Mike Patton et Phil Anselmo ont un point commun ( et vous avez dix minutes pour trouver lequel avant d'avoir un gage comme écouter toute la journée « You Say Yes », la pire chanson écrite par Judas Priest, par exemple ), ou plutôt un trait de caractère : Ce sont des hyper créatifs. En effet, les deux bonhommes, alors qu'ils assuraient avec prestance leur rôle de frontman dans deux formations majeures des années 90 ( faut-il les citer ? Je pense que celui ou celle qui fait l'effort de lire cette chronique connaît au moins l'une des deux ), ont commencé à éprouver une énorme boulimie à être partout, même souvent où on ne les attendait pas forcément, et à multiplier les projets et collaborations. Il y a sûrement une explication psychologique ( qui a dit hyperactivité ? ) à ça mais je ne m'aventurerais pas sur cette pente, mon rôle est de parler musique et non de maux de tête.
Attardons-nous sur le cas Anselmo ( car après tout c'est de lui, ou plutôt de son nouveau projet, dont nous allons causer ), le gaillard en plus de quinze ans a alterné réussites ( l'inoubliable Down ), trucs plutôt sympas ( Superjoint Ritual ) et d'autres choses franchement plus indispensables ( je pense en disant ça à son projet Black Metal Viking Crown qui ferait passer n'importe quel combo « pandas maléfiques ayant enregistré leur démo dans la cave parentale et sur le magnétophone offert par mamie pour la communion du petit frère du bassiste » pour les nouveaux Emperor tellement on a l'impression de perdre son temps à écouter ce...Truc ). Bref le Philou ( ouh ouh ), on a un peu de mal à le suivre parfois.
Sa priorité en 2013 semble être son...Groupe solo ( car c'est présenté comme un projet Lui, la preuve : Il y a même son faciès sur la pochette, mais avec un groupe derrière ) Philip H.Anselmo And The Illegals donc qui après avoir sorti un split EP ( War Of The Gargantuas, justement chroniqué par La Grosse Radio en début d'année ) nous propose cet été son premier album Walk Through Exits Only, disponible sur le propre label du monsieur Housecore Records à partir du 19 juillet. Autant l'avouer, avant d'écouter ce disque, j'ai pensé très fort à une magnifique, mais défunte, panthère...Trop peut-être. Car ce Walk Through Exits Only m'a plutôt déçu.
Cette première réalisation n'est pas mauvaise, elle se laisse plutôt écouter dans l'ensemble, mais voilà de la part de quelqu'un comme Philip Anselmo on était en droit d'attendre mieux que ce Metal rapide, torturé et...Bourrin. Car dès la première piste, la courte « Music Media Is A Whore » ( dans laquelle Anselmo règle ses comptes avec le business de la musique ), le ton est donné : A fond les manettes ! Le style pratiqué par Philip H. Anselmo and the Illegals oscille entre un Thrash mâtiné de parties sludge parfois ( le plutôt sympathique « Betrayed » et son alternance refrain scandé façon Hardcore et parties lentes ) et un Groove Metal renvoyant souvent à l'ancienne formation du frontman, mais...Sans le groove justement. Non pas que Bennett Bartley et Jose Manuel Gonzales, respectivement bassiste et batteur des Illegals, ne soient d'exécrables musiciens, de même «Battalion of Zero » ( avec son gros riff thrash et ses solos hystériques renvoyant à la divine époque Far Beyond Driven/The Great Southern Trendkill), « Usurper Bastard's Rant » ( avec ses dissonances, qui rappellent le regretté Dimebag Darrell, effets guitaristiques que l'on retrouve aussi sur « Bedroom Destroyer ») ou « Walk Through Exits Only » ( avec justement un petit break groovy mais où l'on déplore quand même l'absence de l'ancienne section rythmique de Pantera ) ne soient de mauvais titres mais peut-être auraient-ils sonné mieux avec Vinnie Paul ( mais vu l'animosité que semble encore vouer ce dernier à l'encontre de Anselmo, c'est plutôt mal barré de les revoir jouer ensemble un jour ) et Rex Brown. Philip H. Anselmo and the Illegals essaye de retrouver la magie du Pantera des glorieuses 90's mais voilà...On a un peu tendance à s'ennuyer parfois sur les 40 minutes que dure ce Walk Through Exits Only.
Et puis...Le cas Anselmo, j'ai énormément de respect pour le chanteur/compositeur, je lui ai même toujours trouvé un certain talent de parolier ( et les textes, abordant les obsessions habituelles du vocaliste, de cet album ne m'ont pas fait penser le contraire ), je trouve par exemple qu'un album comme The Great Southern Trendkill ( ah ce « Flood » si...Profond et poignant) est un véritablement accomplissement artistique, j'aime l'Homme avec ses blessures ( la perte de son ami Dimebag entre autres ) et ses addictions ( il semble avoir renoncé aux drogues dures mais a toujours une fâcheuse tendance à lever le coude si j'en crois ceux qui ont pu le croiser lors du dernier Hellfest ), le gars sait aussi bien exprimer la colère que la tristesse et possède une vraie voix. Mais là, sur ce Walk Through Exits Only, il ne fait que...Hurler, bon, ce projet est peut-être avant tout un défouloir pour lui et il réserve son feeling pour le prochain Down par exemple mais j'aurais aimé le voir « poser » un peu plus son organe vocal par endroits. Et puis choisir le moyen « Bedridden » ( qui donne l'impression d'être le morceau en trop sur Walk Through Exits Only ) comme premier extrait illustré en vidéo...Bref, y en a qui vont aimer peut-être, le clip est marrant
c'est vrai.
Il y a cependant de bonnes choses sur ce premier album, à commencer par le morceau clôturant le disque « Irrelevant Walls and Computer Screens », titre avec de nombreux breaks, un rythme d'ensemble un peu plus mid-tempo, une avalanche de solos et une fin bien sombre et torturée avec ce riff dissonant, assez Indus, répété à l'envi, ce riff sabbathien qui accentue le côté tourmenté et tenaillé, citons ce passage ambient/psyché aussi avec des bruits oppressants et ce fade out qui laisse augurer du meilleur pour la suite qui ne m'ont pas laissé indifférent non plus. On retrouve un peu les mêmes idées sur la fin de « Betrayed » ( avec ces notes de piano qui peuvent faire penser à Nine Inch Nails ). Mais voilà, pour mes oreilles un peu trop exigeantes ( ou peu sensibles au « tout à fond, à fond, à fond» ), ce premier jet de Philip H. Anselmo and the Illegals est donc une semi-déception, mais bon il n'est peut-être que le brouillon du très bon à venir qui sait ? Sinon...Il est prévu pour quand déjà le prochain Down ?
Liste des morceaux :
1.Music Media Is My Whore
2.Battalion of Zero
3.Betrayed
4.Usurper Bastard's Rant
5.Walk Through Exits Only
6.Bedroom Destroyer
7.Bedridden
8.Irrelevant Walls and Computer Screens