Le retour en grâce de Behemoth
Plus de quatre ans après la sortie d’Evangelion, le groupe de death metal polonais opère son grand retour avec The Satanist. Disque varié, massif et destructeur, il contient les éléments qui font le son de Behemoth, en mêlant classe et agressivité extrème, tout étant parsemé de nouveautés et de variations qui tiennent l’auditeur en haleine du début à la fin. Une belle œuvre maîtrisée et jouissive.
Behemoth revient de loin. En pause obligatoire à cause de la leucémie qu’avait contracté Nergal, leader du groupe, en 2010, le groupe a été forcé de ralentir son rythme effréné de sorties d’albums. Ayant bénéficié d’un temps de gestation plus long, The Satanist, 10e album du groupe, montre le groupe sous un nouveau jour, encore plus grandiloquent qu’avant, mais toujours aussi agressif et implacable.
On remarque tout d’abord que le son Behemoth est toujours de la partie. Massif, il met toujours en valeur la puissance infernale des compositions de Nergal, mais reste léché et poli, permettant ainsi à Artur Jurek de laisser parler ses arrangements orchestraux, qui donnent un cachet épique à certains passages, notamment le final grandiose de The Satanist. Le groupe a eu cependant l’intelligence de ne pas trop les mettre en avant, afin qu’ils servent les chansons sans les alourdir.
Le son massif permet également à chaque membre d’être mis en avant. Ainsi, le jeu de batterie toujours aussi agressif d’Inferno est sublimé, notamment sur le titre "Amen", où il bourrine à cœur-joie. Le bassiste Orion est aussi bien présent dans le mix et peut ainsi se faire plaisir, notamment dans "Blow your Trumpets, Gabriel" ou "Ben Sahar".
Le leader Nergal n’est bien sûr pas en reste, avec ses riffs tantôt massifs et typiquement death metal, tantôt continus et se rapprochant plus du black metal. On remarque qu’il sait aussi faire parler ses influences heavy metal avec ses solos mélodiques variés. Côté chant, la rage est toujours présente, qu’il prêche sur Messe Noire ou qu’il éructe avec conviction le refrain "For thine is the kingdom, and the glory, forever" sur le tube en puissance "Ora pro nobis Lucifer".
Mais la force de The Satanist ne réside pas que dans ce tube qui a tout pour devenir un classique live. En effet, Nergal déclarait à juste titre que les chansons "sont toutes différentes, avec une atmosphère et un groove qui ne sont jamais les mêmes." Ainsi, on passe des coups de trique brutaux et agressifs que sont "Furor Divinus" et "Amen" à un mid-tempo orientalisant comme Ben Sahar ou un titre d’ouverture, "Blow your Trumpets, Gabriel", basé sur une montée en puissance qui rappelle "South of Heaven" de Slayer. On peut noter un titre un peu maladroit : le décousu "In the Absence ov Light", qui est vite oublié avec le final épique qu’est "O Father O Satan O Sun".
On remarque que l’écriture est toujours aussi soignée, avec des transitions léchées et des enchaînements évidents entre les parties, qui montrent que Nergal ne se repose pas sur ses lauriers et garde bien son talent de compositeur.
Avec un tel album, Behemoth montre que, malgré l’adversité et les difficultés, son envie de conquête est plus forte que tout. The Satanist marque un retour triomphal de Nergal et sa bande qui évoluent sans jamais oublier leur identité musicale, mêlant toujours agressivité destructrice et atmosphère classe et travaillée.