Leprous contamine Paris !!
Après avoir une fois de plus sorti un album salué par les critiques et les fans, Leprous se devait de confirmer son très bon premier essai en tête d’affiche à Paris. Accompagnés de Blindead et Nemost, les lépreux ont tout donné pour nous rappeler qu’ils font partie du fleuron de la nouvelle scène métal progressif/avant-gardiste !
Nemost
Le groupe parisien joue un death métal assez particulier, à la fois mélodique et progressif dans un registre qui peut rappeller Opeth. Force est de constater cependant que la prestation des musiciens n’est pas totalement à la hauteur de la musique jouée. Ainsi, lorsque vient le moment du solo de tapping harmonisé à deux guitares, on peut entendre des pains à plusieurs reprises qui lui font perdre presque tout impact. Les cinq musiciens ont très peu de place sur scène à cause de la deuxième batterie qui sera utilisée par Blindead et Leprous, ce qui ne doit pas rendre la tâche facile pour jouer et communiquer avec le public.
Le son est assez bon, même si certains solos de guitare seront quasiment inaudibles. Si le chanteur est assez convaincant en growl, il l’est moins en chant clair, tout comme l’est son interaction avec le public, un peu nerveuse et gênée, faisant retomber la tension entre les morceaux. Dommage ! Nemost arrive tout de même à instaurer un climat intimiste pendant son set, à l’aide de belles lumières, et le public se laisse prendre petit à petit au jeu du groupe.
Au fur et à mesure du set, le manque d’assurance se remarque chez d’autres membres du groupe, notamment un des guitaristes. Nemost n’a pas donné un concert raté, mais gageons que la marge de progression du groupe sur scène est énorme, d’autant plus que la plupart des membres avaient l’air jeune ! A suivre !
Blindead
On change radicalement d’ambiance avec Blindead, qui déballe un arsenal de matériel impressionnant ! Le groupe délivre un métal progressif très bien ficelé, tantôt pachydermique, tantôt aérien, qui n’est pas dénué de charmes. Le chanteur Nick Wolverine, à la voix grave et ténébreuse, s’aide parfois de samples, mais sans que le rendu ne sonne synthétique pour autant. Le groupe aurait du laisser ce rôle à son chanteur principal, car lorsque c’est au tour du bassiste de s’y mettre, on s’aperçoit que ce dernier chante carrément faux et plombe l’ambiance planante que le groupe semble vouloir installer.
Pendant ce temps un écran géant passe des vidéos parfois très réussies, et parfois carrément dérangeantes, qui rappellent celles que nous avait servi Leprous lors de son passage l’année dernière. Les compos étirées de Blindead évoquent parfois Mastodon, période Crack The Skye, mais arrivent tout de même à garder une belle personnalité. L’apport de la guitare douze cordes, mais aussi des nombreux effets sonores par les deux guitaristes contribuent énormément au cachet musical du groupe, qui remporte vite un franc succès auprès du public. On est cependant un peu moins enthousiaste lorsque la formation polonaise troque ses chansons très dynamiques contre des pièces planantes, qui sont moins réussies.
Techniquement, chaque musicien est au taquet et assure une performance solide, laissant croire qu’on assiste à un concert de tête d’affiche. Est-ce du à l’impatience de voir Leprous ou à une réelle baisse d’intensité, difficile à dire, mais la fin de set perd en intensité. Sans doute est-ce un peu des deux. En tout cas, Blindead a s’est prouvé être une bonne découverte ce soir, incitant à l’écoute de leurs albums studio !
Leprous
C’est avec un superbe jeu de lumières noir/blanc entre l’obscurité et les quatre ( ! ) écrans disposés sur scène que les norvégiens commencent leur set. Il est assez fou de se dire qu’en à peine un an, Leprous a attiré deux fois plus de public à son concert parisien, fait qui témoigne du réel engouement autour de la formation. L’ambiance est déjà fiévreuse lorsque le combo lance "Foe", joué en entier avec son final à plusieurs voix très réussi et on ne peut plus prog’. Comme observé plusieurs fois lors de cette tournée Coal 2013, on remarque que ce sont les chansons les plus exigeantes d’un point de vue vocal qui entament le set, alors que la raison voudrait les placer plus tard pour qu’Einar Solberg puisse se chauffer les cordes vocales. Sanction, il en résulte que ce dernier sera assez fragile vocalement pendant un bon premier tiers du concert, parfois à la limite de la justesse. Mais le vocaliste compense ce faux pas par une présence scénique toujours aussi énergique et volontaire !
Comme l’année dernière, nous avons droit à moult vidéos passées sur les écrans qui sont (heureusement) moins glauques que l’année dernière et assez réussies. Cela plus les néons aide à donner au concert un climat presque épileptique, surtout lorsque synchronisés avec les rythmiques torturées de "The Valley". Peu à peu, Einar s’est remis sur de bons rails vocalement, et sur l’envoûtante "The Cloak" il est très bien assisté aux choeurs par Tor Oddmund Shurke (guitare), qui s’affirme de plus en plus comme le pilier du groupe derrière la locomotive Einar. Le set monte en agressivité et en intensité avec "Restless" et surtout "Dare You", qui a été réécrite pour les concerts, à l'image d'un illustre Led Zeppelin jadis. On y voit s’illustrer le jeune batteur de remplacement Baard Koltstad (Borknagar) avec sa frappe puissante, et s’avère très convaincant sur les parties les plus métal de Leprous, mais beaucoup moins sur les titres plus calmes et progressif, où le toucher fin de Tobias Ornes Andersen (en tournée avec Shining) est regretté.
Nouvelle injection d’adrénaline avec "Forced Entry" et "Coal", qui révèlent à quel point le public est acquis à la cause des norvégiens. Ils connaissent par cœur ces compositions pourtant complexes et ne sont absolument pas gênés par la présence de nombreuses chansons du dernier album. Au détour d’un "Acquired Taste" lui aussi réécrit pour les besoins du concert, on peut entendre que le son est bon, et aussi apprécier le jeu du nouveau bassiste du groupe, coloré et précis ! Après l’entêtante "Echo", Leprous donne le coup de grâce au Divan du Monde avec une interprétation tellurique de "Contaminate Me", qui pulvérise de nombreuses cervicales dans la fosse aux lions (et lionnes).
C’est déjà l’heure du rappel, et après une courte pause, Leprous enfonce le clou avec un "Passing" toujours aussi implacable en live. La qualité évidente de ce morceau nous montre aussi à quel point Leprous a changé et progressé depuis ce singulier Tall Poppy Syndrome de 2009. Les influences qu’on remarquait hier sont aujourd’hui presque effacées, et le groupe a trouvé avec Coal une orientation qui le confirme comme un des groupes les plus originaux de sa génération, dans le cadre métal en tout cas. Cela n’empêche pas les lépreux de dire au revoir à la France avec le dantesque "Waste of Air" qui sonne comme un hommage à leur mentor Ihsahn. Ce final débridé nous confirme une chose : Leprous n’est pas prêt d’arrêter de faire parler de lui. Et c’est mérité.
Setlist :
Foe
The Valley
Chronic
The Cloak
Restless
Dare You (version concert)
Thorn
Forced Entry
Coal
Acquired Taste (version concert)
Echo
Contaminate Me
Encore:
Passing
Waste of Air
Photos Leprous n°1 et n°2 : Arnaud Dionisio / © 2013 Deviantart
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.
Photos Nemost, Blindead et Leprous n°3 : un grand merci à Christian Arnaud / © 2013