Manowar se suicide à la petite cuillère
26 ans après sa sortie, Manowar décide de réenregistrer son album Kings of Metal, l’une des pièces maîtresses de sa discographie. En tentant de revenir sur le devant de la scène et de moderniser leur album, Joey DeMaio et sa bande se gaufrent complètement et décrédibilisent leur œuvre, perdant ainsi ce qui leur reste de dignité. L’époque où Manowar décapitait les "falses" à coup de hache est bien loin.
Quel est l’intérêt artistique de réenregistrer un album ? On peut le trouver chez certains groupes qui décident de remettre au goût du jour leurs disques qui n’avaient jamais vu le jour sur le plan international, comme Edguy l’avait fait avec Savage Poetry. Certains souhaitent aussi se rapprocher de l’œuvre qu’ils voulaient sortir à l’époque, c’est le cas d’Onslaught qui se prépare à ré-enregistrer In Search of Sanity avec Sy Keeler au chant.
Mais ces critères ne s’appliquent pas à Kings of Metal MMXIV, réenregistrement de Kings of Metal, pierre angulaire de la discographie de Manowar, contenant des titres incontournables en live comme "Kings of Metal" et "Hail and Kill". Cet album est entré dans l’Histoire du heavy metal et a aussi marqué une étape dans celle du groupe, en étant le dernier disque enregistré avec le guitariste et membre fondateur Ross the Boss.
Si le réenregistrement de Battle Hymns en 2011 était simplement inutile, Kings of Metal MMXIV va au-delà. En effet, Manowar a décidé de défigurer et de lacérer sa grande œuvre. Parlons d’abord des fautes de goût. La plus probante est sur le massacre de "The Sting of the Bumblebee", avec le clic parfaitement audible (!). L’interlude narratif "The Warrior’s Prayer" est aussi lacéré par Brian Blessed, qui surjoue au possible, ridiculisant cette piste. Quant aux guitares acoustiques sur "Heart of Steel" et aux arrangements cheap de "Crown and the Ring", ils n'apportent rien aux compositions originales.
Côté production, les Américians prétendent utiliser "la puissance de la technologie d’aujourd’hui". A la place d’une œuvre originale qui respire et qui peut étendre toute son ampleur sonore, on se retrouve avec un son compacté au possible, afin de donner un aspect "in your face" à l’ensemble. De fait, les instruments sont à l’étroit et le son perd grandement en puissance, devenant ainsi insipide. Ironie du sort, le groupe en est arrivé à faire ce qu’il critiquait sur "All Men Play on Ten" : "make a sound that’s real thin".
L’interprétation n’est pas non plus au beau fixe. Karl Logan n’arrive guère à rendre honneur aux solos de Ross the Boss, les rendant froids et sans personnalité, notamment sur "Blood of the Kings". L’accordage général a été baissé pour permettre à Eric Adams d’interpréter correctement les morceaux, étant donné qu’il ne peut plus monter aussi haut qu’avant. Malheureusement, ses difficultés sont évidentes et sa fougue est loin d’égaler celle de l’album original.
"Salut, tu aimes les films de gladiateurs ?"
Non content de massacrer ses pistes, le groupe s’est aussi permis de changer la tracklist, pour un résultat qui ne fait certainement pas "honneur à l’œuvre originale", comme l’avait déclaré Joey DeMaio. Voici la nouvelle tracklist :
Hail And Kill MMXIV
Kings Of Metal MMXIV
The Heart Of Steel MMXIV (Acoustic Intro Version)
A Warrior's Prayer MMXIV
The Blood Of The Kings MMXIV
Thy Kingdom Come MMXIV
The Sting Of The Bumblebee MMXIV
Thy Crown And Thy Ring MMXIV (Orchestral Version)
On Wheels Of Fire MMXIV
Kings of Metal MMXIV fait l’effet d’un crachat de Manowar envers ses fans. Il montre un groupe au point mort artistiquement, qui est incapable de rendre honneur à sa gloire passée. Un album à éviter comme la peste, qu’on aimerait vite oublier. Il ne reste plus qu’à prier que les autres albums du groupe ne fassent pas l’objet d’un tel affront.
NDLR : l'album n'a pas été noté car il est impossible de mettre 0 sur 10 dans les chroniques de La Grosse Radio.
