En ce 10 septembre, nous assistions à ce qui allait être un des derniers concerts organisé à la Scène Bastille avant le changement de propriétaire. On a tous des ressentis différents sur les salles de concert. Cela peut dépendre de l’acoustique, de l’architecture, de la programmation, ou encore du personnel de la salle. Depuis un certain temps, la Scène Bastille traînait une réputation mauvaise élève parmi les salles parisiennes, du fait d’une longue série de retours, disons le, acerbes, venant du public et même parfois des groupes !
Pour ce concert de Dirty Shirt, Dreadful Silence et 6:33, la salle a été fidèle à sa réputation, trois fois hélas. Et pourtant, les trois groupes ont tout donné sur scène, faisant fi de ces conditions difficiles pour tenter de donner au public un aussi bon concert que possible.
6:33
Le groupe a déjà commencé son concert lorsque nous entrons dans la salle, du fait d’une gestion pour le moins avant-gardiste de la billetterie/vestiaire. [se référer à l’intro pour comprendre]
C’est un 6:33 en petite configuration qui se produit sur scène ce soir-là, puisqu’un des claviéristes manque à l’appel. Le groupe masqué a débuté son set avec la progressive "Order of The Red Nose", et révèle un Rorschach en grande forme physique. Enchaînant les mimiques scéniques, il fait son show, et aide le groupe à recréer l’ambiance bizarre et décalée qu’on retrouve sur ses deux superbes albums.
Malheureusement, ce dernier est quelque peu sous-mixé, faisant qu’on a du mal à bien l’entendre à l’endroit où nous sommes situés dans la salle. Heureusement, l’instrumental est plutôt bien équilibré et permet d’entendre distinctement chaque instrument : La basse claque bien, le clavier délivre son lot de sonorités originales et la guitare laisse entendre de bons riffs ! 6:33 enchaîne ensuite avec la très catchy " I Like It ". En tendant l’oreille, on entend que les parties vocales d’Arno Strobl sont jouées par un sample, ce qui est un peu décevant, même si on comprend bien qu’il serait difficile pour Rorschach d’assurer ses propres parties et celles d’Arno. Sur la magnifique "Silly Little Thing", un clown déguisé monte sur scène chanter avec Rorschach, sympa !
Puis, notre chanteur masqué nous annonce que "MIDGETS" sera la dernière chanson de 6:33 pour ce soir, nouvelle que le public reçoit avec dépit. Ce même public aura tout de même pu se consoler avec un beau final, qui consacre une nouvelle fois qu’une musique alambiquée peut totalement être transposée sur scène avec un résultat agréable visuellement.
6:33 a donc assuré un bon concert, non exempt de quelques défauts. En creusant on s’apercevra qu’une bonne part de ces défauts n’est pas de leur fait. [se référer à l’intro ²] On connaît leur choix délibéré de ne pas avoir de batteur, qui peut se justifier. Mais, lorsqu’ils sont sur scène, on ne peut pas s’empêcher de s’imaginer ce qu’un cogneur masqué pourrait leur apporter, ne serait-ce que visuellement. En espérant pouvoir revoir ce groupe talentueux dans de meilleures conditions bientôt !
Dreadful Silence
Nous avions gardé un bon souvenir de la performance Dreadful Silence à la finale du Headbang Contest 2013. Allaient-ils être à la hauteur ? Avant le début du concert, un homme en costume et coiffé d’un chapeau haut de forme monte sur scène et énonce au public un certain nombre de consignes de sécurité, comme de ne pas nourrir les clowns, tout cela sur une musique de cirque. Les musiciens arrivent donc sur scène peinturlurés, et lancent un concert énergique.
Musicalement, on oscille entre néo métal et hardcore, dans un style qui évoque Slipknot. Les riffs sont tranchants, les rythmiques lourdes, et le chant growlé. Au niveau de la mise en place, rien à dire, c’est nickel, et les clowns font bien les pitres sur scène, donnant rapidement une bonne ambiance au concert. Dès la deuxième chanson, un moshpit se crée, et restera bien actif pendant le reste du concert.
