone de la Belgique donc.

Falk : On le sait même pas, et on courre à travers ce génial marché « médiéval » et on se dit, il doit y avoir une scène. Il doit y avoir des gens qui ont commencé comme nous il y a une quinzaine d’années par exemple pour construire tout ça, sinon ça ne ressemblerait pas à ça aujourd’hui. On s’est également battus pour qu’on ne nous catégorise pas chez les cinglés, et que nous avons maintenant une véritable scène en Allemagne. Nous avons participé aux premiers jeux de rôles Grandeur Nature, nous avons participés aux premiers jeux de rôles sur table. Autrefois, quand j’étais quinze ou seize ans, à l’école, Dungeons & Dragons venait de sortir et j’y ai joué immédiatement, car j’ai rencontré très tôt des auteurs. C’était une évolution, et c’était moi l’outsider, partout. J’ai présenté dans le cours d’allemand des textes de Terry Pratchett comme lecture, comme littérature, et on s’est moqué de moi lorsque j’ai parlé de la Tortue (NDLR : qui, dans la mythologie du Disque-Monde soutient l’Univers connu…). Quand je vois tout ça ici, que ça fonctionne comme chez nous, que les gens se donnent beaucoup de peine  pour réaliser tout ça, et du coup, je sais que je ne suis plus tout seul dans le monde. Autrefois, il n’y avait que très peu de gens qui faisaient ce genre de truc. Et là je me dis que ça existe aussi en France ou en Belgique, et je n’en ai aucune idée ! Je lis des magazines français sur les figurines, comme Ravage par exemple, mais à part ça, je n’en sais rien. Mais cela veut dire qu’il doit existe aussi des gens qui peuvent apprécier notre musique. Du coup, ici c’est aussi l’occasion que des gens apprennent à nous connaître, mais c’est là que c’est difficile à cause de la langue. On s’est dit que tous les groupes du monde chantent en anglais. C’est peut-être un peu différent en France, mais chez nous, si on veut avoir du succès, il faut chanter en anglais. Mais du coup, les gens ne comprennent pas ce qu’on chante. On a peut-être un fragment du texte en tête, mais on ne peut pas s’intéresser réellement au contenu de la chanson. Il faut traduire le texte si on ne parle, comme beaucoup de gens, pas couramment l’anglais. On veut que les gens comprennent ce qu’on chante et c’est pour cela que l’on chante dans notre langue maternelle.

 

(photo: Thyrd)

 

Thomas : Quelqu’un qui s’intéresse à vos textes peut toujours faire des recherches et traduire. Il y a beaucoup de groupes qui ont leur propre langue. Par exemple, il y a des groupes qui chantent en Occitan, pourtant peu de gens le comprenne.

Falk : Ou en Breton. J’aime bien aussi la musique bretonne, mais je n’y comprends rien !

Thomas : Je pense que les gens vont déjà apprécier votre langue. En France, il y a également une scène mélangeant médiéval et moderne, mais pour moi, votre musique est typiquement allemande. Je fais peut-être un raccourci et je mélange les genres, mais les groupes comme Corvus Corax et ce genre, sont pour moi des « groupes allemands ». Je pense que les français qui apprécient cela vont aux concerts pour entendre cela précisément. En France, nous avons bien sûr des groupes de ce genre, mais en général cela tend plus vers des influences métal/black/pagan ou bien totalement folkloriques, sans guitare pour schématiser. Vous avez donc un marché français gigantesque qui s’ouvre à vous !

Falk : Ah oui ?

Thomas : Il y a par exemple un festival qui s’appelle Cidre& Dragon.

Falk : Excellent nom !

Thomas : Ca se passe en Normandie, et il mélange la fantasy avec la musique. Je dis ça en passant, car cela semble vous intéresser… Et si vous en entendez parler un jour, vous pouvez y aller !

Falk : Très bien, très bien !
 

(Luzy das L, photo par Thyrd)

 

Thomas : Mais revenons à l’actualité musicale. Avez-vous des projets d’album ?

Le Tambour : Oui, deux ! Un CD sort la semaine prochaine, il s’appelle Manufactum III.

Falk : Du latin manufactum, qui veut dire « fait à la main ». Il s’agit du troisième CD d’une série de live enregistrés dans des marchés médiévaux.

Le Tambour : Il était enregistré à un gros festival à Hambourg l’an passé. Il y avait huit milles personnes devant la scène.

Falk : En tout, il y avait 35 000 personnes.

