Pour son douzième album studio, Dream Theater a finalement fait le choix de la sobriété en le nommant de façon éponyme.
John Petrucci s'est confié à ce propos, et a déclaré qu'il ne voyait pas "de meilleur moyen d'exprimer la créativité du groupe et son identité musicale". Une telle déclaration a de quoi susciter beaucoup d'attente de la part des fans ; il incombe désormais aux musiciens de les combler.
Qu'en est-il de cet éponyme Dream Theater ?
Désireux de créer sa propre musique d'introduction, le groupe fait le choix de commencer l'album avec "False Awakening Suite", une piste instrumentale frôlant les trois minutes. L'ambiance y est oppressante et ce premier contact avec le son de l'album est plutôt surprenant ; ce qui retient notre attention en premier lieu est le rendu de la batterie de Mike Mangini qui, pour le coup, diffère complètement de ce qu'a pu nous proposer Dream Theater dans le passé.
Cette tendance va se confirmer dans le morceau suivant, "The Enemy Inside", qui n'est autre que le single que le groupe a choisi de proposer au public le 5 Aout 2013. John Petrucci, comme d'accoutumée, nous délivre des riffs accrocheurs aux côtés d'un John Myung dont les lignes de basse renforcent considérablement le travail de son homologue guitariste. James Labrie fait son apparition au micro alors que Jordan Rudess développe une orchestration savamment dosée ; aucun doute on est bien dans du Dream Theater pur et dur ! Mike Mangini ne tombe - pour le moment - pas dans le piège de la démonstration technique ; lui qui n'avait pas pu participer à la composition de l'album précédent "A Dramatic Turn of Events" est désormais attendu au tournant.
Alternant un jeu tout en finesse avec un jeu plus "direct", il remplit la tâche qui lui a été confiée, et ce même si le son de la batterie sera indubitablement le gros sujet de discorde entre les fans à l'écoute de ce nouvel album… Rappelons à toute fin utile que c'est Richard Chycki qui est au mix d'où sans aucun doute cette "couleur" particulière apportée au son de Mangini : une batterie qui sonne très naturelle et qui n'est pas sans nous rappeler le son du batteur de Rush, Neil Peart (R. Chycki ayant travaillé avec Rush, Aeromith.. excusez du peu !).
Les lignes vocales de James Labrie sur "The Looking Glass" nous rappellent le bon vieux temps, le Dream Theater à la sauce "Images and Words" et notamment au titre "Surrounded". Le titre possède une atmosphère "enjouée" qui en ferait certainement un single idéal car plutôt accessible même pour les "non adeptes" du prog (et il y en a beaucoup !).
Dream Theater, qui n'a pas proposé de piste instrumentale depuis dix ans maintenant ("Stream Of Consciousness" sur l'album Train of Thought) pallie à ce manque avec "Enigma Machine", dans laquelle claviers et guitare se livrent une rude bataille. Une belle occasion de se rendre compte de la technicité des musiciens, et notamment du travail de Mike Mangini qui n'hésite pas à se lâcher nous offrant par exemple un break mémorable aux trois quarts du morceau et un final pour le moins haletant. Jordan Rudess aura lui aussi son moment de gloire puisqu'avec "The Bigger Picture" nous avons tout le loisir d'apprécier sa dextérité mais surtout son sens de la mélodie à travers des arrangements d'une toute beauté, alors que John Petrucci nous délivre à mi-chanson un solo empli de mélancolie comme lui seul sait faire.
Celui-ci nous avait d'ailleurs annoncé avoir exploré un univers à la fois atmosphérique et cinématographique, chose que nous retrouvons notamment au sein de l'introduction de "Behind The Veil".
S'en suit ce qui est certainement l'un des morceaux les plus aboutis de l'album ; en effet, Dream Theater nous offre dans "Surrender to Reason" un condensé de ce qui a entraîné son succès : une intro accrocheuse suivie d'une partie acoustique de toute beauté, des riff saccadés dans le plus pur style "DT" (le tout sous l'égide d'un Labrie en forme), un solo à la fois épique et mélodique, une orchestration absolument grandiose pour finir sur un duo guitare/chant mémorable.. Un morceau vraiment taillé pour la scène…
La ballade "Along For The Ride" qui est en écoute depuis le 9 Septembre 2013 vient ensuite calmer les esprits avant le tant attendu "Illumination Theory" qui vient clôturer cet album. Subdivisé en 5 parties, ce morceau épique de plus de 22 minutes est pour le moins fourni et varié. Nous y retrouvons également toute la mélodicité et la technicité des membres de Dream Theater, qui réussissent le pari de nous faire voyager à travers différentes ambiances. Jordan Rudess nous propose ainsi en début de morceau un magnifique travail d'orchestration "épiquo-dramatique", et va rapidement céder la place à la section rythmique et à James Labrie, qui vont nous plonger au sein d'une atmosphère carrément oppressante jusqu'à ce qu'un "pont" ambiant (un peu similaire à celui de "The Count Of Tuscany") vienne apaiser les esprits. S'en suit un final complètement épique (guitare solo &chant) que vient conclure au piano Jordan Rudess, qui aura donc le dernier mot sur cet album.
"Dream Theater" a finalement fait le bon choix en donnant son nom à son album puisqu'il s'agit d'un véritable condensé de vingt-huit ans de carrière. On y retrouve toutes les caractéristique de la musique de la formation Américaine, qui satisfait avec cette nouvelle pépite les attentes de ses fans. On pourra regretter cependant un manque de "folie" ; Dream Theater a fait du Dream Theater sans prise de risque inconsidérée.
Mais au final, est-ce si important ? Cela ne retire en aucun cas les qualités intrinsèques de cet album, qui se trouve tout de même être une franche réussite.
Merci messieurs et à dans deux ans pour le prochain album ?
En attendant, nous serons bel et bien présents le 31 Janvier 2014 au Zénith de Paris et le 12 Février 2014 à l'Aéronef de Lille.
