Formé en 2011, Adrenaline Mob est ce que l’on appelle un super-groupe (comprendre : non pas un groupe constitué de super héros, mais un groupe de all stars). Crée, à la base, par le binôme Russell Allen (Symphony X, chant) / Mike Orlando (guitariste totalement déjanté, bizarrement inconnu au bataillon jusque-là…) et rejoint par Mike Portnoy (a-t-on besoin de le présenter ?), le groupe sort discrètement l’album Omerta en 2012, et commence ce qui s’apparente plus à une tournée des clubs et à un bon prétexte pour s’éclater entre copains, qu’à de la fanfaronnade ostentatoire de stars du metal. Officiant dans un style radicalement différent de celui pratiqué par leurs groupes respectifs, les trois hommes concrétisent vraisemblablement le fantasme de jouer du heavy vraiment heavy, des chansons aux structures « simples », et dans un format plus hard rock que metal alambiqué. Piochant à la fois dans Disturbed, et dans l’imaginaire cinématographique d’un Sons Of Anarchy et d’un The Godfather, AMob se veut une famiglia dont les préoccupations thématiques s’articulent autour de l’honneur, les liens de fraternité, et garder la tête haute face à l’adversité.
High Voltage Rock'n'Roll !
En juin 2012, le groupe venait présenter sa mouture (agrémenté de l’ajout frais de John Moyer, de chez Disturbed, à la basse – logique !) à Paris, à l’occasion d’un concert sold out à la Maroquinerie. Couronné de succès, le show verra une assistance déchaînée, sautant et chantant pendant toute la durée d’un spectacle mené de mains de maîtres, qui enflammera les cœurs et suscitera de nouvelles vocations. Alors qu’on attendait avec impatience son successeur discographique, le groupe pondra en 2013 un très dispensable Coverta, album de reprises chouettes mais sans grand intérêt (il faut avouer que comme stratégie commerciale, on a quand même vu mieux…). Entre-temps, la nouvelle du départ de Mikey ne rassurera guère, et blasera bon nombre de fans.
Nouveau line-up : AJ Pero, Mike Orlando, Russell Allen, John Moyer (de gauche à droite)
C’est dans ce contexte étrange qu’arrive aujourd’hui Men Of Honor. Rejoins par AJ Pero (le batteur de Twisted Sister), le groupe choisi d’en mettre d’office plein les oreilles avec le titre d’ouverture de l’album, « The Mob Is Back » : descente de tomes délirante, dans un style et son assez proches de Portnoy, déluge de whammy et de wah wah pour Mike Orlando ; la guerre est déclarée, d’emblée. Les chemises à jabot sont loin pour Russell Allen, qui établit encore une fois sa signature vocale spéciale AMob ici : vocaux d’écorché, surpuissants, et placement vocal « droit » - beaucoup plus proche, stylistiquement, d’un Rob Zombie que d’un James Labrie. « Come And Get Up », un des titres révélés en avant-première, est un hymne groovy au courage et aux cojones (proche d’un « Undaunted », en termes de paroles), qui est véritablement la marque de fabrique du groupe. John Moyer a l’occasion de démontrer son savoir-faire à la basse, et le groupe se trouve ainsi agrémenté d’une nouvelle identité au niveau de sa paire rythmique (Moyer n’a rejoint le groupe que pour la tournée, les parties de basse étant exécutées par Mike Orlando sur Omerta).
Don Corleone & sa bande : "Ain't nothing personal, it's just business"
Seul point d’ombre qui se profile à l’horizon : « Behind These Eyes », puis plus tard « Crystal Clear », qui sentent terriblement le réchauffé, tant au niveau de leur structure, de leur progression harmonique, de leurs paroles, que de leur position sur le disque (en 4ème place et 8ème place, respectivement, comme par hasard)… On croirait à un « All On The Line » ou encore un « Angel Sky », mais en moins inspirés. Porteur d’un message assez intéressant, « Let It Go » (« The past is the past » ; « take out your demons, don't give them a reason, don’t let them control your mind »…) remet quelque peu le disque sur les rails, avant que « Feel The Adrenaline » convainque par la qualité de son écriture. Rappelant beaucoup le « Fuel » de Metallica, cet hommage à la route et à la vitesse est un peu l’identité du big rock en 2014 : sur-vitaminé, intense, et joué par des musiciens virtuoses – les batteurs y trouveront leur compte, et les guitaristes aussi. « Men Of Honor » a de quoi calmer les grattouilleurs de manche de tout poil, avec un solo d’Orlando complexe et étonnant de justesse. Assurément un véritable killer de la guitare, et une pointure du genre - la prétention en moins. Sur « Judgment Day », Russell Allen s’essaie à un nouveau style, avec des vocaux bien plus graves et évoquant une sorte de « grind allégé ». Orlando fait trembler le vibrato sur les parties en fade out de la chanson, évoquant un peu Slayer – à la bonne heure ! « Fallin’ To Pieces » conclue l’album sur une note bluesy et dark, tout en rappelant étrangement le « Fade To Black » de Metallica.
Mike Orlando : le fou génial, novateur et immédiatement reconnaissable à la guitare
Finalement, AMob, c’est un peu le hard rock du XXIème siècle : ayant poussé loin le bouchon de la technicité, aidés par une production énorme, les américains proposent ici une musique rock’n’roll et « pas prise de tête », aux accents groovy, funky et metal – pêle-mêle. Bien plus metal qu’un Nickelback quelque peu vendu au chant des sirènes, AMob possède, à la manière d’un Alter Bridge, ce mélange subtil d’attitude, de sincérité, et en même temps ce côté mainstream qui peut le rendre attrayant au plus grand nombre. Si l’on aurait aisément pu mettre un 10/10 à Omerta, tant la surprise était de taille à l’époque, on devra se fendre d’un 9/10 pour le disque du jour : efficace, mais avec quelques passages dispensables, Men Of Honor demeure, comme son titre l’indique, un album honorable pour un groupe à qui l’on ne peut décemment mettre moins. On attendra cependant avec impatience de revoir le groupe en live, car finalement : il est clair - comme du cristal ! - que c’est la raison première de son existence !
Liens utiles :
Le site officiel d'Adrenaline Mob
Retrouvez Adrenaline Mob sur Facebook !