Après la mandale Youngblood, la tornade du Hellfest et le cyclone du Raismesfest, impensable de ne pas me précipiter au Nouveau Casino pour la première date en tête d'affiche d'Audrey Horne dans la capitale. Une date un peu particulière puisque cette tournée est en co-headlining avec le trio instrumental Karma To Burn et en ouverture, Gold (ce qui me vaudra les sarcasmes lourdingues de mes collègues, ravis d'apprendre que j'allais voir en live les inoubliables auteurs de "Plus Près des étoiles, "Capitaine Abandonné" ou encore "Ville de Lumière") groupe dont j'ignore absolument tout et dont mes recherches sur internet sont franchement perturbées par l'abondance de lien sur le quintet toulousain précédemment évoqué.
Bref, ce soir, pour moi, c'est saut dans l'inconnu, puis découverte pleine de curiosité puis assurance totale de passer un moment fort.
On attaque donc avec Gold (depuis le concert j'ai pu me renseigner un peu), quintet emmené par Milena Eva au chant et Thomas Sciarone (ex-The Devil's Blood) qui se définit comme "Heavy par ses chansons, non par son son" ! Et l'influence de l'ancien combo batave trop tôt dissout est effectivement très prégnante, tant dans le jeu de scène très (trop !) dépouillé de sa vocaliste que dans l'immobilisme et l'attitude générale des musiciens.
Gold tente d'imposer des ambiances mystérieuses et hypnotiques en jouant à fond la carte de la répétition. Ainsi, un des morceaux démarre par trois bonnes minutes ( ô bon Dieu que c'est long) sur la même tonalité, avec un bourdon (qui file…je vous le donne en mille… le bourdon !) tellement omniprésent qu'on se dit que lorsqu'il y aura un changement de ton, ce sera l'extase, et c'est pratiquement le cas ! Seulement voilà, il manque au groupe pas mal d'éléments (à commencer par de vraies accroches mélodiques) et de précision (certains soli partent joyeusement dans le décor) avant de pouvoir prétendre au trône laissé vacant par Selim Lemouchi et consorts. Milena n'a pas le charisme de F, et même si on peut lui accorder le fait qu'elle est le plus souvent juste (exceptée une série de vocalises entre deux morceaux), son manque d'implication et de hargne ne contribue pas à faire de cette prestation autre chose qu'un dispensable passe-temps en attendant la suite.
La suite, c'est Karma To Burn. Autant je ne connais que très peu de choses de ce combo, autant je suis curieux de voir ce que peut donner cette musique lourde et puissante en concert. Dans la salle, la tension est montée d'un cran car nombreux sont les fans qui se font entendre et semblent impatients de se prendre une bonne décharge de décibels dans les oreilles. Dès le premier morceau, ça le fait, l'énergie est là, la rugosité du propos ne laisse pas de doute, KtB n'est pas là pour nous conter fleurette où nous divertir par de jolies arabesques. Seulement rapidement, la curiosité s'efface pour laisser place à une certaine monotonie et disons-le tout net, à l'ennui !
Ok, cela n'engage que moi, car les fans ont l'air ravis et la réaction générale est plutôt bonne. Le trio se fait manifestement plaisir (mention particulière au bassiste dont les dreadlocks créent un effet visuel sympa avec le fort éclairage par derrière) et ça poutre bien sévèrement. Mais moi, j'ai l'impression d'entendre un groupe qui répète des structures de morceaux en attendant de trouver un chanteur…et un soliste. Pas de chant, c'est déjà hard, mais pas non plus de soli, ça, je n'avais pas envisagé que cela me manquerait autant. A l'arrivée, j'ai l'impression d'entendre des rythmiques tronçonnées en power chords pendant quarante-cinq minutes. C'est long, limite pénible ! Pas forcément désagréable au départ, car c'est carré et puissant, mais je passe manifestement à côté d'un truc que d'autres sauraient vous expliquer (et à moi, par la même occasion).
