Déjà plus de 15 ans que Skindred nous assène de sa fusion musicale à la croisée des genres ! Et le groupe n'a pas perdu de son énergie avec les années, en témoignent leurs derniers concerts français, au Hellfest 2013, mais aussi à Paris et à Belfort dans le cadre de leur précédente tournée. Ils n'ont pas perdu de leur humour non plus, ni même de leur créativité, en témoigne cette fois leur cinquième et nouvel album Kill The Power, sorti fin janvier 2014.
Skindred a toujours mélangé les genres, notamment le metal et le reggae, mais aussi le rock, l'indus ou le néo, et dorénavant l'électro et la dubstep (oui, j'ai bien dit dubstep), si bien que cette chronique pourrait paraître sur nos trois webzines ! Kill The Power est plus que jamais un melting pot des genres et pourrait bien plaire a bon nombre d'auditeurs. Tantôt dans l'efficacité, tantôt dans un ton plus progressif, Skindred s'amuse à nous balader d'expériences en expériences, le plus souvent avec pertinence et brio.
L'album s'ouvre sur le titre éponyme, "Kill The Power", histoire de mettre les choses au clair tout de suite. On retrouve le groove et l'efficacité propre au groupe avec des guitares un peu néo trafiquées façon "Pressure" ou "Nobody" (Babylon, premier album du groupe de 2002). La chanson avait déjà été révélée par le groupe en novembre 2013 et l'on pouvait déjà se rendre compte de l'addiction qu'engendrait le refrain. De quoi donner envie d'en écouter plus !
On découvre alors de nouveaux styles incorporés aux compositions des anglais : l'électro de "Ruling Force" et la dubstep plutôt réussie de "Playing With The Devil", plutôt ratée du rapide break de "The Kids Are Right Now". En fait, chaque chanson a un peu son style qui ressort. Ainsi, "Worlds On Fire" est le titre R'n'B du disque alors que "Ninja" et "Proceed With Caution" tendent beaucoup plus vers le metal et le néo, à l'image de "Kill The Power". "The Kids Are Right Now", "We Live", "Open Eyed" et "Dollars And Dimes" quant à eux ont sonnent plus rock, lorgnant pour l'une vers la balade rock, pour une autre vers l'electro-rock ou le progressif.
Reste deux titres pour en avoir fait un premier tour rapide : "Saturday" et "More Fire", cloturant l'album. Commençons directement par le pire pour se rappeler du meilleur... "Saturday" rappelle très tristement "Friday". Oui, je parle bien du titre de Rebecca Black ! "Saturday ! [...] We go crazy - CRAZY ! CRAZY !" versus "It's friday, friday ! [...] Party, party, YEAH ! Fun, fun, fun, fun...". Musicalement, c'est pas la joie. Enfin, si, justement, ça sent tellement la joie qu'on croirait écouter de la pop-punk. A oublier au plus vite ! Comme quoi, tous les mélanges ne fonctionnement pas...
En ce qui concerne tout le reste de l'album, ça tend globalement rapidement vers l'addictif ! Certains titres sortent clairement du lot (mais pas de la tête !) : bien-sûr, les deux tubes "Kill The Power" et "Ninja" qui ont chacun des refrains imparables, mais aussi "Open Eyed", où la forte présence du chant féminin apporte énormément à la chanson, et "More Fire", chanson acoustique façon "The Fear" (Babylon) qui est une perle de légèreté comme le groupe a l'habitude de nous en servir. Dans une moindre mesure, les chansons "Ruling Force", "Playing With The Devil", "Worlds On Fire", "Dollars And Dimes" et "Proceed With Caution" sont égalements tous de très bons titres, proposant chacun une vision différente de la recette Reggae/Metal de base. D'autres mélanges sont peut-être légèrement moins accrocheurs ("The Kids Are Right Now", "We Live") mais maintiennent tout de même le cap.
Au-delà de ces mélanges ingénieux de genres, l'énorme point fort de ce disque (et de Skindred plus globalement) est le placement des lignes de chant. M. Benji Webbe a clairement un don pour nous planter une mélodie dans la tête et qu'elle n'y ressorte plus jamais ! L'abus de Skindred peut clairement avoir des effets imprévisibles (mais pas désagréables) sur la vie quotidienne : je me couche Skindred, je me réveille Skindred, je prend le métro Skindred, je fais les courses Skindred. "Ninja" est très très fort pour ça. D'ailleurs, le riff de guitare est, pour celle-ci, peut-être encore plus addictif ! "Kill The Power" ne nous épargne pas non plus, évidemment, tout comme la mystérieuse intervenante du titre "Open Eyed" (Jenna G, chanteuse anglaise, mais aussi actrice, productrice et présentatrice radio) qui nous fait grâce d'une performance incroyable.
Côté influences, on croit parfois entendre d'autres artistes, et ça peut être assez surprenant. Le premier exemple est celui de "Ruling Force" où l'esprit un peu sombre du break aurait pu sortir du dernier Rob Zombie. Mieux encore, s'en suit les 20 dernières secondes de la chanson où l'on pourrait croire que Psy, le célèbre chanteur de "Gangnam Style" et "Gentleman", est venu poser sa voix ! Autre ressemblance assez troublante : il s'agit du titre "Ninja" et de son riff post-break (3:06) rappellant vraiment l'esprit Limp Bizkit, avec quelques samples que n'auraient pas reniés les gars de Mass Hysteria dans les années 1990 (d'ailleurs, le titre "Worlds On Fire" rappelle évidemment "World On Fire" de l'album Failles des Français). Après son break 8-bit façon Nintendo, on atteint vraiment le summum de la fusion inter-musicale !
Kill The Power sent la bonne humeur, l'envie, la passion, et est très probablement l'album le plus efficace en date du combo anglais. Avec un album composé quasi-exclusivement de tubes, Skindred tire dans le mil presque à chaque titre et surf sur les styles sans jamais se fixer de limites. Le groupe s'éclate (et nous éclate) à jouer ce qu'il aime et ça ne s'est jamais autant ressenti sur cd. On en redemande !
Unna
8,5/10
Tracklist:
1 - Kill the power
2 - Ruling force
3 - Playing with the devil
4 - Worlds on fire
5 - Ninja
6 - The kids are right now
7 - We live
8 - Open eyed
9 - Dollars and dimes
10 - Saturday
11 - Proceed with caution
12 - More fire