Avec leur nouvel album les vétérans allemands du Metal gothqiue appliquent une formule peut-être un peu trop prévisible mais qui plaira à la fois aux adeptes de danses macabres et aux headbangers languissants.
Il y a des groupes qui sont (donc qui se contentent d'appliquer une formule élaborée par d'autres, parfois avec soin, comme tous ces combos de Power/Speed/Sympho machin Metal ou de Brutaldeluxe/Technico Death Metal) et d'autres qui créent.
Créatif, Crematory l'a été, du moins à ses débuts. La bande menée par le chanteur Félix à l'aube de son existence proposait un habile mélange de Death Metal bien gras (aux tempos raisonnables cependant, voire Doom par moments) et de sonorités atmosphériques exécutées par un clavier souvent très bien utilisé, le tout saupoudré d'une mélancolie gothique poignante (Félix possède aussi un joli filet de voix claire). Crematory c'était donc ce que l'on pourrait appeler sommairement du Death Metal Gothique avant que le groupe ne vire plus vers le Metal Goth' de base, dirons-nous, en conservant sa patte Death cependant. Le groupe a trouvé son apogée artistique sur Awake sorti en 1997 suivi de deux autres albums avant un split, et un retour.
Personnellement, je n'ai pas suivi la reformation de 2003, ni écouté les albums qui sont sortis ensuite. C'est donc avec des oreilles vierges que j'ai découvert Antiserum, nouvelle livraison des allemands prévue le 24 février chez Steamhammer. Honnêtement je m'attendais à du Metal Gothique teinté de vocaux death comme Crematory savait si bien en distiller dans les glorieuses 90's.
Que nenni ! J'avais vraiment loupé un épisode il y a 10 ans, le combo à Félix officie donc depuis quelques albums dans un Metal Electro mâtiné de touches Death Metal, le groupe décrit d'ailleurs sa musique comme étant de l'EBM (Electronic Body Music) Metal, soit le croisement entre le style froid, électronique et dansant initié par les belges de Front 242 et les grosses guitares du Metal. On passe donc du cimetière abandonné, triste et humide à la piste de danse remplie de cyborgs. Plutôt déroutant à la première écoute mais on s'y fait.
A noter que pour ce disque Crematory a fait appel aux services d'Elmar Schmidt, membre du projet EBM Centhron, qui a apporté quelques arrangements se complétant aux parties de clavier de Katrin Jüllich. Ainsi, l'introduction « Apocalyptic Vision » donne le ton avec ce bruit d'électrocardiogramme qui se fait entendre, ces nappes de claviers électro, cette ambiance sombre et oppressante et la voix grave de Félix qui déclame un discours s'achevant sur un « Welcome Crematory » glacial qui laisse penser que l'auditeur va sortir d'un long coma pour entrer dans le nouvel univers du groupe envahi de sonorités synthétiques, martiales et entraînantes, pour le meilleur et le moins bon ceci-dit.
Il faut déjà avouer que cette nouvelle offrande possède une facette dansante qui se retrouve notamment sur le single extrait de l'album « Shadowmaker », un futur tube qui devrait faire un malheur en festival Metal ou sur les dancefloors gothiques avec son synthé un peu « pouët-pouët », son gros riff de guitare, cette alternance couplets chant death/refrain efficace et cette voix robotique en arrière-plan. On imagine très bien métalleux virils et précieux gothiques croiser leurs New Rock en harmonie sur ce titre. Nous retrouvons aussi ce côté dansant sur « Kommt näher » ou « Virus » (avec un rythme un peu plus martial pouvant renvoyer aux travaux de Die Krupps ou Rammstein mais...En moins bien).
Sur ce onzième album, il y a aussi ce qui a toujours fait la qualité de Crematory, ces refrains travaillés et qui restent en tête au bout de quelques écoutes, en cela « Until the end », « If you believe » (qui rappelle l'époque bénie de Awake), « Inside your eyes », « Back from the dead », « Welcome » et « Antiserum » rendent tout à fait justice au don qu'a Félix de chanter d'une façon à la fois hargneuse (sa voix growlée) et suave la mélancolie « werthienne ».
Oui mais voilà, ce nouveau disque des allemands même s'il n'est pas honteux est loin d'être un des grands crus que nous pourrons retenir à la fin de cette année qui vient de commencer. Pourquoi ? La faute à une certaine homogénéité tout simplement, la formule (chant death/refrains mélodiques) est appliquée dans les règles et le cahier des charges est respecté, ce qui fait que parfois on peut ressentir une inévitable lassitude à l'écoute de morceaux comme « Inside your eyes », le répétitif « Kommt mäher » (malgré son gimmick « boite à musique » en intro), « Irony of fate » (qui a de la peine à décoller) ou « Back from the dead » (qui a tendance à se répéter aussi sur sa longueur)...
En revanche un titre comme « Antiserum » avec son intro mélancolique au piano et le feeling qu'il dégage est plutôt poignant et renvoie à la grande époque de Awake, ce morceau peut montrer la direction à suivre dans le futur pour Crematory s'il ne veut pas tourner en rond.
Au final, Antiserum n'est pas un mauvais album, le mélange sonorités électroniques/grosses guitares fonctionne dans l'ensemble et cet opus plaira à ceux qui suivent les allemands depuis dix ans, peut-être un peu moins aux fans des premières heures de Crematory, celles qui voyaient le groupe développer un style original avant de se tourner vers des sonorités peut-être plus conventionnelles.
Ceci-dit ce nouveau crématoire mérite quand même une petite visite.
Liste des morceaux :
1 Apocalyptic Vision
2 Until the end
3 Shadowmaker
4 If you believe
5 Inside your eyes
6 Kommt näher
7 Irony of fate
8 Virus
9 Back from the dead
10 Welcome
11 Antiserum