Opéra au Trabendo
Alors qu’ils devaient arrêter de tourner pendant un long moment, les musiciens de Therion ont décidé de reprendre la route pour dévoiler une partie de leur projet d’opéra metal, en plus de jouer l’album Vovin en entier. Pour les accompagner dans cet évènement exceptionnel, le groupe de pagan metal russe était de la partie, ainsi que Coma et son metal alternatif et Soundstorm, groupe de power metal italien. De quoi divertir un Trabendo rempli à ras-bord.
Sound Storm
La soirée est ouverte par un groupe italien de power metal symphonique, dans la grande tradition de Rhapsody et consorts. Dans un court set de 25 minutes, les Turinois mettent l’accent sur leur dernier album en date, Immortalia, paru en 2012.
Mais pour séduire le public de Therion, un certain raffinement musical est nécessaire, ce qui avait permis à Leprous de s’illustrer à L’Elysée Montmartre en 2010. Ici, le groupe enchaîne des compos clichées de power metal, à grand renfort de mélodies banales au clavier et d’une guitare réléguée au plan de la rythmique simple, ce qui ne provoquera que très peu de réaction au sein du public, qui acclame poliment le groupe entre les chansons.
On peut tout de même saluer la performance du chanteur Phillipe d’Orange, qui présente une voix haut-perchée maîtrisée et crédible, malgré un fort accent italien. Cependant, comme le reste des musiciens, le chanteur reste cloué sur scène et ne se déplace que pour faire des allers retours vers la batterie pour prendre sa bouteille d’eau. A ses côtés, Lisy Stefanoni, choriste du groupe, s’illustre plus par sa chorégraphie bizarre que par ses rares interventions vocales.
Si les intentions de Sound Storm sont honnêtes, de par leur tentative de créer un power metal puissant et direct on regrettera que leur musique ne soit pas assez originale pour être mémorable. Des compos plus poussées et une plus grande maîtrise de la scène leur permettraient de donner plus de vie à leurs concerts.
Setlist :
Immortalia [sur bande]
Back To Life
Wrath of the Storm
The Curse of The Moon
Promises
Torquemada
Coma
Vient maintenant le groupe polonais Coma, qui vient remplacer The Devil au pied levé pour la fin de la tournée. Les crocs roses aux pieds du frontman Piotr Rogucki annoncent la couleur : il s’agit là de l’ovni de la soirée. Pratiquant une musique entre le rock et le metal alternatif, les titres de Coma se suivent sans se ressembler.
Animés par des riffs modernes de Dominik Witczak et Marcin Kobza et la basse groovy et omniprésente de Rafal Matuszak, les compos font taper du pied les spectateurs, obnubilés par la performance de Piotr Rogucki. Si son timbre, qui peut rappeler celui de Marilyn Manson par moments pour le côté maniéré et nasillard, s’allie parfaitement à son interprétation très impliquée de ses lignes vocales, ses chorégraphies fantaisistes laissent pantois certains metalleux, pendant que d’autre ont du mal à étouffer leurs rires.
Si les bizarreries sont de la partie, le talent des Polonais est tout de même reconnu par l’assistance, qui a du mal à cerner ce groupe, tant il se situe sur un plan musical différent de celui de Therion. Cependant, comme Therion avait fait à l’époque de Theli, ce goût pour la bizarrerie mélangée à la maîtrise musicale rend service à Coma et pourrait éventuellement leur amener des curieux. Si la musique n’est pas la même, la démarche peut présenter des similitudes.
Dans tous les cas, Coma ne laisse pas le public du Trabendo indifférent et finit son set de 40 minutes sous des applaudissements nourris, preuve qu’avec un peu d’ouverture d’esprit, on peut arriver à apprécier un groupe qui, sur le papier, n’a pas à figurer sur cette affiche. Un tour de force bien appréciable.
Setlist :
Keep the Peace
Poisonous Plants
Don't set your dogs on me
Rainy Song
System
A Better Man
Dance with a Queen
When the music is a Flame
Arkona
Dernière ligne droite avant Therion, voici Arkona, groupe de folk metal qui est la raison de la présence d’un bon nombre de metalleux au Trabendo, malgré le prestige des Suédois. On remarque cela à l’ambiance qui se fait de plus en plus sulfureuse à mesure que l’arrivée des Russes approche, jusqu’à ce qu’elle explose littéralement lorsque le premier morceau commence.
Il faut dire que l’énergie est là sur scène. Les musiciens, mobiles et habiles, s’en donnent à cœur-joie avec leurs instruments, notamment le guitariste Sergei "Lazar" Atrashkevich, qui arrive à bien chauffer le public. Côté folk, le flûtiste Vladimir "Volk" Reshetnikov n’hésite pas à sortir sa cornemuse et autres instruments traditionnels quand les compos l’exigent et expose sa maîtrise sans sourciller.