Mais soyons honnête, je ne suis là QUE pour Audrey Horne. Un troisième concert cette année, mais le premier en salle, et d'une durée équivalente au gig de Raismes. Et hop, c'est l'occasion d'apporter le seul bémol à l'enthousiasme délirant qui va suivre, la setlist est rigoureusement la même qu'il y a trois semaines ! Voilà ! Donc pas de "Down Like Suicide" ou de "Sail Away" à l'horizon. Snif.
Le groupe vient s'installer sur scène tandis que la sono crache à plein volume l'intro de "Redemption Blues". C'est l'heure aussi d'une interrogation sur la capacité de Arve Dale a tenir son poste, la rumeur (confirmée très rapidement par Toschie) annonçant que le guitariste s'est fracassé la main la veille à Colmar. Renseignement pris, il joue effectivement sous médoc, mais cela ne se ressentira nullement.
Il faut environ une seconde et demie pour foutre le feu au Nouveau Casino lorsque le morceau démarre vraiment. Toschie est déjà à 2000%, rouge écarlate, chantant plié en deux pour être au plus près des fans. Le refrain fait exploser les gorges et les guitares font parcourir les premiers d'une très longue série de frissons.
Le début du set passe à toute vitesse jusqu'à l'enchaînement du méga hit "Pretty Little Sunshine" et d'une version ultra réussie de "Cards With The Devil" (le public connait de mieux en mieux les paroles) qui fait encore monter la pression de plusieurs crans.
Après un "The King Is Dead" très poignant et définitivement dédié aux français "qui s'y connaissent en ce qui concerne le fait de tuer les rois", le concert va basculer dans une autre dimension, le truc de dingue difficilement exprimable avec des mots. Sur "This Ends Here", Toschie saute dans le public pour venir chanter au milieu des fans (bah oui, il n'y a pas de crash barrières donc sa descente de scène l'amène forcément DANS la foule !). L'ambiance est indescriptible et le premier refrain est déjà beuglé historiquement fort. Mais que dire lorsque Thomas débarque aussi et lance son solo, complètement déchaîné, avec la tête de sa gratte qui passe à moins de 20 centimètres du nez des fans ? Et ça continue avec Espen le bassiste (un beau gabarit qui se fraie un chemin sans difficulté). Se forme alors spontanément une sorte d'arène autour des trois lascards. Toschie prend la pose avec les fans, Thomas tricote sur sa six-cordes comme un possédé quand soudain, je sens un choc dans mon dos. Un contact assez fort, très différent d'un coup de coude ou autre délicatesse habituelle dans ce genre de circonstances. Je me retourne et là, je me rends compte qu'il s'agissait de la tête de la gratte d'Arve qui vient lui aussi de quitter la scène (laissant Kjettil seul, abasourdi et hilare) ! Et autant vous dire que le bougre n'a plus du tout l'air de souffrir !
C'est de la pure folie dans la salle, une communion magnifique qui n'en finit pas (quand on pense que certains groupes, y compris français, paient des mecs pour les tenir éloigner des spectateurs dans des salles comparables). Le temps d'un retour sur scène pour le désespérément beau "Firehouse", et c'est parti pour une dernière ligne droite de folie. Le final sur "Straight Into Your Grave" est plus qu'une tuerie, un véritable moment d'osmose, Arve joue quasiment tout le morceau dans le public, peu enclin à remonter sur la scène malgré les appels de Toschie qui finit tant bien que mal par lui montrer par où il peut rejoindre ses camarades pour le salut.
Encore une fois, Audrey Horne a tout balayé, tout emporté et gagné à sa cause de nouveaux adeptes, simplement parce que ce groupe a tout pour lui : des compos de folie alliant mélodies, puissance, émotion, une attitude scénique incroyablement positive et dynamique, une proximité avec le public qui devrait faire école auprès de tous les apprentis vedette, tout je vous dis !
Setlist Audrey Horne :
Redemption blues
Bridges and anchors
Youngblood
Show and tell
There goes a lady
Cards with the devil
Pretty little sunshine
The king is dead
This ends here
Firehouse
Threshold
Blaze of ashes
Straight into your grave.
Merci à Garmonbozia pour l'accred et pour continuer envers et contre tout à proposer des plateaux de qualité pour faire vivre la scène metal !