Le Tambour : Mais avec les 8000 personnes devant la scène, on a enregistré et on s’était dit, avec ça on fera notre prochain CD live. Il s’agissait d’un concert purement médiéval, sans guitare électrique, sans amplification, seulement à l’ancienne, avec de vieux instruments. Et pour ne pas faire que des CD médiévaux, on s’est dit qu’on allait encore faire un album rock, qui sortira en août.
Falk : Le 16 août. Et qui s’appelle (en chœur) Das Schwarze Einmahl Eins. Alors « une fois une… »

Thomas : Ca fait un !
(rires)

Falk : Oui, exactement.  En Allemand, l’expression « Einmahl Eins », cela désigne ce que les enfants apprennent à l’école.

Thomas : Nous faisons ça aussi en France ! (rires).

Falk : Comment cela s’appelle en français ?

Thomas : Nous disons « la table de multiplication ».

Falk : Voilà, pour nous le choix du nom…

Le Tambour : C’est comme un livre d’apprentissage.

Falk : Comme un système logique.

Le Tambour : Et le « Schwarze » (noir), c’est le le livre noir des apprentissages.

Falk : Notre table des multiplications. La règle pour tout. C’est ainsi que l’on écrit la musique à partir du 16 août 2013 (rires). Il y aura une césure dans l’histoire du monde, avant et après (rires).

Le Tambour : On voulait dire « voilà, ça c’est notre manière de faire la musique ». On publie ce CD quasiment comme collection magique, comme un livre de sorcellerie. Et il y aura plein de superbes nouvelles chansons.

Falk : 17 chansons seront sur l’album.

Le Tambour : 16.

Luzy : Peut-être que tu auras bientôt 17 ans. (rires)

Falk : Ah oui, 16 !

Thomas : On va reprendre avec 1x1… (rires)

Falk : Nous avons mis dans cet album beaucoup de critiques envers les temps modernes, ce que nous trouvons mauvais dans notre société. Si on l’écoute, il faudrait vraiment chercher la traduction quelque part.

Le Tambour : Autrefois, au moyen-âge, les troubadours faisaient la même chose. Ils voyageaient partout et étaient les seuls qui pouvaient dire à travers leurs chansons ce qui n’allaient pas.

Falk : Le Roi, c’est de la merde ! Mais bien sûr, tu parles du Roi quand tu penses Empeureur…

Le Tambour : Tu ne disais pas « le Duc vous vole », mais tu disais quelque chose d’autre. Mais les troubadours avaient cette occasion de critiquer la société, d’exprimer ce que tout le monde pensait tout bas. Nous pensons que les musiciens de maintenant ont aussi le rôle de parfois dire ce genre de choses, d’être critique, de se poser les questions. Est-ce que tout va bien avec le monde d’aujourd’hui ? Nous le faisons bien sûr dans notre langue, en allemand, mais avec une langue un peu ancienne. Nous essayons d’écrire des textes qui sonnent bien, qui sont issus d’une langue historique, bien qu’il s’agisse d’un allemand moderne.

Falk : On a également notre première véritable chanson en anglais, donc une expérience. Et il s’agit bien sûr d’une chanson de rébellion écossaise. (rires)
Nous avons également la plus ancienne poésie amoureuse allemande en haut allemand médiéval, qui est absolument géniale. Nous sommes très heureux de sortir cet album.

Thomas : Je suis également impatient maintenant !

Falk : On va avoir également un artwork passionnant. Il s’agit vraiment d’un gros projet qui nous passionne et on est très impatient.

Saltatio Mortis interview Mons 2013

(photo: Thyrd)

 

Thomas : Pour que vous puissiez encore visiter un peu les couloirs du festival, nous allons terminer avec une dernière question : en un mot, pouvez-vous définir Saltatio Mortis en 2013 ? Ici, maintenant, qu’est-ce que c’est Saltatio Mortis pour vous ?

Falk (faisant des signes montrant que je suis fou de poser une telle question !) : le titre de notre dernier DVD.

Le Tambour : Ah oui ! En trois mots.

Falk : « Wild und Frei » (Sauvage et Libre !)

Le Tambour : Oui, sauvage et libre !

Luzy : A vrai dire, il n’y presque rien à rajouter. Je dirais «  joie de vivre ».

Falk : Oui, Le Tambour, tu es le sauvage, je suis le libre et tu es le joyeux ! (rires)

Thomas : Merci beaucoup !
 

Thomas Orlanth



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