Avec les récentes déclarations de Christopher Johnsson, fustigeant les conditions de tournée en Europe suite à l’inflation et annonçant son souhait de réduire les prestations live, les amateurs du collectif suédois savaient que cette date parisienne à La Machine n’était pas à louper. De plus, fort de la récente trilogie Leviathan qui a été bien accueillie par son public, Therion était particulièrement attendu en ce dimanche soir. La Machine n’affiche pas complet mais lorsque nous pénétrons dans la salle, l’audience est composée d’un noyau d’irréductibles, dont la cause à Therion est totalement acquise.
Satra
Pour l’heure, place à Satra, combo finlandais de metal symphonique fondé en 2020 et dont le premier opus est sorti tout juste deux jours avant la date de ce dimanche. Emmené par la chanteuse Pilvi Tahkola, le quatuor manque d’ailleurs un peu d’expérience, ce qui se remarque par le manque d’aisance de la vocaliste, notamment lorsqu’elle s’adresse au public entre les titres.
Du côté de la musique, le quatuor propose un metal symphonique relativement classique, fortement influencé par le Nightwish des débuts, ainsi que par la tête d’affiche du jour (notamment dans le chant lyrique). On regrette toutefois que le combo n’ait pas intégré de claviériste live, l’ensemble des parties orchestrales étant jouées sur bande, ce qui limite un peu la formation et l’empêche totalement de se départir de cette contrainte. En résulte également un manque de dynamique sur l’ensemble de son set, notamment en raison des parties de batterie de Jani Myllymäki (par ailleurs claviériste du groupe en studio) qui apparaissent un peu simplistes et auraient mérité un peu plus de complexité et de vélocité pour rappeler les grandes heures du power / sympho à la finlandaise.
Pour ajouter un peu de dynamisme aux compositions, Nikko Valjus (guitare) se permet tout de même quelques incartades du côté du chant growlé, auquel le public réagit poliment. Malgré des similitudes avec la musique de Therion, le metal symphonique proposé par Satra manque encore un peu de complexité harmonique et les musiciens d’un peu d’aisance en live pour pleinement convaincre.
Setlist Satra
From the Night
Sand of Time
Travellers
Stars
Secret Place
Shadow Engine
Scarecrow
Golden City
Therion
Après un court entracte, les lumières s’éteignent et le combo suédois entre en scène au son du classique « The Blood of Kingu ». Débuter par ce titre tiré de Sirius B, un opus généralement apprécié par les fans du groupe, permet à Therion de marquer des points dans la foulée, le petit parterre qui constitue la fosse de la Machine s’emballant immédiatement.
Casquette vissée sur la tête, Thomas Vikström en impose d’emblée avec son timbre de voix puissant et profond. Pour cette tournée, il est épaulé par la soprano Lori Lewis, de retour dans la formation (et qui sera d’ailleurs particulièrement acclamée) et Rosalia Sairem, intégrée au combo depuis le début de la trilogie Leviathan.
Cette trilogie d’album, plus classique dans la forme que les sorties des années 2010 (l’album de reprise les Fleurs du Mal ou le conceptuel Beloved Antichrist), sera d’ailleurs bien mise en avant dans la setlist, le groupe lui consacrant pas moins de sept titres. Et malgré leur sortie récente au regard de la longue discographie de Therion, les titres de Leviathan (I, II et III) sont bien acclamés par les fans de la formation suédoise et ce en dépit d’harmonisations et de lignes de chant parfois complexes. Cette complexité des harmonies vocales et le chant parfois opératique du trio de vocaliste n’empêchent toutefois pas le groupe de proposer des parties parfois directes basées sur le riffing de Christopher Johnsson, le maître de cérémonie.
Ce dernier occupe le devant de la scène, tandis que son acolyte Christian Vidal reste plus en retrait en raison de l’étroitesse des planches. On note également le recrutement de Christopher Davidsson (Majestica) à la quatre-cordes, ce dernier faisant preuve de beaucoup de présence scénique et semblant totalement à son aise dans cette formation, lunettes de soleil sur le nez.
Face au public français, il semble logique que le collectif interprète deux extraits des Fleurs du Mal (et un troisième court extrait un peu plus tard, nous y reviendrons), avec « Mon Amour, Mon Ami » et « La Maritza ». Le public constate toutefois l’accent particulièrement prononcé de Lori, qui empêche de distinguer parfaitement les paroles dans la langue de Molière, mais peu importe, les deux reprises remportent un franc-succès.
Les trois vocalistes s’adressant tour à tour au public parisien entre les chansons rendent le set particulièrement dynamique. On apprécie d’ailleurs de voir l’émotion de Lori Lewis, qui verse une petite larme lorsque sa comparse Rosalia Sairem la présente au public en lui souhaitant un bon retour dans le groupe.
Le groupe enchaîne les titres, n’hésitant pas à extraire quelques morceaux de son répertoire ancien (Theli et Vovin), et balaye presque l’ensemble de sa carrière. Tout juste pourrait-on reprocher au combo de n’avoir extrait que « Son of the Staves of Time” comme seule composition de Gothic Kabbalah, surtout vu l’accueil réservé à ce dernier.
Au moment du rappel, le collectif revient pour interpréter le classique « The Rise of Sodom and Gomorrah » avant de glisser un petit extrait a cappela de Les Fleurs du Mal : en effet, Thomas Vikström fait chanter la foule sur « Les Sucettes », prouvant une fois de plus le lien particulier qui unit Therion à la France. « To Mega Therion » (et son titre emprunté à Celtic Frost) clôt la soirée de la plus belle des manières. Si les Suédois devaient désormais délaisser le public européen pour des raisons économiques lors de leurs prochaines tournées, nul doute que le concert de ce soir aura été un moment riche en émotion et un temps fort de la carrière de Therion dans notre pays.
Setlist Therion :
The Blood of Kingu
Ruler of Tamag
Birth of Venus Illegitima
Tuonela
Twilight of the Gods
Mon Amour, Mon Ami
La Maritza
Leviathan
Asgard
Morning Star
Black Diamonds
Ginnugagap
Litany of the Fallen
The Sirens of the Woods
Aeon of Maat
Lemuria
Sitra Ahra
Quetzacoatl
Eye of Algol
Son of the Staves of Time
Rappel :
The Rise of Sodom and Gomorrah
To Mega Therion
Photographies : Sara Jisr // Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe