Magion – A Different Shade of Darkness

Les Pays-Bas ont la vilaine habitude de nous envoyer du metal sympho à chroniquer. Paraît que c'est la faute à leur consommation excessive de produits laitiers. Surtout chez les femmes, qui souvent ont l'envie folle de porter des corsets et de faire du chant lyrique. Bref, voilà comment est né A Different Shade of Darkness, second méfait de la formation néerlandaise du jour, Magion. Elle est pas belle mon histoire ?

Notre sextette néerlandais officie dans le symphonique pur jus. Si vous êtes allergiques aux claviers, aux chœurs, aux samples et aux voix féminines, peu de chances que cette mouture parvienne à vous conquérir. En gros, il paraît simple aux premiers aspects de classer le disque dans les nombreuses sorties du style, qui ne se démarquent pas. Effectivement, l'originalité n'est pas réellement la qualité première que l'on recherchera chez Magion. Cependant, le travail sur les compositions abordé par la formation est, lui, relativement intéressant, développant une approche globalement plus progressive et plus axée sur les atmosphères que ce que l'on pourrait avoir l'habitude d'entendre dans le genre. Concrètement, cette tendance se traduit par la longueur des morceaux, qui avoisine bien souvent les six minutes, faisant ainsi durer A Different Shade of Darkness plus d'une heure. Une situation qui pourrait se révéler particulièrement éprouvante dans le cas d'un disque sans aucune saveur, ni talent. Dans le cas du combo néerlandais, ces reproches ne pourront être adressés, bien heureusement.

La formation est assez habile de ses dix doigts pour manier les instruments comme il le faut. On ne dénote aucune démonstration de virtuosité, mais il faut reconnaître que chaque instrument parvient à trouver sa place pour former un ensemble à la fois cohérent et agréable, un cadre parfait à la création de ces ambiances si chères à la Magion. En effet, celles-ci passent souvent par le duo clavier / chant, que ce soit dans des passages plus calmes ou, au contraire, lors des refrains qui ne suivent pas un schéma habituel. C'est le cas d'un « Beloved Enemies » qui n'utilise pas cette partie du morceau comme un point d'orgue mais bien comme une continuité de ce que les couplets instauraient déjà. Il reste quelques contres-exemples (« Ever and a Day », « Neverending Winter »), mais la tendance générale est assez facilement identifiable. L'ennui, c'est qu'à force, Magion peut terminer par se prendre dans ses propres filets et il est difficile pour le combo de faire tenir l'auditeur sur toute la durée de l'opus.

Magion

Et le fromage, ça rend roux.

D'où provient ce problème ? A force de tout concentrer sur le traditionnel chant / clavier pour réussir à offrir des moments de grâce, nos chers amis des Pays-Bas en oublient de donner un peu plus de mordant à leur guitare, mais aussi et surtout des parties qui accrochent au premier coup d'oreille. Alors certes, il y a bien « Neverending Winter » qui se veut plus simple et plus directe, mais cela ne suffit pas. D'autant plus que la piste est placée en fin de course, ce qui ne lui assure pas une position efficace. Individuellement, les compositions offertes par Magion sont très bien écrites et bénéficient, en plus, d'une bonne production. Qui plus est, la voix de Myrthe Van Beest transcende les titres, de son timbre assez singulier, plutôt différent de ce que peuvent offrir bon nombre de consœurs. Elle sait offrir de très beaux moments, sa voix réussissant à s'adapter à divers types d'atmosphères, notamment dans des morceaux très variés et apportant des tableaux s'enchaînant à la perfection (« Out of Time », « Untrue »). Mais s'enfiler d'un seul bloc tant de titres qui jouent souvent sur les mêmes ficelles n'est pas toujours évident, et fait passer à la trappe certaines pistes peu reluisantes (la fade « Ever and a Day » ou encore la redondante « Break the Silence »).

A Different Shade of Darkness est une galette qui laisse assez perplexe. Magion est une formation bourrée de qualité, et ce serait mentir que d'affirmer qu'ils se perdent dans la masse. Mais perdraient-ils de leur identité en allant vers la facilité de pondre des pistes plus accrocheuses et catchy ? Le défi que les néerlandais vont à présent devoir réaliser est de pouvoir allier à la fois leur capacité à jouer sur l'ambiance tout en offrant des refrains fédérateurs, afin de conserver leurs qualités sans se trahir. Quoi qu'il arrive, la formation s'en tire avec bien des honneurs et parvient à faire de cette livraison une bonne surprise. Leur progression sera attentivement surveillée.

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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