Rotting Christ + Borknagar + Seth – Toulouse, 24.10.2024

Le moins que l’on puisse dire c’est que l’association toulousaine Noiser a pris un formidable essor depuis quelques années. En effet, la structure n’a de cesse de proposer une programmation de qualité avec beaucoup de passion. Ce soir, l’association a mis les petits plats dans les grands en investissant la nouvelle salle La Cabane pour un concert qui fera date. En effet, au menu de ce 24 octobre 2024, c’est un plateau composé de Rotting Christ, Borknagar et Seth qui est proposé au public toulousain. Autant dire que pas mal de monde s’est donné rendez-vous aux abords de la Cabane pour répondre à l’appel de Noiser...

Seth

Fort de son nouvel album, La France Des Maudits sorti le 14 juillet dernier chez Season Of Mist, le combo bordelais Seth avait à cœur de présenter au public ses nouvelles compositions et son nouveau set. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le groupe a réussi son coup en mettant en place une ambiance sombre aux accents atmosphérique dès le premier titre, « Insurrection ». Qui plus est le jeu de scène du vocaliste Saint Vincent, vêtu d'une énorme cape rouge, ajoute un côté onirique malsain à l’ensemble et plonge directement les spectateurs dans l’univers musicalement riche de Seth.

En effet, depuis sa création en 1995, le groupe a pu explorer de nombreux pans du black metal pour au final n’en faire qu’un : le sien. De fait, les compositions de ce soir permettent de bien appréhender les contours de la musique des Bordelais qui mélangent le côté brutal, épique et atmosphérique du black (« La Morsure Du Christ », « Métal Noir », ...). De plus, les paroles en français amènent beaucoup de relief à l’ensemble et donnent vraiment corps aux morceaux (« La Destruction Des Reliques », « Et que Vive Le Diable ! »).

Seth à Toulouse - Crédits photos : Vincent BN
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

Sur les planches, le groupe est bien en place et, malgré des lumières qui ne font pas honneur à la grandiloquence de sa musique et à son jeu de scène, délivre une prestation nerveuse. À ce titre, le guitariste Drakhian et le bassiste Esx Vnr occupent bien en l’espace et haranguent le public tandis que Saint Vincent focalise toutes les attentions au travers de ses jeux de cape et d’un chant percutant (« La Destruction Des Reliques »). De leurs côtés, le guitariste-fondateur Heimoth et le claviériste Pierre Le Pape restent plutôt discrets par rapport à leurs compères mais ô combien efficaces !

Bref, en l’espace de sept titres d’une redoutable efficacité, Seth peut quitter la scène avec la satisfaction du devoir accompli : le black metal des Bordelais a fait mouche et le groupe a fait montre d’un indéniable savoir-faire. La bande à Heimoth peut donc s’enorgueillir d’être l’un des fers de lance actuels du black metal français. Espérons que le groupe revienne poser ses amplis par chez nous... mais cette fois, en tête d’affiche ! Car sept titres c’est bien, mais c’est peu...

Setlist Seth

  • Insurrection
  • Métal Noir
  • La Destruction Des Reliques
  • La Morsure Du Christ
  • Et que Vive Le Diable !
  • Hymne Au Vampire, Acte I
  • Hymne Au Vampire, Acte III

Borknagar

Après l’infernale déferlante sonore de Seth, le changement d’ambiance est radical à l’arrivée des Norvégiens de Borknagar sur la scène de La Cabane. Ainsi, l’univers viking metal progressif et mélancolique du groupe prend le public à revers dès les premières notes de « Nordic Anthem » portées par le chant clair et aérien du claviériste Lars A. Nedland. Après quelque petites minutes d’adaptation, les spectateurs sont vite happés par la musique des Scandinaves dont les compositions à tiroirs et les structures alambiquées sont intéressantes (« The Rhymes Of The Mountain », « Up North », ...). Qui plus est, l’alternance des chants clairs entre Lars A. Nedland et le bassiste ICS Vortex permet de donner du peps à l’ensemble et de varier les approches.

Étonnamment, mis à part les titres « Nordic Anthem », « Moon » et « Summits », le groupe ne va pas mettre en avant sa dernière offrande, Fall, sortie en février 2024, mais plutôt se concentrer sur ses 3 derniers albums en date (Fall, True Noth et Winter Thrice) pour nous servir sa musique tout droit venues des éternels fjords scandinaves. Derrière ce parti pris assez audacieux, Borknagar dévoile au public toulousain les contours de son évolution musicale initiée depuis 2016 avec la sortie de Winter Thrice, avec parfois quelques petites incartades du côté de chez Wardruna (« Nordic Anthem »).

