Soirée filles ce soir à l’Empreinte de Savigny. Entre Bleech, combo rock grunge mené par deux petites anglaises et les Crucified Barbara, suédoises au sang chaud que l’on ne présente plus, l’indice de testostérone dans le public risque de sévèrement virer dans le rouge.
20h30 : Bleech investit la scène. Le trio composé des deux sœurs O’ Neill, l’une chanteuse – guitariste, l’autre bassiste et d’un batteur assume totalement son appartenance à la Perfide Albion et délivre un son très British à travers des amplis Hiwatt de qualité. La chaleur du son est au rendez-vous. Les compos tirées de leur récent Nude sont bien ficelées et la chanteuse au look seventies fait aussi hurler sa Gibson demi-caisse de fort belle manière. En ouverture des suédoises, on aurait pu s’attendre à un groupe plus « metal » mais ce n’est pas le cas. Bleech arrive tout de même à tirer son épingle du feu devant ce parterre de métalleux pas forcement acquis à leur cause. La fraicheur des morceaux et l’enthousiasme des actrices principales font de ce set mélangeant des influences grunge nirvanesque, du rock seventies et un pincée de pop anglaise (on ne renie pas ses origines) un moment agréable. Avec un peu plus de maturité, et peut être un peu moins de timidité ces Bleech devraient pouvoir rapidement faire parler d’eux.
Exit Bleech, maintenant le public veut de la tignasse qui headbangue, des riffs pointus, des soli dévastateurs soutenus par une frappe de mule… et aussi voir des filles mignonnes évoluer dans un univers essentiellement masculin. Ne nous voilons pas la face, si la même musique était jouée par quatre barbus hirsutes, le public aurait peut-être préféré rester au chaud devant Master Chef ou une autre émission de télé réalité. Et c’est là, tout le problème des Crucified Barbara. Acquérir une légitimité dans un monde de machos. Et bien, les filles ne sont pas laissées démonter (oh, je vois déjà les blagues faciles et graveleuses qui commencent à pointer…) et force est de constater que leur show à gagné en maturité et en précision.
En tournée métropolitaine il y a quelques mois (et de passage dans la même salle il y deux ans), les suédoises présentaient déjà des morceaux de leur dernier Midnight Chase. Et pourtant le set a évolué. Dès l’ouverture du show, on s’appuie sur des bandes enregistrées pour créer une ambiance du plus bel effet et faire rentrer tout le monde dans un univers crée pour elles. Une intro épique ; elles n’ont rien trouvé de mieux que de balancer en intro le générique de Dynasty, soap fleuve des années 80. Dans le même registre, il aurait été fun pour le clin d’œil de mettre celui de Santa Barbara… Puis arrivent les choses sérieuses. L’enchainement "The Crucifier" et "Play Me Hard" tente de remettre les pendules à l’heure. Les filles ne sont pas qu’une vitrine publicitaire pour les produits L’Oréal. Ca envoie bien du vrai heavy rock à grosses guitares. Le set revisite les trois albums. Les morceaux du premier opus In Distortion We Trust ont muri et sont interprétés maintenant avec plus de finesse. Les textes illustrent puissamment la première et troisième partie du triptyque : « sex, drugs and rock ‘n’ roll ». "Play Me Hard", "Rock Me Like The Devil" ou "Sex Action" sont très évocateurs et cela suffit pour chatouiller les gonades du public.
Lorsque Klara Force, la guitariste, passe au chant pour interpréter la pepite de Motorhead "Killed By Death", tout le monde est aux anges. C’est vrai que la version est plutôt sympathique et nous permet de patienter en ses temps de convalescence de Lemmy à qui l’on souhaite un prompt rétablissement tant il nous tarde de le voir défendre Aftershock sur les planches. Une heure de bon boulot et les Barbara tirent leur révérence. Pas tout à fait ; un rappel avec "Jennyfer" (la ballade des Crucified) puis un final sur "Into the Fire" avec son intro de batterie où Nicki se met en valeur puis tout le monde rentre à la maison accompagnée par la bande son des Monty Python "Sit On My Face". Pas dénué d’humour ces suédoises.
Les Barbies nordiques ont livré une heure et quart de vrai rock ‘n’ roll, sans tricher, si l’on excepte le headbanging à outrance (un vrai régal pour les photographes capillaires). Le boulot est fait, sérieusement et les récents aménagements du show avec les passages sur bande donnent une dimension plus réfléchie et travaillée à leur set. Les Crucifed Barbara méritent donc d’être traitées comme un vrai groupe de rock énervé (employez le mot metal si vous le souhaitez…) et pas seulement comme des jolies filles. Mais comme James Brown le disait : "It A Man’s Man’s Man’s World" et il fut bien difficile de commencer le show sans les traditionnels "à poils" et autres réflexions hautement philosophiques du même genre. Depuis le temps, les demoiselles doivent bien être au dessus de tout ça… In Distortion They Trust... Elles ont la foi !!!
Setlist : Intro Dynasty, The Crucifier, Play Me Hard, Shut Your Mouth, Sex Action, Rock Me Like The Devil, Intermède, Rules and Bones, Motorfucker, Killed by Death, In Distortion We Trust, Go Roffe, Jennyfer, Into the Fire, Outro Monty Python Sit On My Face.