Mais le centre de l’attention est Maria "Masha Scream" Arkhipova, frontwoman énergique et impliquée dans son rôle. Flanquée de sa peau de loup, la blonde headbangue comme une diablesse et déclame ses paroles en russe avec conviction. Si la performance peut paraître imprécise pour certains, l’envie et l’énergie sont là.
Côté public, les fans sont excités et pogottent à cœur joie sur les compos festives du groupe. L’attente des parisiens a dû être longue depuis la dernière venue d’Arkona, qui remonte à 2010, à l’occasion du Pagan fest. Une occasion qui se fête entre fans de pagan metal.
Preuve de plus que l’affiche est éclectique, Arkona a su chauffer la foule comme il le faut avant l’arrivée sur scène de Therion, en contentant son propre public, mais en laissant quelques profanes sur leur faim, tant leur musique est différente de celle de la tête d’affiche.
Setlist :
Az'
Arkaim
Ot Serdtsa k Nebu
Goi, Rode, Goi!
Zakliatie
Pamiat
Slav'sja, Rus'!
Arkona
Stenka na Stenku
Yarilo
THERION
Arrive maintenant le clou de la soirée, Therion, qui se prépare à donner son premier concert complet de la tournée Rock Opera Unveiled. Sans artifices ou décor, hormis la présence de la danseuse orientale Joana Najla sur "Rise of Sodom and Gomorrah" et "Wine of Aluqah", le groupe consacre la première heure du concert à l’album Vovin. Ici, peu de discours (la première adresse au public est faite par Linnéa Vikström après "The Wild Hunt"), place à la musique.
On remarque que les transpositions vers le nouveau line up sont réussies, avec une Lori Lewis impériale sur "Clavicula Nox" (en 2010, Katrina Lilja assurait le lead sur ce même titre) et une Linnéa qui s’en sort très en se mettant en avant sur "Eye of Shiva" et "Raven of Dispersion". Si Vovin est l’album de Therion qui s’est le plus vendu (150 000 exemplaires en Europe), on remarque qu’il est tout de même audacieux de jouer en entier un album aussi calme en live. Mais le sourire qui se dessine sur les visages des fans montre que le groupe a su convaincre.
Après avoir caressé tout le monde dans le sens du poil, le groupe entre dans le vif du sujet en présentant cinq compositions de son prochain projet : un opéra metal inspiré du Court récit sur l'Antéchrist de Vladimir Soloviev, qui est une actualisation de L’Apocalypse de Jean écrite en 1899. Christofer Johnsson, leader et guitariste rythmique du groupe, situe ainsi ces différentes pièces dans l’histoire et invite les spectateurs à laisser des commentaires sur internet. On y trouve notamment de magnifiques duos entre Lori Lewis et Thomas Vikström, du lyrisme et de lignes vocales épiques, ainsi que des aspects théâtraux bien maîtrisés, sans jamais perdre cette patte de Therion. Il reste maintenant à voir ce que les versions finalisées donneront, avec en plus un orchestre et plus d’interprètes.
La troisième et dernière partie du concert est réservée aux fans. On retrouve ainsi quelques raretés, comme "Muspeilheim" et "Asgard", pas jouées en France depuis 2007, ou "Flesh of the Gods", qui n’y avait pas été jouée depuis 2001. Remis au goût du jour et interprétées avec brio par les musiciens, notamment le guitariste soliste appliqué Christian Vidal.
On voit un groupe toujours aussi proche de son public, en témoigne le jam sur "Les Sucettes" après une demande nourrie du public, qui sera suivie d’une adresse de la part de Thomas Vikström, qui promet que le groupe la jouera lors de son prochain passage à Paris. Toujours aussi à l’écoute, les Suédois jouent aussi "Lemuria" pour conclure le show, à la demande expresse des fans.
Ces derniers montrent toujours autant de ferveur lors d’un concert de Therion. Si la première moitié du concert était relativement calme en raison du set proposé, personne ne se retient pour chanter les refrains et battre la mesure avec entrain. En revanche, le public s’excite bien lorsque le groupe interprète de classiques de l’album Theli, "Invocation of Naamah" et "To Mega Therion", preuve que les fans soutiennent leur groupe jusqu’au bout.
Setlist :
Vovin
The Rise of Sodom and Gomorrah
Birth of Venus Illegitima
Wine of Aluqah
Clavicula Nox
The Wild Hunt
Eye of Shiva
Black Sun
Draconian Trilogy [sans The Opening]
Raven of Dispersion
Présentation de l’opéra metal
Overture
End of the Dynasty
Who's Your God?
Onda Toner
Sad End
Flesh of the Gods
Muspelheim [sans l’intro]
Ginnungagap
Asgård
Rappel 1 :
Les Sucettes [reprise de France Gall, jam du groupe à la demande du public]
Invocation of Naamah
To Mega Therion
Rappel 2:
Lemuria
Photos :
Sound Storm et Coma :© 2013 Byclown
Arkona et Therion :© 2013 Olivier GESTIN / INTO The PiT Photographe
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.