Borknagar à Toulouse - Crédits photos : Vincent BN
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

Sur scène, le groupe est relativement statique, bien concentré dans son jeu à l’image du guitariste Øystein G. Brun, ce qui n’empêche pas les Norvégiens de communiquer avec l’audience entre les morceaux. Seul le guitariste Jostein Thomassen, côté cour, occupera bien son espace avec son un jeu de gratte virevoltant. L’homme prendra parfois le chant lead pour délivrer des growls bienvenus comme sur « The Rhymes Of The Mountain », à la plus grande joie des spectateurs.

En définitive, malgré le fait que l’univers de Borknagar ne soit pas vraiment dans la même lignée que ceux de Seth et Rotting Christ, le groupe norvégien a su tirer son épingle du jeu et proposer un set assez singulier et bien mené. Alliant allègrement force et beauté, la musique du quintet a su transcender les genres et toucher en plein cœur le public toulousain. Un tour de force ? Pas loin...

Setlist Borknagar

  • Nordic Anthem
  • The Fire That Burns
  • The Rhymes Of The Mountain
  • Up North
  • Voices
  • Colossus
  • Moon
  • Summits
  • Dauden
  • Winter Thrice

Rotting Christ

Après un rapide changement de plateau, c’est enfin à Rotting Christ, les héros de la soirée d’investir les planches sous la liesse générale. Visiblement heureux de cet accueil, les Grecs arborent de larges sourires et remercient chaleureusement le public d’être venu. Il faut dire que la tournée du groupe se fait dans le cadre des 35 ans de black metal de Rotting Christ. Et même si les frères Tolis, Sakis (chant, guitare) et Themis (batterie) restent les seuls membres fondateurs de la formation hellénique encore en place, force est de constater que l’aura du groupe est bel et bien vivace !

D’ailleurs, dès l’opener « Aealo », l’audience bouge comme un seul homme au rythme imposé par les frères Sakis : le son est bon et la musique opère comme un rouleau compresseur qui écrase tout sur son passage. Mais tout comme Borknagar un peu plus tôt, Rotting Christ ne s’attardera pas sur son dernier album en date, Pro Xristou sorti en mai 2024 puisque seuls deux nouveaux morceaux sont mis à l’honneur : « Pretty World, Pretty Dies » et « Like Father, Like Son » (qui passent très bien l’épreuve du live). En effet, pour fêter ce 35ème anniversaire sous l’égide du black metal, le groupe a choisi de faire un large tour d’horizon de son impressionnante discographie au travers de classiques comme « Non Serviam », « In Yumen-Xibalba », « The Sign Of Evil Existence », « Grandis Spiritus Diavolos » ou la reprise de Thou Art Lord, « Societas Satanas ».

Rotting Christ à Toulouse - Crédits photos : Vincent BN
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

Bref, Rotting Christ fait plaisir à ses fans et ces derniers le lui rendent bien. En effet, ça bouge beaucoup dans le pit et l’arène de La Cabane est en fusion ! Sur les planches, ça bouge aussi pas mal du côté de Kostas Heliotis (basse) et Kostis Foukarakis (guitare) qui occupent tout l’espace qui leur est dévolu. Toutefois, c’est Sakis Tolis, le véritable maître de cérémonie, qui focalise toutes les attentions. En effet, malgré le poids des années, l’homme est toujours aussi percutant, que ce soit dans son jeu de guitare ou dans son chant surpuissant (« Elthe Kyrie », « Demonon Vrosis »). Qui plus est, sa communication quasi permanente avec le public entre les morceaux permet de mettre en place une belle énergie durant tout le set. On sent que l’homme joue avec ses tripes et qu’il vit sa musique à fond. L’échange avec les fans en devient donc très prégnant.

Au fil d’un concert d’environ 1h30, Rotting Christ survole son sujet et dévoile une redoutable efficacité qui ne souffre d’aucun temps mort. Mieux encore :  le groupe semble vouloir accélérer en fin de set en avec la doublette « Grandis Spiritus Diavolos » et « The Raven » qui finira de mettre tout le monde à genoux. Après avoir quitté la scène quelques instant, les Grecs reviendront une dernière fois avec « Noctis Era » pour clore ce concert impressionnant de maîtrise. Quelle gifle !

Rotting Christ à Toulouse - Crédits photos : Vincent BN
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

Au final, ce set surpuissant de Rotting Christ a mis tout le monde d’accord : les Grecs sont les plus forts. Du haut de ses 35 ans d’une carrière ô combien prolifique, le groupe a en encore sous le pied et a démontré qu’il portait encore bien haut l’étendard du metal extrême.

Setlist Rotting Christ :

  • Aealo
  • Pretty World, Pretty Dies
  • Demonon Vrosis
  • Kata Ton Daimona Eaytoy
  • Like Father, Like Son
  • ...Pir Threontai
  • Elthe Kyrie
  • The Sign Of Evil Existence
  • Non Serviam
  • Societas Satanas
  • In Yumen-Xibalba
  • Grandis Spiritus Diavolos
  • The Raven
  • Noctis Era


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