La maîtrise vocale du chanteur est toujours impressionnante, et Dreadful Silence aura été le groupe avec le meilleur son de la soirée. On pourra cependant regretter le manque d’originalité des compositions du groupe, qui sonnent parfois trop comme du "déjà-entendu". Finalement, Dreadful Silence est presque plus efficace lorsqu’il se fait plus posé et ambiant, mais plus plaisant à l’écoute.
En tout état de cause, le public est très content, et en redemande. Dommage que leur homme de scène à chapeau ne soit pas plus communicatif avec la foule, comme il l’avait été au Headbang contest : ses harangues ponctuées de blagues étaient plutôt efficaces ! Et, c’est déjà la fin du concert. Une partie des musiciens de 6:33 montent sur scène pour interpréter ensemble "Freaks and Demons". Et la scène se transforme littéralement en cirque des monstres, dans la joie et la bonne humeur ! Un bon concert donc, mais il manque tout de même un petit grain de folie à Dreadful Silence pour s’imposer musicalement.
Dirty Shirt
Avec un deuxième album très réussi intitulé Freak Show, il nous tardait de voir la musique de Dirty Shirt prendre vie sur scène. Malheureusement, il sera difficile de se faire un avis définitif sur leur performance, étant donné les problèmes de son rencontrés par le groupe pendant le concert. [se référer à l’intro pour comprendre 3]
En effet, les deux chanteurs seront inaudibles sur la première chanson de leur set. On verra même un des guitaristes faire des gestes désespérés à la régie en demandant de monter le volume des chanteurs. Le problème sera en partie résolu sur la deuxième chanson, mais un des chanteurs sera toujours inaudible pendant la plupart du concert, et l’autre audible, mais toujours sous-mixé. Ce problème de son impacte directement sur la performance du groupe, étant donné que le chant est important dans la personnalité musicale du groupe, du fait de la complémentarité des deux vocalistes. Heureusement, les instruments sont plutôt bien équilibrés, bien que le son manque aussi de punch les concernant. En tout état de cause, la musique de Dirty Shirt passe bien le cap du live. Energique et originale, elle trouve son public à la Scène Bastille.
Les influences balkaniques du groupe ressurgissent ainsi sur "Bad Apple". Quelques titres du premier album seront joués, mais n’ont pas tout à fait la même efficacité que Freak Show, en tout cas en live. Sur la planante "Saraca Inima Me", on peut entendre du chant qu’on suppose être du roumain, vu la nationalité du groupe, ce qui n’est pas dénué de charme. Le violoniste du groupe aura droit à son solo de la soirée, avant que Dirty Shirt reparte plus belle avec son métal burné, évoquant parfois System of a Down. Sur l’ultime chanson du concert, un des chanteurs invitera le public à s’asseoir pendant une partie calme, avant de faire sauter toute l’audience avec un bon gros riff. Dirty Shirt sera rejoint par une bonne partie des musiciens des deux premiers groupes pour un final festif.
En conclusion, que retenir d’un tel concert ?
Ce dernier a rappelé à quel point une mauvaise mise en son peut affecter la manière dont on profite d’un concert. Après le set de Dirty Shirt, un spectateur nous a glissé que le matériel de mixage de la Scène Bastille est ancien et loin d’être de la même qualité que dans d’autres salles sur Paris. Il semblerait donc injuste de blâmer les groupes pour cela. Qu’ajouter de plus lorsqu’on entend que les musiciens ont eu trois petites minutes pour enlever leur matériel de la scène ?
Ce soir, la Scène Bastille et son personnel auront été à la hauteur de leur triste réputation. Drôle de hasard, elle change de propriétaire et sera en travaux pendant un mois à partir du premier octobre. Gageons que la nouvelle organisation sera plus professionnelle, et les infrastructures plus adaptées à des spectacles de qualité. En tout cas, remercions les groupes ayant joué ce soir-là d'avoir fait leur maximum malgré les conditions peu favorables.
Photos : Marjorie Coulin / © 2013 http://www.marjoriecoulin.com/
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