L’évocation du metal israélien nous fait immédiatement songer aux ambiances orientalisantes et au spiritualisme d’Orphaned Land.
Et si c’est à ce genre d’œuvre que vous vouliez vous confronter lorsque le nom d’Hammercult est parvenu à vos oreilles, passez votre chemin. En effet, ici point de chant hébreu, de sitars et autres instruments exotiques, la seule religion qui inspire Hammercult c’est celle du thrash dans ce qu’il a de plus furieux et percutant.
Fraichement signé chez SPV, les israélien proposent un metal direct, qui ne se prend pas au sérieux (comme le montre les titres indignes de Manowar même) et qui suinte la bière. Le fil directeur de ces treize titres c’est un thrash reprenant à la fois la hargne d’un Destruction et la fougue d’un Exodus. Conscient de la limite de cette recette depuis le passage du thrash revival qui a plus ou moins épuisé les richesses des œuvres fondatrices, Hammercult a décidé d’agrémenter sa musique d’élément hardcore, death et heavy pour tirer son épingle du jeu. Et si la démarche est pertinente, le rendu final, si il n’est pas sans intérêt, peine à véritablement convaincre.
Passons l’anecdotique intro "Hymn To Steel" et rentrons dans le vif du sujet avec le morceau éponyme, “Steel Crusher”. Le titre s’ouvre sur un rythme presque dansant, mid tempo avec un riff assez accrocheur avant que l’embardée thrash ne démarre pour le plus grand plaisir des headbanger. Avec un pont assez aérien, presque épique, ce premier brûlot s’avère efficace et saura assurément déclencher de beaux pogo lors de la prochaine tournée du groupe. L’aventure commencent donc plutôt bien et le second morceau, "Metal Rules Tonight", confirme notre bonne impression avec un riff très Exodus et une envolée death(à 1 :16) des plus savoureuses. Le mélange death/thrash/hardcore atteint son sommet avec "The Unholy Art" qui nous fait songer, en moins abouti certes, à ce qu’a récemment proposé Hexen, notamment le chant. Finalement, il est difficile de nommer un maillon faible parmi ces 13 brûlots, chacun offrant des mélanges intéressants, comme sur le très américanisé "Burning The Road", lourdaud au premier abord mais sauvé par un pré refrain au riff catchy et un refrain assez entrainant.
Et pourtant au fil de l’écoute, notre attention décline et la lassitude voir l’agacement se font peu à peu ressentir. Le facteur explicatif le plus évident est le chant. Très criard et monolithique, on peine à ressentir la hargne du vocaliste, qui n’est qui plus est pas favorisé par des paroles ridicules. Vous me direz que cela plait à certain et que pléthore de groupe de qualité ont un chanteur de ce genre. Mais là où les hurlements de David DiSanto nous font pénétrer dans l’univers dément de Vektor, le manque cruel de nuance, de finesse du chant chez Hammercult nous laisse assez circonspect et les plumes plus acerbes diront qu’il ne fait que gueuler pour gueuler. Pour continuer le parallèle avec Vektor, les nombreuses plages instrumentales permettent de faire respirer les compositions et évitent de se lasser de la voix de David. Or ici les compos sont très courtes et reposent essentiellement sur le chant et malgré quelques growl ou des choeurs hardcore sur les refrains, le rendu devient vite indigeste.
Comme souvent chez les jeunes formations, le groupe peine à tenir en haleine l’auditeur pendant tout l’album. Les morceaux sont intéressants pris un à un mais en écoute globale, les choses se compliquent franchement. Le cœur des compositions est peut être la source de problème. On l’a dit, le groupe agrémente sa base thrash de divers éléments empruntés aux autres branches du metal et ce choix semble judicieux. Néanmoins, ces éléments ne sont pas suffisamment exploités et on passe trop vite d’un genre à un autre ce qui donne à la fois un gout d’inachevé et un sentiment d’incohérence. Ça part dans tous les sens et on peine à trouver un point d’accroche et finalement lorsque le groupe décide de donner une véritable orientation à sa musique et de partir dans une direction précise, il se montre plus efficace comme l’illustre le très épique "Ironbound" ou le mélodique "In The Name Of The Fallen".
Ces défauts sont caractéristiques d’une œuvre de jeunesse et ne doivent occulter quelques bonnes idées comme ce riff presque folk sur le refrain de "Liar" ou les chœurs vindicatifs de "Burning The Road", idées qui auraient mérité une plus grande exposition, quitte à empiéter un peu sur les lignes de chants qui elles gagneraient à être mise au second plan. Une production plus massive avec des guitares plus tranchantes et plus en avant devraient pallier à ce genre de problème. Finalement, "Damnation Arise" et son ambiance totalement apocalyptique s’avère être un des points culminants de l’album car le groupe réussi ici à synthétiser death, black et heavy pour offrir un tout cohérent et assez savoureux.
Nos israéliens ont de l’énergie à revendre, de bonnes idées mais doivent absolument mieux penser leur musique pour la rendre plus cohérente et plus digeste. Enfin, pour terminer sur une note positive, on soulignera le beau travail du batteur, à l’aise dans les différents registres proposés par ce Steelcrusher et qui offre au groupe une assise rythmique essentielle pour remuer les foules.